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lons de la main gauche, fig. 20, on les applique à plat sur une des mâchoires de l’étau, de maniere que la coupille soit dans une situation perpendiculaire à l’horison, & s’appuie par un bout sur cette mâchoire & frappant à petits coups sur l’autre bout a de la coupille ; on lui fait prendre peu-à-peu la forme d’une tête plate par-dessus, laquelle remplit ladite concavité du paillon. On retourne ensuite ces paillons le dessus dessous, pour en faire autant de l’autre côté à l’autre bout de la coupille.

30. On vient de joindre & de river les deux paillons gh, (fig. 15) au paillon ou crochet Ec. Maintenant les deux paillons g, h, entre le pouce & l’indice de la main gauche, fig. 21, on prend avec la pointe CD un seul paillon k, que l’on porte aux bouts des doigts & que l’on fait entrer entre les deux paillons g, h, ensorte que les trois trous par où doit passer la coupille soit dans une même direction, puis pressant des doigts ces trois paillons g, h, k, on ôte la pointe CD. On prend un des fils d’acier, dont on enfonce la pointe dans ces trous par l’ouverture m ; & du reste, on enfonce davantage cette pointe avec les brucelles, on la coupe & on la rive tout comme on la dit ci-dessus, art. 27. 28. 29.

Septieme opération, égayer la chaînette. 31. La lime à égayer A B, fig. 22, est une lame d’acier d’environ 4 à 5 pouces de longueur, 6 lignes de largeur, & une ligne & demie à 2 lignes d’épaisseur. Sa coupe transversale DN fait voir que les bords ou épaisseur de la lime sont arrondis, & ils le sont dans toute la longueur de la lime. Cette lime est improprement nommée ainsi, car elle n’est pas taillée. On attache cette lime à l’étau dans la situation où elle est ici représentée, & après avoir mis un peu d’huile d’olive le long de la chaînette, on la met à califourchon sur cette lime. On prend deux lames de fer EF, EF, nommées poignées, ayant chacune environ 3 ou 4 pouces de longueur, 6 à 9 lignes de largeur & une épaisseur telle que l’on puisse accrocher le crochet des bouts de la chaînette à l’un des deux petits trous qui sont aux extrémités des poignées. Ayant donc accroché ces poignées l’une à un bout de la chaîne & l’autre à l’autre, on prend une poignée de chaque main & les tirant alternativement, on fait passer & repasser la chaînette sur le bord de la lime environ une douzaine de fois de chaque côté de la chaînette où elle reçoit un assez grand frottement. Tandis que l’on fait courir ainsi la chaînette sur la lime, elle fait d’abord un angle d’environ 50 à 60 degrés dont le sommet est sur la lime, & peu-à-peu en rapprochant les mains l’une de l’autre, l’angle diminue jusqu’à environ 30 à 40 degrés, ce qui augmente le frottement. Par cette opération, on égaye en effet, ou plutôt on commence à égayer & à adoucir le mouvement de toutes les charnieres formées par les paillons & les coupilles.

Huitieme opération, limer la chaînette. 32. On attache à l’étau le bâton à limer ; c’est un cylindre de bois de buis A B, fig. 23, d’environ un pouce & demi de diametre, & d’une longueur excédant celle de la chaînette. A un bout B du bâton est planté un petit crochet, où l’on accroche un bout de la chaînette, laquelle on tient tendue sur le bois cylindrique en appuyant un doigt de la main gauche sur l’autre bout A de la chaînette ; puis de la droite, on passe une lime douce ordinaire CD sur toute sa longueur, promenant cette lime parallelement à elle-même de A en B & de B en A, jusqu’à ce que toutes les têtes des coupilles ne fassent qu’un seul & même plan bien uni avec les faces des paillons. On fait cette opération sur chacune des deux faces de la chaînette.

33. Après avoir ainsi limé les deux faces de la chaînette, on lime très-légerement ses deux côtés,

& pour cela on se sert d’une petite lime cylindrique A B, fig. 24, terminée à l’un de ses bouts par un bouton. Cette lime qui est taillée très-finement tout-autour, a environ une ligne & demie à deux lignes de diametre. On l’attache par le bout B à l’étau, & on fait courir la chaînette sur cette lime de la même maniere qu’on la fait courir ci-devant sur la lime à égayer, art. 31, mais très-légerement, & seulement une ou deux fois de chaque côté de la chaînette.

34. En limant ainsi la chaînette sur ses faces & sur ses côtés, on a formé des bavures qu’il faut ôter ; on a aussi un peu déformé les paillons qu’il faudra reformer. Les bavures sont sur le sommet des angles plans formés par les faces & les côtés de la chaînette. Or, pour les abattre, on remet la chaînette sur la lime à égayer dont on a parlé ci-dessus, art. 31, la posant dans une coche g, fig. 25, semblable à celle C, & pratiquée sur le bord de la lime ; & tandis qu’une personne fait courir la chaînette dans cette coche, une seconde personne tient une lime plate extrèmement douce AB qu’il appuie par un point b d’un de ses angles plans sur le bord de la lime à égayer, & par un point a d’une de ses faces sur un des angles plans de la chaînette très légerement. La coche dans laquelle court la chaînette, l’empêche de fuir l’impression de la lime AB. Cette impression doit être fort légere, & la chaînette ne doit courir qu’une ou deux fois pour chacun de ses quatre angles ; après avoir fait cette opération sur l’un de ces quatre angles, on sent bien de quelle façon il faut tourner la chaînette pour la faire sur les autres.

35. Pour réformer les paillons, on attache à l’étau la lime à reformer D F, fig. 26, qui est à-peu-près de la même longueur, largeur & épaisseur que la lime à égayer, art. 31 ; mais dont la différence est telle que la lime à égayer est par-tout de même épaisseur, ayant seulement ses bords arrondis, comme la représente sa coupe transversale ab, au lieu que la lime à reformer diminue d’épaisseur depuis le milieu de sa largeur jusque à ses bords qui sont presque tranchans, comme les représente sa coupe transversale df. De plus, la lime à reformer est taillée comme une lime très-douce, au lieu que l’autre ne l’est pas du tout. On fait courir la chaîne quatre, cinq ou six fois légerement de chaque côté sur le tranchant de cette lime. On le sert indifféremment de cette lime ou du tranchant A B, fig. 27, d’un burin ordinaire.

Neuvieme opération, tremper la chaînette. 36. Maintenant la chaînette est faite, il ne s’agit plus que de la tremper, la revenir & la polir. Pour la tremper, on la roule en spirale autour d’un chalumeau, comme on le voit fig. 28. On la fait glisser ainsi roulée jusqu’au petit bout A du chalumeau, pour l’en sortir & la mettre en cet état dans un creux pratiqué dans un gros charbon noir de sapin ; ensuite avec le chalumeau on souffle la flamme d’une chandelle dans ce creux qui fait rougir la chaînette, jusqu’au degré que les ouvriers appellent couleur de cerise ; alors on la jette dans un vase contenant une assez grande quantité d’huile d’olive, pour qu’elle surnage sur la chaînette : on retire ensuite cette chaînette toujours enveloppée sur elle-même, on la suspend en cet état dans la flamme de la chandelle qui alume l’huile dont elle est couverte, & c’est ce que-les ouvriers appellent revenir la chaînette ; l’ayant laissé brûler un moment, on la rejette dans l’huile. Cette opération est délicate, car selon que la chaînette sera trop ou trop peu revenue, elle sera trop molle ou trop dure pour l’usage.

Dixieme opération, polir la chaînette. 37. On sort la chaînette de l’huile ; & sans l’essuyer, on l’étend sur le bois à limer, art. 32. & fig. 23 ; & au lieu de passer une lime sur les deux faces, comme l’on a fait