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déduite du mélange estimé infaillible d’acide nitreux & d’acide vitriolique dans l’eau-forte, est fondée sur une théorie fausse, chimérique, sur l’ignorance de la doctrine des rapports, & de la volatilité respective de l’acide vitriolique adhérant à sa base, & de l’acide nitreux dégagé.

Les usages médicinaux internes de l’acide nitreux sont fort bornés ; ou plutôt on n’emploie presque point l’acide nitreux intérieurement. Sylvius Deleboë vante pourtant l’acide nitreux, soit simple soit dulcifié, comme le plus efficace des remedes contre les vents. D’ailleurs il est assez généralement avoué qu’il ne possede que les qualités génériques des acides. On a donné la préférence, dans l’usage, aux deux autres acides minéraux, à cause de l’odeur desagréable du nitre, & plus encore à cause d’une qualité virulente que cette odeur y a fait soupçonner.

On s’en sert extérieurement avec succès & commodité pour ronger les verrues.

Il a plusieurs usages pharmaceutiques officinaux : outre cette ridicule préparation du baume d’aiguilles dont nous avons déja parlé, & de l’huile de camphre dont on a fait un remede, il concourt à la formation, & fournit même le principe vraiment médicamenteux de la pierre infernale, de l’eau mercurielle, du précipité rouge, &c. qui sont des bons corrosifs. L’onguent mercuriel citrin lui doit évidemment une bonne partie de son efficacité. Voyez Mercure, Mat. méd. On trouve dans la nouvelle Pharmacopée de Paris, sur l’esprit-de-nitre, la même inexactitude que nous avons déja relevée sur le nitre : il y est dit que l’acide nitreux entre dans le sublimé corrosif, dans le précipité blanc, &c. On aura de la peine à faire croire cela aux Apothicaires instruits à qui ce code est destiné. Voyez Mercure, Chimie, Précipitation & Rapport. (b)

NITRIE, le désert de, (Géog.) fameuse solitude de la basse Egypte, au pié d’une montagne médiocre aussi nommée Nitrie ; ce désert a environ 40 milles de longueur. Il est borné au N. par la Méditerranée, E. par le Nil, S. par le désert de Scété, & O. par ceux de Saint-Hilarion & des cellules ; il prend son nom d’une grande quantité de nitre dont il abonde. On voyoit autrefois plusieurs monasteres dans ce désert, mais il n’en reste plus que trois ou quatre : vous en trouverez la description dans Coppin, Voyage d’Egypte. (D. J.)

Nitrie, le lac de, (Géog.) on appelle ainsi un lac qui se trouve dans le désert de Nitrie, parce qu’il s’y fait du nitre qu’on nomme natron en Egypte. Ce lac paroît comme un grand étang glacé. Quand le natron est dans sa perfection, le dessus du sel ressemble à un sel rougeâtre, & ce sel est de l’épaisseur de quelques pouces ; au-dessous de ce premier couvert est un nitre noir dont on se sert pour faire la lessive. Quand on a enlevé ce nitre noir, on trouve le véritable nitre ou natron, qui est semblable à la glace de dessus, excepté qu’il est plus dur & plus solide. Voyez Natron. (D. J.)

NIVARIA, (Géog.) une des îles Fortunées, selon Pline, liv. VI. chap. xxxij. où il dit qu’elle avoit pris ce nom de la neige qu’on y voyoit perpétuellement. Tous les manuscrits, selon le pere Hardouin, portent Ninguaria, mais cela revient au même : cette île doit être l’île de Ténériffe ou l’île d’Enfer, car dans les autres Canaries on ne voit point de neige.

NIVA-TOKA, (Hist. nat. Bot.) c’est le sureau commun du Japon, dont on distingue néanmoins plusieurs especes : 1°. le tadsu, qui est un sureau à grappes ; 2°. le jama-toolimi, qui est le sureau aquatique à fleur simple : sa moëlle sert de meche pour les chandelles ; 3°. le mitse ou jamma s’imira, autre

sureau aquatique, dont les baies sont rouges, de figure conique, & un peu applatis.

NIUCHE, (Géog.) royaume de la Tartarie orientale, ou chinoise. Le pere Martini dit que les habitans vivent sous des tentes, qu’ils n’ont presque aucune religion, & qu’ils brûlent les corps morts. La plus grande montagne qu’on trouve dans le pays est celle de Tin, d’où la riviere de Sunghoa prend sa source. (D. J.)

NIVE, (Géog.) riviere du royaume de Navarre, appellée Errobi, dans la langue du pays. Elle descend des montagnes de la basse Navarre, se joint avec l’Adour dans les fossés de Bayonne, & va se jetter dans la mer à une lieue de cette ville. (D. J.)

NIVEAU, s. m. (Arpent.) instrument propre à tirer une ligne parallele à l’horison, & à la continuer à volonté, ce qui sert à trouver la différence de hauteur de deux endroits, lorsqu’il s’agit de conduire de l’eau de l’un à l’autre, de dessécher des marais, &c. ce mot vient du latin libella, verge ou fléau d’une balance, laquelle pour être juste doit se tenir horisontalement.

On a imaginé des instrumens de plusieurs especes & de différentes matieres pour perfectionner le nivellement, ils peuvent tous, pour la pratique, se réduire à ceux qui suivent.

Le niveau d’air est celui qui montre la ligne de niveau par le moyen d’une bulle d’air enfermée avec quelque liqueur dans un tuyau de verre d’une longueur & d’une grosseur indéterminées, & dont les deux extrémités sont scellées hermétiquement, c’est-à-dire fermées par la matiere même du verre, qu’on a fait pour cela chauffer au feu d’une lampe. Lorsque la bulle d’air vient se placer à une certaine marque pratiquée au milieu du tuyau, elle fait connoître que le plan sur lequel la machine est posée est exactement de niveau ; mais lorsque ce plan n’est point de niveau, la bulle d’air s’éleve vers l’une des extrémités. Ce tuyau de verre peut se placer dans un autre de cuivre, qui a dans son milieu une ouverture, au moyen de laquelle on observe la position & le mouvement de la bulle d’air ; la liqueur, dont le tuyau est rempli, est ordinairement ou de l’huile de tartre, ou de l’eau seconde, aqua secunda, parce que ces deux liqueurs ne sont sujettes ni à se geler, comme l’eau ordinaire, ni à la raréfaction & à la condensation, comme l’esprit de vin.

On attribue l’invention de cet instrument à M. Thevenot.

Le niveau d’air avec pinules n’est autre chose que le niveau d’air perfectionné, auquel on a ajouté quelques pieces pour le rendre plus commode & plus exact : cet instrument est composé d’un niveau d’air (Pl. d’Arpent. fig. 4.) d’environ 8 pouces de long, & de 7 à 8 pouces de diametre ; il est renfermé dans un tuyau de cuivre, avec une ouverture au milieu : les tuyaux sont placés dans un conducteur ou une espece de regle droite d’une matiere solide, & longue d’un pié, aux extrémités de laquelle il y a des pinules exactement perpendiculaires aux tuyaux & d’égale hauteur ; elles sont percées chacune d’une ouverture quarrée, où sont deux filets de cuivre qui se croisent à angles droits, & au milieu desquels est pratiqué un très-petit trou, pour voir à travers le point auquel on veut viser. Le tuyau de cuivre est attaché au conducteur au moyen de deux vis, dont l’une sert à élever & à abaisser le tube à volonté pour le mettre de niveau. Le haut de la boule ou du bec est rivé à un petit conducteur qui saille en haut, dont un des bouts est attaché à vis au grand conducteur, & l’autre est garni d’une vis 5, qui sert à élever & à abaisser l’instrument. Cet instrument est pourtant moins commode qu’un autre dont nous allons parler, parce que, quelque petits