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épousa d’abord de la main gauche une demoiselle françoise, nommée Eléonore de Miers, du pays d’Aunis, & ensuite il l’épousa de la main droite. De ce mariage naquit Sophie-Dorothée, mariée à son cousin Georges, électeur d’Hanovre, & roi d’Angleterre, qui se sépara d’elle. Voyez le Tableau de l’empire Germanique, pag. 138. (A)

Mariage à la gomine, on appelloit ainsi les prétendus mariages que quelques personnes faisoient autrefois, sans bénédiction nuptiale, par un simple acte, par lequel les parties déclaroient au curé qu’ils se prenoient pour mari & femme : ces sortes d’actes furent condamnés dans les assemblées générales du clergé de 1670 & 1675 ; & par un arrêt du parlement du 5 Septembre 1680, il fut défendu à tous notaires de recevoir de pareils actes, ce qui fut confirmé par une déclaration du 15 Juin 1669. Voyez les Mémoires du clergé, tom. V. p. 720. & suiv. & l’Abrégé desdits mémoires, p. 851. (A)

Mariage à mortgage, ce n’étoit pas un mariage contracté ad morganaticam, comme l’a cru M. Cujas sur la loi 26e in fine, ff. de verb. oblig. c’étoit un mariage en faveur duquel une terre étoit donnée par le pere ou la mere à leurs enfans, pour en percevoir les fruits jusqu’à ce qu’elle eût été rachetée. Pierre de Fontaines en son conseil chap. 15. n°. 14. dit que quand on a donné à la fille une terre en mariage, cela n’est pas contre la coûtume, pourvû que cette terre revienne au pere en cas de décès de la fille sans enfans ; mais que si l’on a donné à la fille des deniers en mariage, & une piece de terre à mortgage pour les deniers ; que si la fille meurt sans enfans, la terre doit demeurer pour la moitié du nombre (de la somme) au mari ou à son héritier, selon ce qui a été convenu par le contrat. Voyez Boutillier, dans sa Somme, liv. I. tit. lxxvüj. p. 458. Loisel dans ses Institutes, liv. III. tit. vij. art. ij. & iij. (A)

Mariage à la morganatique, ad morganaticam : on appelle ainsi en Allemagne les mariages dans lesquels le mari fait à sa femme un don de noces, qui dans le langage du pays s’appelle morgengabe, de morgen qui veut dire matin, & de gabe qui signifie don, quasi matutinale donum. Depuis par corruption on l’a appellé morgingab ou morgincap, morghanba ou morghangeba, morganegiba, & enfin morganaticum, & les mariages qui étoient accompagnes de ce don, mariage à la morganatique. Suivant Kilianus, & le Speculum saxonicum, ce don se faisoit par le mari le jour même des noces avant le banquet nuptial ; mais suivant un contrat de mariage qui est rapporté par Galland dans son Traité du franc-aleu, ce don nuptial se faisoit après la premiere nuit des noces, quasi ob præmium defloratæ virginis. Ce don consistoit dans le quart des biens présens & à venir du mari, du-moins tel étoit l’usage chez les Lombards. Voyez le Spicilege d’Achery, tome XII. page 153. & le Gloss. de Ducange au mot Morgage-niba. (A)

Mariage nul, on appelle ainsi, quoiqu’improprement, une conjonction à laquelle on a voulu donner la forme d’un mariage, mais qui n’a point été revêtue de toutes les conditions & formalités requises pour la validité d’un tel contrat, comme quand il y a quelque empêchement dirimant dont on n’a point eu de dispense, ou qu’il n’y a point eu de publication de bans, ou que le mariage n’a point été célébré en présence du propre curé, ou par un prêtre par lui commis. On dit que cette expression mariage nul est impropre ; en effet, ce qu’on entend par mariage nul n’est point un mariage, mais une conjonction illicite & un acte irrégulier. Voyez ce qui a été dit du mariage en général, & l’article suivant. (A)

Mariage nui quant aux effets civils seulement, on entend par-là celui qui, suivant les lois ecclésiastiques, est valable quoad fœdus & vinculum, mais qui, suivant les lois politiques, est nul quant au contrat civil. Il y a trois cas où les mariages sont ainsi valables quant au sacrement, & nuls quant aux effets civils ; savoir, 1°. lorsque le mariage a été tenu caché pendant toute la vie de l’un des conjoints ; 2°. les mariages faits in extremis, lorsque les conjoints ont vecu ensemble en mauvais commerce avant le mariage ; 3°. les mariages contractés par des personnes mortes civilement.

Mariages par paroles de présent : on entendoit par-là ceux où les parties contractantes, après s’être transportées à l’église & présentées au curé pour recevoir la bénédiction nuptiale, sur son refus, déclaroient l’un & l’autre, en présence des notaires qu’ils avoient amenés à cet effet, qu’ils se prenoient pour mari & femme, dont ils requéroient les notaires de leur donner acte.

Ces sortes de mariages s’étoient introduits d’après le Droit canon, où l’on fait mention de sponsalibus quæ de præsenti vel futuro fiunt, & où il est dit que les promesses de præsenti matrimomium imitantur, qu’étant faites après celles de futuro, tollunt ea, c’est-à-dire que celui qui s’est ainsi marié postérieurement par paroles de présent est préféré à l’autre, mais que les promesses de futuro étant faites après celles de præsenti ne leur dérogent & nuisent en rien. Ces promesses de futuro sont appellées fides pactionis, celles de præsenti, fides consensûs.

Le Droit civil n’a point connu ces promesses appellées sponsalia de præsenti, mais seulement celles qui se font de futuro. Voyez M. Cujas sur le titre de sponsal. & matrim. lib. IV. Decretal. tit. j.

Cependant ces sortes de mariages n’ont pas laissé de se pratiquer long-tems en France, il y a même d’anciens arrêts qui les ont jugé valables, notamment un arrêt du 4 Février 1576, rapporté par Theveneau dans son Commentaire sur les ordonnances.

L’ordonnance de Blois, art xliv. défendit à tous notaires, sous peine de punition corporelle, de passer ou recevoir aucunes promesses de mariage par paroles de présent.

Cependant, soit qu’on interpretât différemment cette ordonnance, ou que l’on eût peine à se soumettre à cette loi, on voyoit encore quelques mariages par paroles de présent.

Dans les assemblées générales du clergé tenues en 1670 & 1675, on délibéra sur les mariages entre catholiques & huguenots faits par un simple acte, au curé, par lequel, sans son consentement, les deux parties lui déclarent qu’ils se prennent pour mari & femme ; il fut résolu d’écrire une lettre à tous les prélats, pour les exhorter de faire une ordonnance synodale, portant excommunication contre tous ceux qui assisteroient à de pareils mariages, & que l’assemblée demanderoit un arrêt faisant défenses aux notaires de recevoir de tels actes.

Les évêques donnerent en conséquence des ordonnances synodales conformes à ces délibérations, & le 5 Septembre 1680. Il intervint un arrêt de reglement, qui défendit à tous notaires, à peine d’interdiction, de passer à l’avenir aucuns actes par lesquels les hommes & les femmes déclareroient qu’ils se prennent pour maris & femmes, sur les refus qui leur seront faits par les archevêques & évêques, leurs grands-vicaires, ou curés, de leur conférer le sacrement de mariage, à la charge par lesdits prélats, leurs grands-vicaires, & curés, de donner des actes par écrit qui contiendront les causes de leur refus lorsqu’ils en seront requis.

Il se présenta pourtant encore en 1687 une cause au parlement sur un mariage contracté par paroles de