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corlieu & plusieurs oiseaux de mer ont un bec fort long, qui leur procure le moyen de chercher les vers & autres insectes dans les sables des Dunes, qu’ils fréquentent.

Les cannes, les oies & plusieurs autres oiseaux, n’ont le bec si long & si large, qu’afin de pouvoir boire à grands traits, & prendre leur nourriture dans l’eau & dans le limon. Le bec court & gros avec des bords aigus, n’est pas moins nécessaire à d’autres oiseaux pour peler les grains qu’ils avalent. Le bec est fort & aigu dans les oiseaux qui percent le bois & les écorces, comme dans le pic-vert & tous les grimpereaux ; il est menu & délicat dans ceux qui vivent d’insectes ; il est en forme de croix dans ceux qui ouvrent les fruits ; il se croise dans l’oiseau nommé loxia, lequel ouvre avec beaucoup de facilité les pommes ordinaires, celles des sapins, & les autres fruits pour en tirer les pepins. La pie de mer a le bec long, étroit, aigu, applati par les côtés, & disposés à tous égards, pour enlever de dessus les rochers les coquillages qu’on nomme patelles. Les autres formes de bec d’oiseau, toutes ajustées à la maniere de vivre de chaque genre, sont représentées dans les planches de cet ouvrage.

Mais ce qu’il y a de plus digne d’être observé dans les oiseaux à bec plat & large, & qui cherchent leur nourriture en tatonnant ou en fouillant dans la terre, ce sont trois paires de nerfs qui aboutissent au bout de leur bec ; c’est par ces nerfs qu’ils distinguent avec tant de sagacité & d’exactitude, ce qui est propre à leur servir de nourriture, d’avec ce qu’ils doivent rejetter ; ce qu’ils font uniquement par le goût, sans qu’ils voient les alimens. Ces nerfs paroissent avec le plus d’évidence dans le bec & dans la tête du canard, qui les a plus gros que l’oie, ou qu’aucun autre oiseau.

M. Clayton n’a rencontré aucun de ces nerfs dans les oiseaux qui ont le bec rond : mais depuis, faisant plusieurs dissections à la campagne, il vit dans une grôle deux de ces nerfs, qui descendoient entre les deux yeux jusqu’à la partie supérieure du bec ; ils étoient pourtant beaucoup plus menus qu’aucune des trois paires de nerfs qui sont dans le bec du canard, quoiqu’à la vérité plus gros que les nerfs d’aucun autre oiseau à bec rond ; & ce qu’il y a de remarquable, c’est que les grôles paroissent chercher leur nourriture en remuant la bouse de vache, & en fouillant plus qu’aucun autre oiseau à bec rond, &c. trans. philosoph. n°. 206. chez d’autres oiseaux à bec large, le docteur Moulen n’a remarqué que deux paires de nerfs, qui passoient au travers de l’os dans la membrane qui couvre le dedans du bec.

Le cerveau des oiseaux a quelques parties différentes de celui des quadrupedes : on peut voir dans Willis ces différences & leur conformité ; en général, il paroît moins adapté à l’imagination & à la mémoire, que ne l’est le cerveau de l’homme.

L’oreille des oiseaux n’a qu’un seul osselet & un cartilage qui fait une jointure mobile avec l’osselet, lequel d’ailleurs est très-dur & très-menu, appuié sur une base plus large & ronde. M. Derham a fait quelques observations nouvelles sur la membrane du tambour des oiseaux, la petite colonne & ce qu’il appelle la chambre de l’ouie. Voyez sa Théologie physique.

La structure de la langue des oiseaux mérite aussi notre attention, par ses varietés, la forme, la longueur, les attaches & les muscles. On indiquera au mot pic-vert pour exemple, la structure particuliere de la langue de cet oiseau.

Le gésier des oiseaux est très robuste, & a une faculté de trituration bien étonnante. Nous en ferons un article particulier, ainsi que de leur ventricule.

La structure & la situation du poumon, la disposition de la poitrine & de ses os rangés en forme de quille, afin de procurer un passage commode au travers de l’air, sont des parties fort remarquables dans les oiseaux.

Il en faut dire de même des muscles puissans qui meuvent leurs aîles pour contre-balancer, & pour supporter le corps dans le tems que l’oiseau est juché.

Leurs poumons sont attachés au thorax & n’ont que peu de jeu ; au lieu qu’ils jouent librement dans d’autres animaux. Cette structure sert à fournir aux oiseaux leur vol constant. Ils n’ont point de diaphragmes, mais à sa place ils ont plusieurs vessies, composées de membranes fines & transparentes, qui s’ouvrent les unes dans les autres. Vers la partie supérieure, chaque lobe des poumons est percé en deux endroits, par lesquels l’air passe dans les vessies dont nous venons de parler ; de sorte qu’en soufflant dans la trachée-artere, on fait lever tant soit peu les poumons, & tout le ventre est gonflé par l’air : c’est par ce moyen sans doute, que les oiseaux rendent leur corps plus ou moins léger dans leur vol, laissant entrer plus ou moins d’air, à mesure qu’ils veulent monter ou descendre, de la même maniere que les poissons ont une vessie remplie d’air dans le corps. afin de nager plus légerement, & s’enfoncer plus ou moins dans l’eau. Histoire de l’Acad. des Sciences, année 1693.

Les muscles de la poitrine des oiseaux, sont les plus forts de tous pour servir au mouvement des aîles, qui requierent cette force dans les vols prompts & de longue haleine : dans l’homme, ce sont les muscles de la jambe ; de sorte que s’il vouloit voler, ce seroit plutôt par l’action de ses jambes, que par celle des bras qu’il y parviendroit. Transact. philos. n°. 120.

Le col des oiseaux est exactement proportionné à la longueur des jambes, & quelquefois plus long pour pouvoir chercher la nourriture dans les eaux ; comme, par exemple, dans les cygnes, auxquels le long col sert à pouvoir atteindre jusqu’au fond de la vase des rivieres. Le col sert encore à contre-balancer le corps dans le vol, comme il paroît par l’exemple des oies & des canards. Lorsqu’ils volent, ils étendent la tête & le col, formant de cette maniere une équilibre exacte du corps qui pese également des deux côtés sur les aîles ; cependant comme le corps de ces oiseaux est aussi fait pour nager, leurs aîles sont attachées hors du centre de gravité, & plus près de la tête. Dans le héron, la tête & le long col quoique repliés sur le corps, lorsque l’oiseau vole, emportent l’équilibre sur la partie de derriere du corps ; mais pour rétablir cet équilibre, & pour suppléer à la brieveté de sa queue, il étend les jambes en arriere dans le tems du vol.

Je pourrois encore décrire l’organe de la voix des oiseaux, ceux de leur trituration, de leur digestion, de leur génération, &c. mais il faut partager & porter ailleurs ces détails anatomiques, pour leur suppléer ici le tableau charmant du peintre des saisons, que tout le monde s’empressera de lire.

Dieu des arts, fais éclore au sein de ma patrie
Un poëte semblable à cet heureux génie !

« Prens ma muse (c’est lui qui parle) prens un vol nouveau, l’harmonie des bois t’appelle, & t’invite à sortir dans les plus rians atours de la simplicité & de la joie. Vous rossignols, prêtez-moi vos chants, répandez dans mes vers l’ame touchante & variée de votre mélodie.

» Au tems où l’amour, cette ame universelle t’éveille peut-être, échauffe l’air, & souffle l’esprit de vie dans tous les ressorts de la nature, la trou-