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du ; ce soin cependant n’est pas toujours borné-là, bien des fois il est accompagné d’autres précautions.

Plusieurs enveloppent leurs œufs dans un tissu de cire très-serré ; d’autres le couvrent d’une couche de poils tirés de leur corps. Quelques especes les arrangent dans un amas d’humeur visqueuse, qui se durcissant à l’air, les garantit de tout accident. Il y en a qui font plusieurs incisions obliques dans une feuille, & cachent dans chacune de ces incisions un œuf. On en voit qui ont soin de placer leurs œufs derriere l’écorce des arbres, & dans des endroits où ils sont entierement à couvert de la pluie, du mauvais tems & de la trop grande ardeur du soleil. Quelques-uns ont l’art d’ouvrir les nervures des feuilles & d’y pondre leurs œufs ; de maniere qu’il se forme autour d’eux une excroissance qui leur sert tout-à-la-fois d’abri, & aux petits éclos d’alimens. Il y en a qui enveloppent leurs œufs d’une substance molle qui fait la premiere nourriture de ces animaux naissans, avant qu’ils soient en état de supporter des alimens plus solides, & de se les procurer. D’autres enfin font un trou en terre, & après y avoir porté une provision suffisante de nourriture, ils y placent leur ponte.

Si un grand nombre d’insectes, après avoir ainsi placé leurs œufs, les abandonnent au hasard, il y en a d’autres qui ne les abandonnent jamais ; tels sont par exemple quelques sortes d’araignées qui ne vont nulle part, sans porter avec elles dans une espece d’enveloppe tous les œufs qu’elles ont pondus. L’attachement qu’elles ont pour ces œufs est si grand, qu’elles s’exposent aux plus grands périls plutôt que de les quitter. Telles sont encore les abeilles, les guêpes, les frélons & plusieurs mouches de cet ordre. Les soins que les fourmis ont de leurs petits va encore plus loin, car ils s’étendent jusqu’aux nymphes dans lesquels ils doivent se changer. Les insectes ayant en général tant de soin de leurs œufs, il est aisé de comprendre la multitude incroyable de ces petits animaux sur la terre, dont une partie périt au bout d’un certain tems, & l’autre sert à nourrir les oiseaux & autres animaux qui en doivent subsister. (D. J.)

Œuf de serpent, (Littérat.) Une grande superstition des druides regardoit l’œuf des serpens. Selon ces anciens prêtres gaulois, les serpens formoient cet œuf de leur propre bave, lorsqu’ils étoient plusieurs entortillés ensemble. Dès que cet œuf étoit formé, il s’élevoit en l’air au sifflement des serpens, & il falloit, pour conserver sa vertu, l’attraper lorsqu’il tomboit ; mais celui qui l’avoit ainsi pris montoit d’abord à cheval pour s’enfuir, & s’éloignoit au plus vîte, parce que les serpens, jaloux de leur production, ne manquoient pas de pour suivre celui qui la leur enlevoit, jusqu’à ce que quelque riviere arrêtât leur poursuite.

Dès que quelqu’un avoit été assez heureux pour avoir un de ces œufs, on en faisoit l’essai en le jettant dans l’eau, après l’avoir entouré d’un petit cercle d’or ; & pour être trouvé bon, il falloit qu’il surnageât ; alors cet œuf avoit la vertu de procurer à celui qui le possédoit gain de cause dans tous ses différends, & de lui faire obtenir, quand il le desiroit, un libre accès auprès des rois mêmes.

Les druides recherchoient avec grand soin cet œuf, se vantoient souvent de l’avoir trouvé, & en vendoient à ceux qui avoient assez de crédulité pour ajouter foi à toutes leurs rêveries. Pline, en traitant ce manege de vaine superstition, nous apprend que l’empereur Claude fit mourir un chevalier romain du pays des Vocontiens (de la Provence), pour cette seule raison qu’il portoit un de ces œufs dans son sein, dans la vue de gagner un grand procès. Il nous reste un ancien monument sur lequel

sont deux serpens, dont l’un tient dans la gueule un œuf que l’autre façonne avec sa bave. (D. J.)

Œufs de mer, (Hist. nat.) ce sont des échinites ou oursins pétrifiés.

Œufs de serpens, (Hist. natur.) ovum anguium, nom donné par Boëce de Boot & par quelques autres naturalistes à une espece d’échinites ou d’oursins pétrifiés.

Œuf philosophique, espece de petit matras ayant la forme d’un œuf, & portant son cou à l’un de ses bouts, c’est-à-dire selon la direction de son grand diametre. Ce vaisseau doit être fait d’un verre très-épais & très fort. On l’emploie aux digestions de certaines matieres peu volatiles, & ordinairement métalliques, qu’on y enferme en le scellant hermétiquement. (b)

Œuf des druides, (Hist. anc.) chez les Celtes ou les premiers habitans des Gaules, les druides ou prêtres exerçoient la Médecine ; ils attribuoient sur-tout des vertus merveilleuses à ce qu’ils appelloient l’œuf des serpens. Cet œuf prétendu étoit formé, selon eux, par l’accouplement d’un grand nombre de serpens entortillés les uns dans les autres : aussi-tôt que ces serpens commençoient à siffler, l’œuf s’élevoit en l’air, & il falloit le saisir avant qu’il fût retombé à terre ; aussi tôt après il falloit monter à cheval, & fuir au galop pour éviter la fureur des serpens, qui ne s’arrêtoient que lorsque le cavalier avoit franchi quelque riviere. Voyez Pline, Hist. nat. liv. XXIX. ch. iij. Voyez plus haut Œufs de serpent.

Œuf d’Orphée, (Hist. anc.) symbole mystérieux dont se servoit cet ancien poëte philosophe, pour désigner la force intérieure & le principe de fécondité dont toute la terre est impregnée, puisque tout y pousse, tout y végete, tout y renaît. Les Egyptiens & les Phéniciens avoient adopté le même symbole, mais avec quelque augmentation ; les premiers en représentant un jeune homme avec un œuf qui lui sort de la bouche ; les autres en mettant cet œuf dans celle d’un serpent dressé sur sa queue. On conjecture que par-là les Egyptiens, naturellement présomptueux, vouloient faire entendre que toute la terre appartient à l’homme, & qu’elle n’est fertile que pour ses besoins. Les Phéniciens au contraire, plus retenus, se contentoient de montrer que si l’homme a sur les choses insensibles un empire très-étendu, il en a moins sur les animaux, dont quelques-uns disputent avec lui de force, d’adresse & de ruses. Les Grecs, qui respectoient trop Orphée pour avoir négligé une de ses principales idées, assignerent à la terre une figure ovale. Voyez l’Histoire critique de la Philosophie par M. Deslandes. (G)

Œuf d’Osiris, (Hist. anc.) les Egyptiens, si l’on en croit Hérodote, racontoient qu’Osiris avoit enfermé dans un œuf douze figures pyramidales blanches pour marquer les biens infinis dont il vouloit combler les hommes ; mais que Typhon son frere ayant trouvé le moyen d’ouvrir cet œuf, y avoit introduit secrettement douze autres pyramides noires, & que par ce moyen le mal se trouvoit toujours mêlé avec le bien. Ils exprimoient par ces symboles l’opposition des deux principes du bien & du mal qu’ils admettoient, mais dont cette explication ne concilioit pas les contrariétés. (G)

Œufs, en terme de Metteur en œuvre, sont de petites cassolettes ou boîtes de senteur qui sont suspendues à chaque côté de la chaîne d’un étui de piece. Voyez Étui de piece.

Œuf, (Rafin. de sucre.) on nomme ainsi dans les moulins à sucre, le bout du pivot du grand tambour, à cause qu’il a la figure de la moitié d’un œuf d’oye. Cette piece s’ajoute au pivot, & y tient par le moyen d’une ouverture barlongue qu’on y fait ;