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MÉAGE, s. m. (Commerce.) On appelle droit de méage dans quelques villes de Bretagne, un droit qu’on paie à l’entrée desdites villes, & qui fait une partie de leurs deniers communs & patrimoniaux. Le méage qui se paie à Nantes est de deux sols par muid de sel, de blé, de vin, &c. passant par la ville, tant montant que baissant. Dictionn. de Comm. (G)

MEAN, s. m. (Salines.) cinquieme reservoir d’un marais salant. Il a environ vingt-deux piés de large, & il est coupé d’espace en espace par de petites chaussées.

MÉANDRE, le, (Géog. anc.) en latin Mæander, riviere d’Asie dans l’Ionie, fameuse chez les anciens par la quantité de tours & de détours qu’elle fait avant que d’arriver à son embouchure. Le nom moderne est le Madre, voyez Madre.

Pline, liv. V. ch. xxix. dit que le Méandre baigne quantité de villes, se charge de beaucoup de rivieres, arrose les campagnes d’un limon qui y porte la fertilité, & se jette dans la mer à dix stades de Milet. Il ajoute qu’il a tant de détours dans sa course, qu’il semble remonter vers le pays d’où il vient.

Mais nous n’avons rien de plus joli ni de plus poétique à ce sujet, que la peinture qu’en a fait Ovide dans ses métamorphoses, l. VIII. v. 163 & suivans.

Non secus ac liquidus, Phrygiis Mæandris in arvis
Ludit, & ambiguo lapsu refluisque, fluitque,
Decurrens que sibi venturas aspicit undas,
Et nunc ad fontes, nunc in mare versus apertum
Incertas exercet aquas.

Voici la traduction de Thomas Corneille.

Ainsi, comme incertain du chemin qu’il faut prendre,
Serpente avec ses eaux le sinueux Méandre.
On diroit, à le voir descendre & retourner,
Qu’au-devant de lui-même il cherche à les mener.
A peine a-t-il coulé vers la mer qui l’appelle,
Qu’amoureux de sa source, il remonte vers elle ;
Et rompt en tant de lieux son cours mal assuré,
Qu’il semble en tournoyant qu’il se soit égaré.

Plutarque, dans son livre des rivieres, parle des sinuosités du Méandre comme d’une chose unique ; mais il se trompe : M. de Tournefort nous assure au contraire qu’il s’en faut bien que les contours du Méandre approchent de ceux que la Seine fait au-dessous de Paris. (D. J.)

MÉANDRITE, s. f. (Hist. nat. Minéralog.) c’est le nom que quelques naturalistes donnent à une espece de madrépore fossile, plus connue sous le nom de cerveau de Neptune. C’est un corps d’une forme orbiculaire, dont la surface est remplie de sillons tortueux qui lui donnent le coup-d’œil d’un méandre ou labyrinthe, ou plûtôt celui des vagues ou des ondulations. Les Naturalistes en ont distingué plusieurs especes, suivant les différences qu’ils ont remarquées dans les sillons que l’on voit à leur surface. Comme on a toujours cherché à multiplier les noms dans l’Histoire naturelle, on en a donné un grand nombre au corps dont nous parlons, empruntés des ressemblances qu’on y trouvoit ou qu’on croyoit y trouver. C’est ainsi qu’on l’a nommé cerebrites, erotylus, placenta coralloïdea, coralloïde, unduletus, kymatites, &c.

MÉAO, (Géog.) petite île de la mer des Indes, entre les Moluques, au couchant de Ternate, avec un bon havre. Le clou de girofle n’y réussissoit pas moins qu’aux Molucques. Long. 144. 40. lat. 1. 12.

MÉATES, Mæatæ, (Géogr. anc.) ancien peuple de l’ile de la grande-Bretagne, dont Zonare & Dion Cassius font mention dans la vie de Severe. Ils étoient auprès du mur qui coupoit l’île en deux parties. Cambden pense que c’est le Northumberland.

MEAUX, (Géog.) ancienne ville de France, ca-

pitale de la Brie, avec un évêché suffragant de Paris.

Le chœur de la cathédrale passe pour un chef d’œuvre.

L’ancien nom latin de Meaux est Gatimum, que Ptolomée place sous le peuple Meldæ. Elle a eu le sort de quantité d’autres villes qui ont quitté leur vrai nom pour prendre celui de leur peuple. On a dit avec le tems, Meldarum ou Meldorum urbs, & enfin Meldi ou Meldæ.

Le territoire de Meaux étoit d’abord de la Belgique, ensuite de la Gaule lyonnoise, enfin il appartint à la province de Sens, qui a été la métropole de Meaux jusqu’à la fin de l’année 1622, que Paris fut érigé en métropole.

Cette ville avoit une grande considération sous la premiere race des rois de France, & devint la premiere où le Calvinisme prit faveur, & par conséquent une de celles qui a le plus souffert des tristes guerres sacrées.

Elle est dans un pays fertile en blé, en prairies & en bétail, sur la Marne, à 4 lieues N. O. de Coulomiers, 7 N. O. de Rozay, 8 S. E. de Senlis, 10 N. E. de Paris. Long. selon Cassini, 20d. 24′. 45″. lat. 48. 57′. 36″. (D. J.)

MÉCAXOCHITL, s. m. (Hist. des drogues.) petit poivre long d’Amérique, que les habitans du pays mettent dans leur chocolat. Le chevalier Hans-Sloane l’appelle en latin piper longum, humilius, fructu ex summitate caulis propendente. Il croît dans la nouvelle Espagne, & l’on n’en trouve que chez des droguistes curieux.

Hernandez décrit la plante qui le porte comme étant une plante sarmenteuse longue de deux empans, à feuilles larges, grasses, arrondies, odoriférantes & acrimonieuses au goût. Ses tiges sont rondes, lisses & entortillées ; il en part des pédicules unis qui rampent sur terre : à l’origine de chaque feuille sortent des racines fibreuses & filamenteuses. Le fruit ressemble beaucoup à du poivre-long. (D. J.)

MÉCELLAT, (Géog.) petite province d’Afrique sur la côte de la Méditerranée, à 12 lieues E. de Tripoli ; sa capitale est, selon les apparences, la Macomada d’Antonin, autrefois le siége d’un évêché, & maintenant un village. (D. J.)

MECHANEUS, (Mythol.) surnom de Jupiter ; il signifie celui qui bénit les entreprises des hommes, du verbe μηχανεύομαι, j’entreprens. Il y avoit à Argos au milieu de la ville, un cippe de bronze d’une grandeur médiocre, qui soutenoit la statue de Jupiter méchanéen. Ce fut devant cette statue que les Argiens, avant que d’aller au siége de Troie, s’engagerent tous par serment à périr plûtôt que d’abandonner leur entreprise. (D. J.)

MÉCHANCETÉ, s. f. & MÉCHANT, adj. (Morale.) nouveau terme fait pour notre nation en particulier, & qu’il faut définir. C’est une espece de médisance débitée avec agrément & dans le goût du bon ton. Il ne suffit pas de nuire, il faut sur-tout amuser, sans quoi le discours le plus méchant retombe plus sur son auteur que sur celui qui en est le sujet.

La méchanceté dans ce goût, dit l’auteur des mœurs, se trouve aujourd’hui l’ame de certaines sociétés de notre pays, & a cessé d’être odieuse sans perdre son nom : c’est même une mode ; cependant les éminentes qualités n’auroient pû jadis la faire pardonner, parce qu’elles ne peuvent jamais rendre autant à la société que la méchanceté lui fait perdre ; puisqu’elle en sappe les fondemens, & qu’elle est par-là, sinon l’assemblage, du-moins le résultat des vices. Aujourd’hui la méchanceté est réduite en art : elle tient communément lieu de mérite à ceux qui n’en ont point d’autre, & souvent leur donne de la considération