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c’est le nom qu’on donne dans l’Indostan à une nation de brigands, sujets de quelques rajahs ou souverains indiens idolâtres, qui descendent du fameux rajah Sevagi, célebre par les incursions & les conquêtes qu’il fit vers la fin du siecle passé, qui ne purent jamais être réprimées par les forces du grand-mogol. Les successeurs de ce prince voleur, se sont bien trouvés de suivre la même profession que lui, & le métier de brigands est le seul qui convienne aux Marattes leurs sujets. Ils habitent des montagnes inaccessibles, situées au midi de Surate, & qui s’étendent jusqu’à la riviere de Gongola, au midi de Goa, espace qui comprend environ 250 lieues ; c’est de cette retraite qu’ils sortent pour aller infester toutes les parties de l’Indostan, où ils exercent quelquefois les cruautés les plus inouies. La foiblesse du gouvernement du grand-mogol a empêché jusqu’ici qu’on ne mît un frein aux entreprises de ces brigands, qui sont idolâtres, & qui parlent un langage particulier.

MARAVA, (Géog.) petit royaume des Indes, entre les côtes de la Pêcherie & de Coromandel, est borné au nord par le royaume de Tanjaour, au sud-ouest par celui de Travaucor, & au couchant par le Maduré dont il est tributaire. (D. J.)

MARAUDE, s. m. (Art milit.) c’est à la guerre le pillage que les soldats qui sortent du camp sans ordre, vont faire dans les villages des environs.

La maraude est entierement préjudiciable dans les armées, elle empêche les paysans des environs du camp d’apporter leurs denrées, par la crainte d’être pillés en y allant : elle fait aussi périr beaucoup de braves soldats, qui sont assommés par les paysans. Lorsque les maraudeurs sont pris par le prevôt de l’armée, il les fait pendre sur le champ.

On pourroit apporter quelque remede à la maraude, si on chargeoit les colonels des désordres de leurs soldats, & si on punissoit l’officier particulier, quand on trouveroit son soldat hors du camp. En établissant cette police, on ne seroit pas long-tems à s’appercevoir du changement qu’un tel ordre apporteroit dans une armée. Mais de faire pendre simplement un malheureux qui a été pris sur le fait, comme il est d’usage de le faire, c’est un foible remede. Le prevôt n’attrape ordinairement que les sots, cela ne va pas à la source du mal, & c’est ne rien faire d’important pour l’arrêter.

MARAUDEUR, s. m. (Art. milit.) est un soldat qui va à la maraude, ou à la petite guerre. Voyez Maraude.

MARAVEDI, s. m. (Hist. mod.) petite monnoie de cuivre qui a cours en Espagne, & qui vaut quelque chose de plus qu’un denier de France. Ce mot est arabe, & est dérivé de almoravides, l’une des dinasties des Mores, lesquels passant d’Afrique en Espagne, donnerent à cette monnoie leur propre nom, qui par corruption se changea ensuite en maravedi ; il en est fait mention dans les decrétales aussi bien que d’autres auteurs latins sous le nom de marabitini.

Les Espagnols comptent toujours par maravedis, soit dans le commerce, soit dans les finances, & quoique cette monnoie n’ait plus cours parmi eux. Il faut 63 maravedis pour faire un réal d’argent, ensorte que la piastre ou piece de huit réaux contient 504 maravedis, & la pistole de quatre pieces de huit en contient 2016. Voyez Monnoie.

Cette petitesse du maravedi produit de grands nombres dans les comptes & les calculs des Espagnols, de façon qu’un étranger ou un correspondant se croiroit du premier coup d’œil débiteur de plusieurs millions pour une marchandise qui se trouve à peine lui coûter quelques louis.

Les lois d’Espagne font mention de plusieurs espe-

ces de maravedis, les maravedis alphonsins, les maradvedis blancs, les maravedis de bonne monnoie, les

maravedis combrenos, les maravedis noirs, les vieux maravedis : quand on trouve maravedis tout court, cela doit s’entendre de ceux dont nous avons parlé plus haut ; les autres sont différens en valeur, en finance, en ancienneté, &c.

Mariana assure que cette monnoie est plus ancienne que les Maures, qu’elle étoit d’usage du tems des Goths ; qu’elle valoit autrefois le tiers d’un réal, & par conséquent douze fois plus qu’aujourd’hui. Sous Alphonse X I. le maravedi valoit dix-sept fois plus qu’aujourd’hui ; sous henri second, dix fois ; sous henri III. cinq fois ; & sous Jean II. deux fois & demie davantage.

MARBELLA, (Géog.) petite ville maritime d’Espagne, à l’extrémité occidentale du royaume de Grenade, avec un port fort commode : c’est peut-être la Salduba des anciens. (D. J.)

MARBRE, s. m. (Hist. nat Min.) marmor, c’est une pierre opaque, compacte, prenant un beau poli, remplie pour l’ordinaire de veines & de taches de différentes couleurs. Quoiqu’assez dure, cette pierre ne fait point feu lorsqu’on la frappe avec de l’acier ; l’action du feu la réduit en chaux, & elle se dissout dans tous les acides, d’où l’on voit que c’est une pierre calcaire.

Les couleurs du marbre varient à l’infini. Il y en a qui n’a qu’une seule couleur ; il est ou blanc, ou noir, ou jaune, ou rouge, ou gris, &c. Il y en a d’autre qui est rempli de veines & de couleurs différentes. Ces couleurs ne changent rien à la nature de la pierre, elles viennent de différentes substances minérales & métalliques comme celles des autres pierres. Les marbres noirs paroissent colorés par une substance bitumineuse, dont on découvre l’odeur en les frottant.

L’on a donné différens noms aux marbres d’après leurs différentes couleurs, d’après leurs accidens, & d’après les différens endroits où on les trouve. Il seroit trop long de rapporter ici tous ces noms, qui ont jetté beaucoup de confusion dans cette matiere, on les trouvera répandus dans les différens articles. Pour marbre de Paros, voyez Paros, & ainsi des autres. En général on observera que les marbres des anciens nous sont assez peu connus, Pline ne nous en a souvent transmis que le nom. Voyez l’art. Maçonnerie.

Tous les marbres n’ont point la même dureté, & ne prennent point un poli également brillant ; il y en a qui se travaillent aisément, d’autres s’égrainent & se cassent très-facilement.

Le marbre se trouve par couches & par masses ; qui sont quelquefois très-épaisses & très considérables ; celles qui sont les plus proches de la surface de la terre sont communément les moins bonnes, étant remplies de fentes, de gersures, & de ce que les Marbriers appellent des terrasses, ou des veines d’une matiere étrangere, qui l’interrompent & empêchent qu’on ne le puisse travailler avec succès.

Baglivi, dans son traité de lapidum vegetatione, rapporte un grand nombre d’exemples, qui prouvent évidemment que le marbre se reproduit de nouveau dans les carrieres d’où il a été tiré ; il dit que l’on voyoit de son tems des chemins très-unis, dans des endroits où cent ans auparavant il y avoit eu des carrieres très-profondes ; il ajoute qu’en ouvrant des carrieres de marbre on rencontre des haches, des pics, des marteaux, & d’autres outils enfermés dans du marbre, qui ont vraissemblablement servi autrefois à exploiter ces mêmes carrieres, qui se font remplies par la suite des tems, & sont devenues propres à être exploitées de nouveau.

Wallerius soupçonne que c’est une craie ou terre calcaire ou marneuse qui sert de base au marbre,