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l’axiome reçu chez le peuple que la grossesse purge, & que l’enfant attire les mauvaises humeurs. D’un autre côté, les femmes stériles sont toujours valétudinaires, leur vie n’est qu’un tems d’indispositions. Il y a lieu de penser que le dérangement qui empêche la fécondité, y contribue aussi en quelque chose ; il n’en est pas de même de l’accouchement, qui dans l’état le plus naturel, ne laisse pas d’exiger un travail pénible, d’affoiblir considérablement, & qui peut par la moindre cause, devenir laborieux & amener un danger pressant. Les femmes qui ont fait beaucoup d’enfans sont plûtôt vieilles, épuisées ; elles ne vivent pas longtems, & sont assez ordinairement sujettes à beaucoup d’incommodités ; ce qui arrive bien plus surement si elles ont commencé trop jeunes à faire des enfans. D’ailleurs les accouchemens sont encore dans ce cas-ci bien plus difficiles, les parties de la génération ne sont pas assez ouvertes, assez souples ; elles ne prêtent pas assez aux efforts que l’enfant fait pour sortir ; l’accouchement est bien plus laborieux, & les accidens qui le suivent plus graves. Cette seule raison suffit pour déconseiller le mariage aux personnes trop jeunes, à celles qui sont trop étroites. Il y a aussi des femmes encore moins propres au mariage, chez qui quelque vice de conformation rend l’accouchement extrèmement dangereux, ou même impossible. Telles sont les bossues, qui à cause de la mauvaise structure de la poitrine, ne peuvent pas faire les efforts suffisans pour chasser le fœtus ; il n’est pas rare de les voir mourir succombant à ces efforts ; il en est de même des phthisiques, qui ont la respiration sort gênée, & peu propre à souffrir & à aider le méchanisme de l’accouchement. Ces personnes risquent non-seulement leur santé & leur vie en contractant le mariage, mais encore se mettent dans le cas de donner le jour à des malheureuses créatures, à qui elles transmettent leurs mauvaises dispositions, & à qui elles préparent par-là une vie des plus desagréables. Il arrive quelquefois que des femmes dont la matrice est mal conformée, deviennent enceintes ; mais quand le terme de l’accouchement est venu, le fœtus ne trouve point d’issue, l’orifice de la matrice est de travers, tourné en arriere, de côté ; il ne répond point au conduit & à l’ouverture du vagin, ou bien il est entierement fermé par quelque cicatrice ou par quelque indisposition naturelle. Il faut pour lors en venir à l’opération césarienne, cruelle ressource, mais indispensable, & préférable à l’expédient surement mortel de laisser le fœtus dans la matrice, certâ desperatione potior est incerta salus : d’ailleurs on peut espérer de sauver l’enfant, & la vie de la mere qui éprouve cette opération, n’est pas entierement désespérée ; autrement on abandonne la mere & l’enfant à une mort inévitable. Lorsque ces vices de conformation sont connus, ils doivent être des motifs assez pressans pour empêcher les femmes de se marier ; ce n’est ni dans l’excrétion de la semence, ni dans la grossesse qu’est le danger ; mais il est assuré à l’accouchement. Ainsi le mariage peut être très salutaire à certains égards, & nuisible considéré dans d’autres ; on voit par-là de quelle importance il est d’en bien examiner & d’en comparer l’action, les effets & les suites dans les différens sujets pour en tirer des regles de conduite avantageuses. Il nous paroit inutile de chercher dans l’état de nourrice de nouvelles considérations, quoique l’allaitement de l’enfant paroisse exigé par la tendresse maternelle, conseillé par la nature, indiqué par la secrétion du lait, par les risques qu’on court à le dissiper, & la fievre qui s’excite pour le faire perdre : c’est une chose dont on peut se dispenser, & nous voyons tous les jours les personnes riches se soustraire à ce devoir, moins par la crainte d’altérer leur santé,

que dans la vue d’éviter les peines, les embarras, les veilles, que l’état de nourrice occasionne surement. On croit assez communément que les personnes délicates, qui ont la poitrine foible, ne peuvent pas nourrir sans s’incommoder ; c’est une regle assez reçue chez le peuple, que l’allaitement use, épuise, qu’il desseche la poitrine ; on peut assurer que de toutes les excrétions, c’est celle du lait qui affoiblit le moins. Cette humeur préparée sans dépense, presque point animalisée, peut être répandue même en très-grande quantité, sans que le corps s’en ressente aucunement ; & cela est sur-tout vrai pendant la premiere année qui se passe après l’accouchement. Lorsque le lait devient vieux, il est plus lymphatique, moins propre aux enfans nouveau-nés, son excrétion est plus forcée, & par conséquent plus sensible dans la machine. Je suis très-persuadé que des femmes qui continuent par l’apât du gain, trop longtems, le métier de nourrice, risquent beaucoup de s’incommoder, & nuisent considérablement aux enfans qu’elles allaitent ; mais ce qui prouve encore mieux que l’état de nourrice contenu dans les justes bornes, n’a pour l’ordinaire aucun inconvénient, aucune suite facheuse, & qu’il est plûtôt salutaire, c’est qu’on voit presque toujours les nourrices fraiches, bien portantes, ayant très-bon appétit, & jouissant de beaucoup d’embonpoint ; mais quand même il seroit vrai que l’allaitement pût altérer la santé, il ne pourroit pas être un motif suffisant pour empêcher un mariage, d’ailleurs salutaire, par la seule raison que les femmes n’y sont pas indispensablement asservies. (m)

Mariage, (Soierie.) il se dit de deux fils tordus ensemble qui faisoient soraire.

MARIAME, ou MARIAMME, selon Arrien, & Marriammia par Etienne le géographe, (Géogr. anc.) ville ancienne de Phénicie dans la Cassiotide, selon Ptolomée, l. V. c. xv. elle a été épiscopale. Pline en appelle les habitans Marriammitani.

MARIANA, (Géogr.) ville & colonie romaine de l’île de Corse, ainsi nommée de la colonie que Marius y mena, comme Seneque & Pline nous l’apprennent. On voit encore les ruines de cette ville, qui portent toujours son nom. Elles sont dans la partie septentrionale de l’île, à trois milles de sa côte orientale.

MARIANDYNIENS, Mariandyni, (Géogr. anc.) ancien peuple d’Asie dans la Bithynie ; ils habitoient aux environs d’Héraclée, entre la Bithynie & la Paphlagonie, & donnoient le nom au golfe où tombe le fleuve Sangar. Ce furent eux qui adopterent les premiers, & communiquerent le culte d’Adonis à toute l’Asie mineure.

MARIANES, (les îles) autrement les îles DAS VELAS, les îles des LARRONS, (Géogr.) îles de l’Océan oriental, à l’extrémité occidentale de la mer du Sud. Elles occupent un espace d’environ cent lieues, depuis Guan, qui est la plus grande & la plus méridionale de ces îles, jusqu’à Urac, qui est la plus proche du tropique. Magellan les découvrit en 1521, & Michel Lopez de Legaspi fit la cérémonie d’en prendre possession en 1565, au nom de Philippe II roi d’Espagne. Enfin en 1677 les Espagnols, à la sollicitation des Jésuites, subjuguerent réellement ces îles, dont le P. de Gobien a fait l’histoire à sa maniere. Elles étoient fort peuplées avant l’arrivée des Espagnols ; on dit que Quan, Rota, & Tinian, qui sont les trois principales îles Marianes, contenoient plus de cinquante mille habitans. Depuis ce tems-là Tinian est totalement dépeuplée, & on n’a laissé que deux ou trois cens Indiens à Rota pour cultiver le riz nécessaire à nourrir les habitans de Guan ; ensorte qu’il n’y a proprement que cette derniere île qu’on puisse dire habitée, & qui toute en-