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Les Médecins chimistes modernes les plus éclairés, Ettmuller, Stalh, Cartheuser, &c. conviennent généralement que le fer, & toutes ses préparations indistinctement, n’ont qu’une seule & unique vertu ; savoir, la vertu qu’ils ont appellée tonique, fortifiante, roborante, excitante, astringente ; & que ce n’est que relativement à l’état particulier du sujet qui use de ces remedes qu’ils produisent tantôt l’effet appellé apéritif, & tantôt l’effet appellé spécialement astringent ou stiptyque. Ils avouent pourtant que certaines matieres martiales, telles que le vitriol, & sur-tout son eau mere ; le colcotar, &c. sont éminemment styptiques, & doivent être regardées comme occupant l’extrême degre d’énergie dans l’ordre de ces remedes. Tous les autres dont nous avons fait mention sont seulement astringens toniques.

L’extrème division du fer soit calciné, soit non calciné, paroît véritablement utile. Il est démontré par la couleur notre, que tous les remedes martiaux, & même ceux qu’on prend sous forme de dissolution, donnent aux excrémens, que la plus grande partie de ces remédes ne passe pas dans les secondes voies.

Il paroit donc convénable de favoriser, autant qu’on peut, ce passage par l’atténuation des parties du remede, & même par leur division absolue, c’est-à dire, leur dissolution dans un menstrue convenable.

Mais il n’est certainement pas exact de regarder les chaux martiales, le fer dépouillé de phlogistique comme insoluble par les acides des premieres voies, & moins encore d’imaginer que cette dissolution est nécessaire pour que le fer passe dans le sang, ou du moins pour qu’il exerce un effet médicamenteux. Il est démontré au contraire que les acides les plus foibles, tels que les acides végétaux & la crême de tartre, attaquent la rouille du fer ; & que Lemery qui l’emploie dans la préparation de son tartre calibé, ne manque pas pour cela son opération. Il est prouvé aussi par l’observation, que la rouille de fer & le safran de mars le plus calciné, dont le peuple use très-communément, agissent véritablement, soit qu’il y ait des acides dans les premieres voies, soit qu’il n’y en ait point. Nous croyons cependant que s’il n’est pas absolument nécessaire, il est cependant meilleur, plus convenable de se servir par préférence de l’æthiops martial, & de la teinture de mars tartarisée ; mais presque sans distinction de l’action de l’absence ou de la présence des acides dans les premieres voies.

Il est généralement reçu chez les vrais médecins, que le mars doit être donné à très-petite dose : car ce remede est vif, actif, vraiment irritant & échauffant ; il éleve le pouls ; il cause une espece de fievre, qui, quoiqu’elle doive être regardée comme un effet salutaire, comme un bien, doit cependant être contenue dans des justes bornes. La dose de safran, de la limaille, de l’æthiops martial, &c. ne doit pas être portée au-delà de cinq ou six grains. Celle de toutes les teintures peut être beaucoup plus considérable, parce que sans en excepter la teinture tartarisée, le fer y est contenu en une très-foible proportion. Elle peut être d’une ou de plusieurs dragmes. Au reste il n’y a en ceci aucune regle générale, la dose des teintures doit être déterminée sur leur degré de saturation & de concentration. La teinture alkaline de Stahl fait, par exemple, une exception à la regle générale que nous venons d’établir ; elle est très-martiale ; elle ne peut être prescrite que par gouttes.

Les fleurs martiales étant composées de fer, & d’une autre substance assez active & dominante ; savoir, le sel armoniac ; le médecin doit avoir principalement égard dans leur administration à cet autre principe. Voyez Sel armoniac. La dose ordinaire de ces fleurs est d’un demi-gros.

Le tartre martial ou calibé est le plus foible de tous les remedes officinaux tirés du fer. On pourroit le donner sans danger jusqu’à une dose considérable, si la creme de tartre elle-même n’exigeoit d’être donnée à une dose assez modérée. Voyez Tartre. On le donne communément à un gros.

Les eaux martiales sont encore infiniment plus foibles. Il est assez connu qu’on en prend plusieurs pintes sans danger. Voyez Minérales (eaux).

Les remedes martiaux solides se donnent communément avec d’autres remedes sous forme de bol, d’opiat, &c. ou se réduisent seuls sous la même forme avec des excipiens appropriés, comme conserve, marmelade des fruits, &c. ils sont trop dégoutans pour la plupart, lorsqu’on les prend en poudre dans un liquide.

Les sels martiaux tartarisés doivent être donnés dissous dans des liqueurs simples, & qui ne les altérent point, comme l’eau & le vin. Lorsqu’on les fait fondre dans des décoctions d’herbes ou de racines, ils s’y décomposent en très-grande partie ; ils troublent ces liqueurs qui en prennent le nom de bouillons noirs, & ils les rendent abominables au goût.

Le fer entre dans quelques préparations pharmacéutiques officinales ; par exemple dans l’opiat mésanterique, la poudre d’acier, les pillules & tablettes d’acier de la pharmacopée de Paris, l’emplâtre opodeltoch, & l’emplâtre stiptique, &c. On prépare encore pour l’usage extérieur un baume auquel le fer donne son nom, mais dont il est un ingrédient assez inutile. Ce baume est connu sous le nom de baume calibé, & plus communément sous celui de baume d’aiguilles ; il est fort peu usité, & paroît propre à fort peu de chose. Il en est fait mention au mot Nitre, en parlant de l’action de l’acide nitreux sur le huiles. (b)

MARSA, (Geog.) petite ville d’Afrique au royaume de Tunis, dans la seigneurie de la Goulette, & dans l’endroit même où étoit l’ancienne Carthage ; mais on n’y compte que quelques centaines de maisons, une mosquée, & un college fondé par Muley-Mahomet. Qui reconnoîtroit ici la rivale de Rome !

MARSAILLE, (Geog.) en italien Marsaglia ; plaine de Piémont, connue seulement par la bataille qu’y gagna M. de Catinat, le 4 Octobre 1693, contre Victor Amédée II. duc de Savoie. (D. J.)

MARSAIQUES, s. f. (Pêche.) terme de pêche, espece de filet dont on se sert pour pêcher le hareng. Il est ainsi nommé dans certaines contrées, parce que c’est dans le mois de Mars que ce poisson paroît ordinairement. Ces rets different des seines qui sont flottantes, en ce qu’ils sont sédentaires sur le fond de la mer ainsi que les solles. Voyez Solles dont les marsaiques sont une espece.

Les mailles de ce filet n’ont que 10 à 11 lignes en quarré.

On fait cette pêche ordinairement près de terre ; pour cela on jette une ancre à la mer pesant deux ou trois cent livres, on y frappe le bout du filet qui est fait de fil delié. La tête est soutenue de flottes de liége, & le bas est pierré ; sur cette premiere ancre on frappe une bouée afin de la pouvoir relever. A l’autre extrémité de cette tissure de rets, composée de douze à quinze pieces, est une autre ancre avec une semblable bouée. On établit le filet un bout à la mer & l’autre à la côte, afin de croiser la marée, de même que l’on dispose les seines flottantes. On laisse ainsi la marsaique au fond de l’eau pendant quelques jours, après quoi on la vient relever & retirer le hareng qui peut s’y être pris, les autres poissons ne pouvant s’y arrêter excepté les petites roblottes ou jeunes maquereaux. Cette pêche dure tout le tems que le poisson reste à la côte, qui est ordinairement les mois de Janvier, Février, Mars & Avril,