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Il y a même actuellement dans l’intérieur de la cour des monnoies, un endroit destiné à faire lesdits essais.

En 1296, il y avoit quatre généraux, dont un étoit maître de la monnoie d’or ; on n’en trouve plus que trois en 1315, ils étoient quatre en 1346 ; l’année suivante ils furent réduits de même à quatre par Charles V. alors régent du royaume ; il établit en 1358 un gouverneur & souverain maître des monnoies du royaume, mais son administration dont on ne fut pas content ne dura qu’un an ; il y en eut cependant encore un semblable en 1364.

Pour ce qui est des généraux, ce même prince en mit un cinquieme en 1359 ; & dans la même année il en fixa le nombre à huit, dont six étoient pour la langue d’Oil en pays coutumier, & résidoient à Paris, les deux autres étoient pour rendre la justice en qualité de commissaire dans les provinces de la langue d’Oc ou pays de droit écrit.

Les trois corps d’officiers qui se réunissoient à la chambre des comptes, ayant été augmentés, cela donna lieu à leur séparation, ce qui arriva vers 1358, alors la chambre des monnoies fut placée au-dessus du bureau de la chambre des comptes, aussi bien que leur greffe & parquet, & ce tribunal tint en cet endroit ses séances jusqu’en 1686, que la cour des monnoies fut transférée au pavillon neuf du palais du côté de la place Dauphine, où elle commença à tenir ses séances au mois d’Octobre de ladite année ; & depuis ce tems, elle les a toujours tenues dans le même lieu.

Pour revenir aux généraux, l’augmentation qui avoit eu lieu fut confirmée par le roi Jean en 1361, & ils demeurerent dans le même nombre de huit, jusqu’à ce que Charles V. en 1378 les réduisit à six. Charles VI. en 1381. n’en nomma que cinq en titre, & un sixieme pour suppléer en l’absence d’un des cinq qui étoit échevin. Ils furent cependant encore depuis au nombre de six, & même en 1388 Charles VI. ordonna qu’il y en auroit huit ; savoir, six pour la langue d’Oil, & deux pour la langue d’Oc : il réduisit en 1400 ceux de la langue d’Oil à quatre, & confirma ce même nombre en 1413.

Lorsque les Anglois furent maîtres de Paris sous Charles VI. les généraux des monnoies transférerent leur chambre à Bourges, où elle demeura depuis le 27 Avril 1418, jusqu’en 1437 qu’elle fut rétablie à Paris après l’expulsion des Anglois ; il y eut néanmoins pendant ce tems une chambre des monnoies, tenue à Paris par deux généraux & un commissaire extraordinaire qui étoient du parti des Anglois.

Tous ces officiers étant réunis, lorsque la chambre fut rétablie à Paris, Charles VII. trouva qu’ils étoient en trop grand nombre ; c’est pourquoi en 1443 il les réduisit à sept, ce qui demeura sur ce pié jusqu’en 1455 qu’il les réduisit à quatre.

Louis XI. les maintint de même : mais Charles VIII. en 1463 en fixa le nombre à six, & en 1494 il en ajouta deux.

Ce nombre de huit ne paroissant pas suffisant à François premier, il créa en 1522 un président & deux conseillers de robe-longue, ce qui faisoit en tout onze personnes, un président & dix conseillers.

Les premiers généraux des monnoies jugeoient & connoissoient de la bonté des monnoies de nos rois, & même de celles des seigneurs auxquels nos rois avoient accordé la permission de faire battre monnoie ; c’étoit les généraux qui regloient le poids, l’aloi, & le prix des monnoies de ces seigneurs, & qui pour cet effet en faisoient la visite.

Du tems de Philippe-le-Bel les seigneurs hauts-justiciers connoissoient, dans leurs terres, des abus que-l’on faisoit des monnoies, soit en en fabriquant de fausses, ou en rognant les bonnes, ils pouvoient faire punir le coupable, Philippe-le-Bel accorda

même aux seigneurs hauts-justiciers la confiscation des monnoies décriées que leurs officiers auroient saisies, il ne leur en accorda ensuite que la moitié.

Mais le roi connoissoit seul par ses officiers des contestations pour le droit de battre monnoie, ils avoient aussi seuls la connoissance & la punition des coupables pour monnoies contrefaites à son coin, & les officiers que les seigneurs nommoient pour leurs monnoies devoient être agréés par le roi, & reçus par les généraux.

Philippe-le-Bel, Louis Hutin, Philippe-le-Long, Charles IV. Philippe de Valois, Charles VII. & en dernier lieu François premier, ayant ôté aux seigneurs le droit de battre monnoie, les généraux des monnoies, & autres officiers royaux qui leur étoient subordonnés, furent depuis ce tems les seuls qui eurent connoissance du fait des monnoies.

Charles V. étant régent du royaume, renouvella les défenses qui avoient été faites à tous juges de connoître des monnoies, excepté les généraux & leurs députés.

Ces députés étoient quelques-uns d’entr’eux qu’ils envoyoient dans les provinces pour empêcher les abus qui se commettoient dans les monnoies éloignées de Paris ; ils alloient deux de compagnie, & avoient outre leurs gages des taxations particulieres pour les frais de leurs voyages & chevauchées. Leur équipage étoit reglé à trois chevaux & trois valets ; ils devoient visiter deux fois l’an chaque monnoie.

La jurisdiction des généraux des monnoies s’étendoit, comme fait encore celle de la cour des monnoies, privativement à tous autres juges, sur le fait des monnoies & fabrication d’icelles, baux à fermes des monnoies, & réceptions de cautions, sur les maîtres officiers, ouvriers & monnoyeurs, soit pour le poids, aloi, & remede d’icelles, pour le cours & prix des monnoies, tant de France qu’étrangeres, comme aussi pour regler le prix du marc d’or & d’argent, faire observer les édits & reglemens sur le fait des monnoies par les maîtres & officiers d’icelles, Changeurs, Orfévres, Jouailliers, Affineurs, Orbateurs, Tireurs & Ecacheurs d’or & d’argent, Lapidaires, Merciers, Fondeurs, Alchimistes, officiers des mines, Graveurs, Doreurs, Horlogers, Fourbisseurs, & généralement sur toutes sortes de personnes travaillant ou trafiquant en matieres ou ouvrages d’or & d’argent dans toute l’étendue du royaume.

Les généraux avoient aussi par prévention à tous juges ordinaires la jurisdiction sur les faux monnoyeurs, rogneurs des monnoies, & altérateurs d’icelles.

Pour sceller leurs lettres & jugemens ils se servoient chacun de leur sceau particulier, dont l’apposition à queue pendante rendoit leurs expéditions exécutoires par tout le royaume ; on croit même qu’ils ont usé de ces sceaux jusqu’au tems où ils ont été érigés en cour souveraine.

Ils commettoient aussi aux offices particuliers des monnoies, qui se trouvoient vacans, ceux qu’ils en jugeoient capables jusqu’à ce qu’ils y eussent été pourvûs par nos rois.

Les généraux des monnoies jugeoient souverainement, même avant l’érection de leur cour en cour souveraine, excepté en matiere criminelle, où l’appel de leurs jugemens étoit attribué au parlement de Paris ; le roi leur donnoit pourtant quelquefois le droit de juger sans appel, même dans ce cas, ainsi qu’il paroît par différentes lettres-patentes.

La chambre des monnoies étoit en telle considération, que les généraux étoient appellés au conseil du roi lorsqu’il s’agissoit de faire quelques reglemens sur les monnoies.

Nos rois venoient même quelquefois prendre séance dans cette chambre, comme on voit par