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Le mot de Norkoping veut dire, marché du nord, parce que cette ville est située dans la partie septentrionale de l’Ostrogothie ; elle est à 28 lieues S. O. de Stockholm. Long. 35. 15. lat. 58. 28. (D. J.)

Banck (Laurent) né à Norkoping, & mort en 1662, fut professeur en Jurisprudence à Francker, après ses voyages en plusieurs pays de l’Europe : on remarque entre ses livres, celui de la taxe de la chancellerie romaine, dont il donna une nouvelle édition. On sait que ce livre fut imprimé à Rome en 1514, à Cologne en 1515, à Paris en 1520 & en 1545 ; à Francfort en 1612, à Bois le-Duc en 1664 : enfin, on ne sauroit croire combien de fois ce livre singulier a été imprimé depuis. L’inquisition d’Espagne & de Rome l’ont condamné, en supposant que les hérétiques l’avoient corrompue. (D. J.)

NORMAL, adj. (Géom.) une ligne normale, en Géometrie, est ce que l’on appelle autrement & plus ordinairement une perpendiculaire. Voyez Perpendiculaire.

NORMANDIE, (Géog.) belle & grande province de France, avec titre de duché ; c’est l’un de ses plus importans gouvernemens généraux, par sa situation sur la mer océane, dans le voisinage de l’Angleterre au septentrion, & dont elle n’est séparée que par le canal de la Manche. Elle est bornée à l’orient, par la Picardie & l’île de France ; au midi, par la Beausse, le Perche & le Maine ; & au couchant, par la Bretagne. Elle a environ 60 lieues du levant au couchant, depuis Aumale jusqu’à Valogne : sa largeur du midi au septentrion, est de trente lieues, depuis Verneuil-sur-l’Aure, jusqu’à la ville d’Eu & Tréport. Son circuit est d’environ 240 lieues, dont la plus grande partie est en côtes de mer ; mais particulierement le Cotantin qui avance dans la mer en maniere de péninsule.

Ce pays du tems des empereurs Romains, faisoit partie de la Gaule celtique ou lyonnoise ; ensuite les Francs ayant conquis les Gaules, ce même pays fit partie du royaume de Neustrie sous les rois Mérovingiens, sous les Carlovingiens : après le partage fait entre les enfans de Louis le Débonnaire, cette province demeura à Charles le Chauve, roi de la France occidentale ; Charles le Simple son petit-fils, fut obligé de la céder en propriété à Rollon, chef des Normands ou Danois. Les successeurs de ce Rollon furent si puissans, que Guillaume, duc de Normandie, descendit en Angleterre & y fut couronné roi. Enfin, Philippe Auguste se rendit maître de la Normandie l’an 1203 sur Jean-Sans-terre, & la réunit à la couronne. Depuis ce tems-là, quelques-uns des rois de France jusqu’à la fin du quatorzieme siecle, donnerent à leur fils-aîné le titre de duc de Normandie, jusqu’à ce que celui de Dauphin ait prévalu.

Cette province est une des plus riches, des plus fertiles, & des plus commerçantes du royaume ; elle est aussi celle qui donne le plus de revenu au roi. Il n’y croît presque point de vin, mais on y fait beaucoup de cidre & de poiré. Elle est arrosée de plusieurs rivieres, dont les principales sont l’Orne, la Touque, la Rille, l’Eure, la Dive & la Seine. Les prairies & les pâturages en sont admirables ; la mer y est très-poissonneuse, & le poisson en est excellent.

Il se fait beaucoup de sel blanc dans l’Avranchin, le Cotantin & le Bessin, dont on sale les beurres du pays. Il s’y trouve plusieurs mines de fer, & quelques-unes de cuivre ; les verreries y sont en grand nombre ; son principal commerce consiste en laines, draperies, toiles, pêche, &c.

La Normandie comprend sous la métropole de Rouen, six évêchés ; l’on compte dans ses sept diocèses 80 abbayes, & 4289 paroisses. Les pairies &

duchés de cette province qui subsistent, sont Eu, Aumale, Elbeuf & Harcourt.

Je n’entrerai point dans le gouvernement civil & militaire de ce pays, encore moins dans les détails particuliers ; on a sur tout cela, une description historique & géographique en deux volumes in-4°. avec figures ; je dirai seulement que c’est la province du royaume qui a produit le plus de gens d’esprit & de goût pour les Sciences. (D. J.)

NORMANDS, (Hist. mod.) peuples de la Scandinavie & des bords de la mer Baltique, qui ravagerent la France & l’Angleterre pendant le neuvieme siecle. On les appelloit Normands, hommes du nord, sans distinction, comme nous disons encore en général les corsaires de Barbarie. Voici le récit de leurs incursions d’après l’illustre auteur moderne de l’histoire générale : il me procure sans cesse des tableaux intéressans pour embellir l’Encyclopédie.

Les Normands trop nombreux pour leur pays, n’ayant à cultiver que des terres ingrates, manquant de manufactures, & privés des arts, ne cherchoient qu’à se répandre loin de leur patrie. Le brigandage & la piraterie leur étoient nécessaires, comme le carnage aux bêtes féroces. Dès le quatrieme siecle, ils se mêlerent aux flots des autres barbares qui porterent la désolation jusqu’à Rome & en Afrique.

Charlemagne prévit avec douleur les descentes que ces peuples feroient un jour, & les ravages qu’ils exerceroient ; il songea à les prévenir. Il fit construire des vaisseaux qui resteroient toujours armés & équipés ; il forma à Boulogne un des principaux établissemens de sa marine, & il y releva l’ancien phare qui avoit été détruit par le tems : mais il mourut, & laissa dans la personne de Louis le Débonnaire un successeur qui n’hérita pas de son génie ; il s’occupa trop de la réforme de l’église, peu du gouvernement de son état, s’attira la haine des ecclésiastiques, & perdit l’estime de ses sujets. A peine fut-il monté sur le trône en 814, que les Normands commencerent leurs courses. Les forêts dont leur pays étoit hérissé, leur fournissoit assez de bois pour construire leurs barques à deux voiles & à rames. Environ cent hommes tenoient dans ces bâtimens, avec leurs provisions de biere, de biscuit de mer, de fromage & de viande salée. Ils côtoyoient les terres, descendoient où ils ne trouvoient point de résistance, & retournoient chez eux avec leur butin, qu’ils partageoient ensuite selon les lois du brigandage, ainsi qu’il se pratique en Barbarie.

Dès l’an 843, ils entrerent en France par l’embouchure de la riviere de Seine, & mirent la ville de Rouen au pillage. Une autre flotte entra par la Loire, & dévasta tout jusqu’en Touraine ; ils emmenoient en esclavage les hommes, ils partageoient entr’eux les femmes & les filles, prenant jusqu’aux enfans pour les élever dans leur métier de pirates. Les bestiaux, les meubles, tout étoit emporté. Ils vendoient quelquefois sur une côte ce qu’ils avoient pillé sur l’autre. Leurs premiers gains exciterent la cupidité de leurs compatriotes indigens. Les habitans des côtes germaniques & gauloises se joignirent à eux, ainsi que tant de renégats de Provence & de Sicile ont servi sur les vaisseaux d’Alger.

En 844, ils couvrirent la mer de navires ; on les vit descendre presqu’à-la-fois en Angleterre, en France & en Espagne. Il faut que le gouvernement des François & des Anglois fût moins bon que celui des Mahométans qui regnoient en Espagne ; car il n’y eut nulle mesure prise par les François ni par les Anglois pour empêcher ces irruptions ; mais en Espagne les Arabes garderent leurs côtes, & repousserent enfin les pirates.

En 845 les Normands pillerent Hambourg, & pénétrerent avant dans l’Allemagne. Ce n’étoit plus