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OPES, s. m. pl. (Archit.) Les Architectes donnent ce nom aux trous qu’ils laissent dans les murs, à l’endroit où les chevrons sont posés.

OPHICARDELON, (Hist. nat.) Pline donne ce nom à une pierre qu’il dit être noire & renfermée entre deux parties blanches. Voyez Plinii Hist. nat. lib. XXXVII. c. 10.

OPHICTIS petra, (Hist. nat. anc.) c’est le nom particulier d’une sorte de marbre dont les veines approchent de la figure des serpens ; ce qui l’a fait appeller ainsi. Saumaise sur Solin, dit très-bien, ce sont des avances de rocher d’où l’on tire le marbre ophite. Ortelius a pris mal-à-propos ophictis petra pour le nom d’un lieu.

OPHIOGENES les, (Géog. anc.) race particuliere d’hommes dans l’Asie mineure, qui passoient pour avoir la propriété d’être craints des serpens, d’en soulager les piqûures, & d’en chasser le venin des corps.

OPHIODONTIUM, OPHIODONTES, ou OPHIOGLOSSUM, (Hist. nat.) nom donné par quelques auteurs aux glossopetres ou langues de serpens pétrifiées. Voyez Glossopetres.

OPHIOGLOSSE, (Botan.) Tournefort compte huit especes d’ophioglosse ou langue de serpent, que je crois n’être que des variétés du même genre de plante ; car elle en souffre dans sa grandeur, dans sa feuille, & dans son épi qui est tantôt simple, tantôt double, & tantôt triple.

L’ophioglosse ordinaire, ophioglossum vulgatum, a la racine garnie de plusieurs fibres qui sont ramassées comme en un faisceau. Elle pousse une queue haute de quatre à cinq doigts, laquelle soutient une feuille semblable en quelque façon à une petite feuille de poirée, mais plus grasse, charnue, lisse, droite, tantôt étroite & oblongue, tantôt large & arrondie, d’un goût douçâtre mêlé de quelque viscosité virulente.

Il sort du sein de cette feuille, à l’endroit par où elle tient au pédicule, un fruit de la figure d’une petite langue applatie qui se termine insensiblement en une pointe, dentelée des deux côtés, comme une lime, & divisée dans sa longueur en plusieurs petites cellules. Ces cellules renferment, au lieu de semence, une fine farine ou poussiere menue, qu’elles laissent échapper lorsqu’elles viennent à s’ouvrir dans leur maturité. C’est l’extrémité de l’épi faite en langue de serpent, qui a procuré à cette plante le nom qu’elle porte.

Elle croît dans les prés, dans les marais, dans des lieux gras & humides. Transplantée dans les jardins à l’ombre, elle y dure & repousse tous les ans en Avril ou Mai, se fane entierement à la fin de Juin, & disparoît alors. Cependant la racine s’enfonce profondément en terre, de façon qu’il est difficile de l’en arracher.

Tous les auteurs estiment cette plante vulnéraire appliquée extérieurement. On la fait infuser au soleil dans de l’huile d’olive, & on passe ensuite le tout par un linge avec une forte expression ; cette huile peut suppléer à celle de mille-pertuis. (D. J.)

OPHIOLATRIE, s. f. culte des serpens. Les Babyloniens, les Egyptiens autrefois, & aujourd’hui quelques peuples d’Afrique sont ophiolâtres.

OPHIOMANCIE, s. f. divination par les serpens. Ce mot est formé du grec ὄφις, serpent, & de μαντεία, divination. L’ophiomancie étoit fort en usage chez les anciens ; elle consistoit à tirer des présages bons ou mauvais des divers mouvemens qu’on voyoit faire aux serpens. On en trouve plusieurs exemples dans les Poëtes. Ainsi dans Virgile, Ænéïd. liv. V. Enée voit sortir du tombeau d’Anchise un serpent énorme, dont le corps fait mille replis tortueux ; ce serpent tourne autour du tombeau & des autels, se glisse

entre les vases & les coupes, goûte de toutes les viandes offertes, & se retire ensuite au fond du sépulchre sans faire aucun mal aux assistans. Le héros en tire un heureux présage pour le succès de ses desseins.

Rien n’étoit si simple que l’origine de cette divination. « Le serpent, dit M. Pluche, symbole de vie & de santé, si ordinaire dans les figures sacrées, faisant si souvent partie de la coëffure d’Isis, toujours attaché au bâton de Mercure & d’Esculape, inséparable du coffre qui contenoit les mysteres, & éternellement ramené dans le cérémonial, passa pour un des grands moyens de connoître la volonté des dieux.

» On avoit tant de foi, ajoute t-il, aux serpens & à leurs prophéties, qu’on en nourrissoit exprès pour cet emploi ; & en les rendant familiers, on étoit à portée des prophetes & des prédictions. Une foule d’expériences faites depuis quelques années par nos apoticaires & par la plûpart de nos botanistes, auxquels l’occasion s’en présente fréquemment dans leurs herborisations, nous ont appris que les couleuvres sont sans dents, sans piquûre & sans venin. La hardiesse avec laquelle les devins & les prêtres des idoles manioient ces animaux, étoit fondée sur l’épreuve de leur impuissance à mal faire ; mais cette sécurité en imposoit aux peuples, & un ministre qui manioit impunément la couleuvre, devoit sans doute avoir des intelligences avec les dieux. Hist. du ciel, tome premier, page 447 ».

Les Marses, peuples d’Italie, se vantoient de posséder le secret d’endormir & de manier les serpens les plus dangereux. Les anciens racontent la même chose des Prylles, peuples d’Afrique ; & l’on pourroit même regarder comme une espece d’ophiomancie la coutume qu’avoient ceux-ci d’exposer aux cérastes leurs enfans lorsqu’ils étoient nés, pour connoître s’ils étoient légitimes ou adultérins. Car dit Lucain, traduit par Brébeuf :

L’enfant par les serpens constamment respecté,
D’un pur attouchement prouve la pureté ;
Et lorsque sa naissance est un présent du crime,
De ces monstres cruels il devient la victime.

On trouve sur cette matiere une dissertation très curieuse de M. l’abbé Souchay, dans les mémoires de l’académie des Belles Lettres, tome VII. p. 273.

OPHIOMORPHITE, (Hist. nat.) nom donné improprement par quelques auteurs à la corne d’ammon, à cause de ses spirales, qui la font ressembler à un serpent entortillé. Voyez Corne d’Ammon.

OPHIOPHAGES, s. m. (Hist. anc.) mangeurs de serpens. Mot formé du grec ὄφις, serpent, & de φαγείν, manger. Pline donne ce nom à quelques peuples d’Ethiopie qui se nourrissoient de serpens. Apparemment que ces reptiles n’étoient pas venimeux, ou qu’on en retranchoit les parties qui auroient pu causer du danger, comme on fait aujourd’hui du serpent à sonnettes, dont la chair prise en bouillons est très bonne à purifier le sang, pourvu qu’on lui ait coupé la tête, qui est remplie d’un poison très-subtil.

OPHIR, (Géog. sacrée.) pays où la flotte d’Hiram roi de Tyr, & de Salomon roi de la Palestine, alloit une fois tout les trois ans, & d’où elle rapportoit quantité d’or. L’Asie, l’Afrique & l’Amérique ont passé pour avoir l’honneur de posséder cette contrée, si fameuse par ses richesses, grace aux imaginations des interpretes de l’Ecriture, qui ne sachant où placer ce pays, l’ont cherché par-tout où la moindre lueur de ressemblance les a promenés. Je me garderai bien de discuter leurs différentes opinions sur ce pays, & les raisons qu’ils donnent cha-