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société, il se dit des choses & des personnes. Des choses, par exemple, d’un acte, d’une promesse, d’une proposition, lorsqu’on la restreint à des bornes dont on convient. L’homme libre ou non, est un être qu’on modifie. Le modificatif est la chose qui modifie ; le modifiable est la chose qu’on peut modifier. Un homme qui a de la justesse dans l’esprit, & qui sait combien il y a peu de propositions généralement vraies en Morale, les énonce toujours avec quelque modificatif qui les restreint à leur juste étendue, & qui les rend incontestables dans la conversation & dans les écrits. Il n’y a point de causes qui n’ayent son effet ; il n’y a point d’effet qui ne modifie la chose sur laquelle la cause agit. Il n’y a pas un atome dans la nature qui ne soit exposé à l’action d’une infinité de causes diverses ; il n’y a pas une de ces causes qui s’exercent de la même maniere en deux points différens de l’espace : il n’y a donc pas deux atomes rigoureusement semblables dans la nature. Moins un être est libre, plus on est sûr de le modifier, & plus la modification lui est nécessairement attachée. Les modifications qui nous ont été imprimées, nous changent sans ressource, & pour le moment, & pour toute la suite de la vie, parce qu’il ne se peut jamais faire que ce qui a été une fois tel n’ait pas été tel.

MODILLON, s. m. (Archit.) ornement de la corniche des ordres corinthiens. Ce mot vient de l’Italien modiglioni, petite mesure.

Les modillons sont de petites consoles ou tasseaux renversés en forme d’une S, sous le plafond de la corniche ; ils semblent soutenir le larmier ; ils ne servent toutefois que d’ornement. Voyez Console.

Les modillons s’appellent aussi quelquefois mutules ; cependant l’usage a distingué le mutule & le modillon ; le mutule est quarré, & est particulier à l’ordre dorique.

Les modillons doivent toujours être placés à plomb de l’axe de la colonne, & distribués de maniere à produire une régularité dans les parties du soffite.

Les entre-modillons, c’est-à-dire les distances entre les modillons, dependent des entre-colonnes qui demandent que les modillons soient d’une certaine longueur & largeur pour rendre les intervalles parfaitement quarrés ; figure qui fait toujours un meilleur effet qu’un parallelogramme.

MODIMPERATOR, s. m. (Hist. anc.) celui qui désignoit dans un festin les santés qu’il falloit boire, qui veilloit à ce qu’on n’enivrât pas un convive, & qui prévenoit les querelles. On tiroit cette dignité au sort. Le modimperator des Grecs s’appelloit symposiarque ; il était couronné.

MODIOLUM, s. m. (Hist. anc.) espece de bonnet à l’usage des femmes grecques. Il ressembloit à un petit sceau, ou à la mesure appellée modiolus.

MODIOLUS, s. m. (Hist. anc.) c’étoit la quatrieme partie du modius. C’étoit aussi un vaisseau à boire, & un sceau à puiser de l’eau. C’est la configuration qui avoit rassemblé ces objets sous une même dénomination.

MODIUS, s. m. (Hist. anc.) mesure antique qui servoit à mesurer les choses seches, & tous les grains chez les Romains ; elle contenoit trente-deux hemines ou seize setiers, ou un tiers de l’amphora ; ce qui revient à un picotin d’Angleterre. Il a huit litrons mesure de Paris.

MODON, (Géog.) ancienne & forte ville de Grece, dans la Morée, avec un port commode, & un évêché suffragant de Patras.

Pline la nomme Metona, & les Turcs l’appellent Mutum. Elle a essuyé bien des révolutions. Les Insubriens s’emparerent de Metona dans les anciens tems : les Illyriens ravagerent ensuite cette ville, & emmenerent ses habitans en esclavage. Trajan, touché de leurs malheurs, les rétablit, leur accorda

des privileges, & les laissa se choisir un gouvernement aristocratique. Elle conserva ses immunités par la condescendance de Constantin. Elle fut soumise à l’autorité de l’empereur grec en 1125. Elle tomba sous la puissance des Vénitiens en 1204, & sous celle de Bajazet en 1498. La république de Vénise la reprit sur les Turcs en 1686 ; mais elle a reconnu de nouveau la domination du grand-seigneur, à qui elle appartient encore aujourd’hui. Elle est située sur un promontoire avancé dans la mer de Sapienza, à 10 milles N. de Coron & 72 du cap de Matapan. Long. 49. 20. lat. 36. 58. (D. J.)

MODONEDO, Glandomirum, (Géogr.) ville d’Espagne dans la Galice, avec un évêché suffragant de Compostelle. Elle est dans une campagne fertile, & dans un air sain, à la source du Migno, à 20 lieues N. E. de Compostelle, & environ autant N. E. d’Oviédo. Long. 10. 27. lat. 43. 30.

MODONUS, (Géog. anc.) fleuve de l’Hibernie. Ptolomée, liv. II. chap. 2. en place l’embouchure entre le promontoire sacré, & la ville Ménapia. Il semble que cette riviere soit celle qui passe à Dublin, & qu’on nomme aujourd’hui la Liffe.

MODOTIA, (Géog.) ville des Insubres, selon Paul diacre, qui la met à 12 milles de Milan. Léander dit qu’on la nomme aujourd’hui Monza.

MODRINGOU, s. m. (Bot. exot.) arbre à feuilles de lentisque, qui croît au Malabar, & en plusieurs endroits des Indes orientales. Il a environ 30 piés de haut, & une brasse de circonférence. On le cultive dans les jardins & dans les vergers, à cause de son fruit, qui, selon Acosta, est gros comme une rave, long d’un pié, octangulaire, moëlleux, blanc en dedans, divisé en plusieurs loges, & d’un goût agréable. Il contient de petites graines semblables à celles de l’ers. Les habitans font des pilules alexipharmatiques du fruit & des racines de cet arbre. J. B. l’appelle en latin moringua, lentisci folio, fructu magno, anguloso, in quo semina ervi. Il a fort peu de branches, toutes noueuses ; son bois se rompt aisément ; ses fleurs sont d’un verd-brun. (D. J.)

MODULATION, s. f. en Musique, signifie proprement la constitution réguliere de l’harmonie & du chant dans un même mode ; mais ce mot se prend plus communément pour l’art de conduire le chant & l’harmonie successivement dans plusieurs modes, d’une maniere conforme aux regles, & agréable à l’oreille.

Si le mode tire son origine de l’harmonie, c’est d’elle aussi que naissent les lois de la modulation. Ces lois sont très-simples à concevoir, mais plus difficiles à bien observer : voici en quoi elles consistent. Pour bien moduler dans un même ton, il faut en parcourir tous les tons avec un beau chant, en rebattant plus souvent les cordes essentielles, & s’y appuyant davantage ; c’est-à-dire que l’accord sensible & l’accord de la tonique doivent s’y rencontrer fréquemment, mais toujours sous différentes faces & par différentes routes, pour prévenir la monotonie ; n’établir de cadences ou de repos que sur ces deux accords, tout au plus sur celui de la sous-dominante ; enfin, n’altérer jamais aucun des sons du mode ; car on ne peut, sans le quitter aussi-tôt, faire entendre un dièse ou un bémol qui ne lui appartienne pas, ou en retrancher quelqu’un qui lui appartienne.

Mais pour passer d’un ton à l’autre, il faut avoir égard au rapport des toniques, & à la quantité de cordes communes aux deux tons, comme je l’expliquerai bientôt.

Partons d’abord du mode majeur. Soit que l’on considere la quinte de la tonique comme ayant avec elle le plus simple de tous les rapports, après celui de l’octave, soit qu’on la considere comme un des