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marquoit aussi l’année du regne de la reine, & même celle du prince qui étoit désigné pour successeur : il y en a quelques exemples au commencement de la troisieme race ; mais cela ne se pratique plus.

Il y a des ordonnances que le roi fait pour régler certaines choses particulieres, comme pour la police de ses troupes, pour l’expulsion des vagabonds, la défense du port d’armes, &c. celles-ci sont ordinairement en cette forme : De par le roi, sa majesté étant informée, &c. elles sont simplement signées du roi, & contresignées d’un secrétaire d’état.

Depuis que le parlement fut rendu sédentaire à Paris, on ne laisse pas de trouver encore des ordonnances, mandemens & autres lettres, adressés directement au prevôt de Paris, & aussi aux baillifs & sénéchaux du ressort, au maître des forêts, au duc de Bretagne & à d’autres officiers, chacun pour ce qui les concernoit. Philippe de Valois, dans des lettres du mois de Novembre 1329, dit à la fin à tous ducs, comtes, barons, sénéchaux, baillifs, prevôts, viguiers, baillifs, châtelains & à tous autres justiciers de notre royaume, lesdites clauses être gardées, &c. Il se trouve plusieurs adresses semblables faites en divers tems.

Philippe le Bel adresse en 1308 des lettres, « à nos amés & féaux les gens de l’échiquier de Rouen » : dilectis & fidelibus gentibus nostris scacarii Rothomagensis. Il en adresse de semblables en 1310, « à nos amés & féaux les gens de nos comptes ».

Les premieres lettres que nous ayons trouvé qui soient adressées au parlement de Paris, sont celles de Philippe V. dit le Long, de l’an 1318, dont l’adresse est faite au commencement : dilectis & fidelibus gentibus nostri parlamenti. Dans d’autres de 1328, il est dit, parlamenti Parisius ; & dans d’autres encore de la même année, gentibus nostris parlamentum tenentibus, comme on a dit depuis, les gens tenans notre cour de parlement.

Une chose remarquable dans les lettres de Philippe de Valois, du premier Juin 1331, qui sont adressées à nos amés & féaux les gens des comptes, c’est qu’il leur mande que cette présente ordonnance ils fassent signifier & publier à tous les sénéchaux & baillifs du royaume, ce qui depuis long-tems ne se pratique plus ainsi, les nouvelles ordonnances étant envoyées par le procureur-général du parlement aux baillifs & sénéchaux.

Les juges royaux ont toujours eu seuls le droit de faire crier & publier les nouvelles ordonnances dans tout leur district.

Anciennement nos rois faisoient quelquefois jurer aux principaux personnages de leur état, l’observation des ordonnances qui leur paroissoient les plus importantes. C’est ainsi que Charles VI. ayant fait le 7 Janvier 1400, une ordonnance concernant les officiers de justice & des finances, voulant qu’elle fût inviolablement observée, il ordonna que son observation seroit jurée par les princes du sang, les grands officiers étant en son conseil, par les gens du parlement, de la chambre des comptes, les trésoriers & autres semblables.

Le roi faisoit lui-même serment d’observer inviolablement certaines ordonnances, comme fit le même Charles VI. pour l’ordonnance du dernier Février 1401, touchant le domaine ; il fit serment le premier de l’observer inviolablement, & fit faire ensuite le même serment en sa présence, à ses oncles, à son frere, aux autres princes du sang, au connétable, au chancelier, aux gens du grand conseil (qui étoit le conseil du roi), à ceux du parlement & de la chambre des comptes, & aux trésoriers de Paris.

Le serment que faisoit alors le roi, & qui ne se pratique plus, doit paroitre d’autant moins extraordinaire que le roi à son sacre fait serment d’observer

les lois, ce qui signifie qu’il se conformera en toutes choses à la justice & à l’équité, & aux lois subsistantes.

Il ne s’ensuit pas de-là que le roi soit tellement astreint de se conformer à ses propres ordonnances, ni même à celles de ses prédécesseurs, qu’il ne puisse jamais s’en écarter ; en effet il est certain que le roi peut par de nouvelles ordonnances, édits & déclarations, déroger aux anciennes ordonnances, les abroger, changer ou modifier.

Mais tant qu’elles ne sont point abrogées, elles ont toujours force de loi, le roi lui-même fait gloire de s’y conformer ; elles doivent pareillement être observées par tous les sujets du roi, & les juges sont également obligés de s’y conformer pour leurs jugemens ; c’est ce qui fut ordonné par Clotaire I. en 560, par l’édit de Roussillon, article xxxvj. l’édit de Louis XIII. du mois de Janvier 1629, article j. 53 & 54. il est enjoint aux cours d’observer les ordonnances anciennes & nouvelles qui n’ont point été abrogées ; & l’édit de Moulins, art. iv. ordonne que les cours de parlement procéderont à rigoureuses punitions des juges & officiers de leur ressort qu’elles trouveroient avoir contrevenu aux ordonnances.

C’est dans cet esprit que l’on a établi de tems immémorial l’usage de faire la lecture des ordonnances à la rentrée du parlement & des autres tribunaux.

Mais les lois ayant été trop multipliées pour pouvoir les lire toutes, la lecture que fait le greffier se borne à quelques articles qui concernent la discipline des tribunaux, & n’est plus qu’une vaine cérémonie ; on suppose que chacun doit les relire en son particulier pour s’en raffraichir la mémoire.

Il faut néanmoins convenir qu’il y a certaines dispositions d’ordonnances, qui sans avoir été formellement abrogées, sont tombées en désuétude, parce qu’elles ne conviennent plus aux mœurs présentes ; mais il dépend toujours de la volonté du roi de les remettre en vigueur & d’en prescrire l’observation.

Les cours & autres juges doivent tenir la main à l’exécution des ordonnances.

Les principales ordonnances de la troisieme race, & auxquelles le titre d’ordonnance proprement dite convient singulierement, sont celles du roi Jean en 1356 pour le gouvernement du royaume ; celle de Charles VII. en 1446 touchant le style du parlement ; celle que ce même prince fit au Montil-lès-Tours en 1453 ; celle de Louis XII. faite à Blois en 1498 ; l’ordonnance de François I. en 1535 concernant l’administration de la justice ; son ordonnance de Villers-Coterets en 1539 pour l’abréviation des procès ; l’ordonnance donnée par Charles IX. aux états d’Orléans en 1560 ; celle de Roussillon en 1463, qui est une suite de l’ordonnance d’Orléans ; celle de Moulins en 1566 pour la réformation de la justice ; celle de 1579, dite de Blois, faite sur les plaintes des états assemblés à Blois ; celle de 1629, appellée le code Michault.

Sous le regne de Louis XIV. on fit plusieurs grandes ordonnances pour la réformation de la justice, savoir l’ordonnance de 1667 pour la procédure ; celle de 1669 pour les commitimus ; une autre pour les eaux & forêts ; une en 1670 pour les matieres criminelles ; une en 1673 pour le commerce ; une en 1676 pour le bureau de la ville ; une en 1680 pour les gabelles ; une autre pour les aides ; une en 1681 pour les fermes ; une autre pour la marine ; & en 1687 une ordonnance pour les cinq grosses fermes.

Nous avons aussi plusieurs ordonnances célebres publiées par Louis XV. savoir l’ordonnance des donations en 1731 ; la déclaration de la même année sur les cas prévotaux & présidiaux ; l’ordonnance des testamens en 1735 ; la déclaration concernant les registres des baptêmes, mariages, sépultures, vêtu-