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ce n’est dans quelques coutumes singulieres, qui portent expressément, que la femme gagne son douaire au coucher ; comme celle de Normandie, celle de Ponthieu, & quelques autres ; on n’exige pourtant pas la preuve de la consommation ; elle est présumée dans ce cas, dès que la femme a couché avec son mari.

C’est au mari à acquitter les charges du mariage ; & c’est pour lui aider à les soutenir, que les fruits de la dot lui sont donnés.

Les seconds, troisiemes & autres mariages sont sujets à des lois particulieres, dont nous parlerons au mot Secondes noces.

Sur le mariage en général, voyez le Liv. V. du code de Paris, le tit. 1. jusqu’au 27. inclusivement ; le liv. IV. des decrétales ; les novelles 117. 140 ; l’édit d’Henri IV. de Février 1556 ; l’ordonnance d’Orléans, art. 3 ; l’ordonnance de Blois, art. 40. & suiv. l’édit de Melun, art. 25 ; l’édit d’Henri IV. de 1606, art. 12 ; l’ordonnance de Louis XIII. de 1629, art. 39. & 169 ; la déclaration de 1639 ; l’édit du mois de Mars 1697 ; les Mémoires du clergé, tome V ; les lois ecclésiastiques, de Dhericourt ; la Bibliotheque canonique ; celle de Bouchel ; & celle de Jovet ; le dictionnaire de Brillon, au mot mariage ; & les auteurs qui ont traité du mariage, dont il donne une longue liste.

Il y a encore plusieurs observations à faire sur certains mariages, dont nous allons donner des notions dans les subdivisions suivantes. (A)

Mariage abusif, est celui dans la célébration duquel on a commis quelque contravention aux saints canons ou ordonnances du royaume, voyez Abus, & ce qui a été dit ici du mariage en général.

Mariage accompli signifie celui qui est célébré en face d’Eglise ; par le contrat de mariage les parties contractantes promettent se prendre en légitime mariage, & ajoutent ordinairement qu’il sera accompli incessamment. (A)

Mariage avenant en Normandie est la légitime des filles, non mariées du vivant de leurs pere & mere ; leur part se regle ordinairement au tiers de la succession, art. 256. de la cout. & en que’que nombre qu’elles soient, elles ne peuvent jamais demander plus que le tiers ; mais s’il y a plus de freres que de sœurs, en ce cas les sœurs n’auront pas le tiers, mais partageront également avec leurs freres puînés, art. 269. de la cout. parce que soit en bien noble ou en roture, soit par la coutume générale ou par la coutume de Caux, jamais la part d’une fille ne peut être plus forte, ni excéder la part d’un cadet puîné. Sur la maniere dont le mariage avenant doit être liquidé, voyez Routie sur la cout. de Normandie, liv. IV. ch. iv. sect. iv. (A)

Mariage caché ou secret, est celui dans lequel on a observé toutes les formalités requises, mais dont les conjoints cherchent à ôter la connoissance au public en gardant entr’eux un extérieur contraire à l’état du mariage, soit qu’il n’y ait pas de cohabitation publique, ou que demeurant ensemble, ils ne se fassent pas connoître pour mari & femme.

Avant la déclaration du 26 Novembre 1639, ces sortes de mariages étoient absolument nuls à tous égards, au lieu que suivant cette déclaration, ils sont réputés valables quoad soedus & sacramentum.

Mais quand on les tient cachés jusqu’à la mort de l’un des conjoints, ils ne produisent point d’effets civils ; de sorte que la veuve ne peut prétendre ni communauté, ni douaire, ni aucun des avantages portés par son contrat de mariage, les enfans ne succedent point à leurs pere & mere.

On leur laisse néanmoins les qualités stériles de

veuve & d’enfans légitimes, & on leur adjuge ordinairement une somme pour alimens ou une pension annuelle.

Les mariages cachés sont différens des mariages clandestins, en ce que ceux-ci sont faits sans formalités & ne produisent aucun effet civil ni autre. Voyez Soefve, tom. I. cent. iv. ch. xxvij. & tom. II. ch. lvij. & lxxj. Augeard, tom. I. ch. lj. & lx. & ci-après Mariage clandestin. (A)

Mariage célebré, c’est lorsque l’homme & la femme qui sont convenus de s’épouser, ont reçû de leur propre curé la bénédiction nuptiale Voyez Mariage contracté.

Mariage charnel se dit par opposition au mariage spirituel ; on l’appelle charnel, parce qu’il comprend l’union des corps aussi-bien que celle des esprits. Voyez ci-après Mariage spirituel.

Mariage per coemptionem, étoit une des trois formes de mariages usités chez les romains, avant qu’ils eussent embrassé la religion chrétienne, cette forme étoit la plus ancienne & la plus solemnelle, & étoit beaucoup plus honorable pour la femme, que le mariage qu’on appelloit per usum ou par usucapion.

On appelloit celui-ci mariage per coemptionem, parce que le mari achetant solemnellement sa femme, achetoit aussi conséquemment tous ses biens ; d’autres disent que les futurs époux s’achetoient mutuellement ; ce qui est de certain, c’est que pour parvenir à ce mariage ils se demandoient l’un & l’autre ; savoir le futur époux à la future, si elle vouloit être sa femme, & celle-ci demandoit au futur époux s’il vouloit être son mari ; & suivant cette forme, la femme passoit en la main de son mari, c’est-à-dire, en sa puissance ou en la puissance de celui auquel il étoit lui-même soumis. La femme ainsi mariée étoit appellée justa uxor, tota uxor, mater-familias ; les cérémonies de cette sorte de mariage sont très-bien détaillées par M. Terasson ; dans son Hist. de la jurisprudence rom. Voyez aussi Loiseau, du déguerpissem. liv. II. ch. iv. n. 5. & Gregorius Tolosanus, in syntagm. juris, lib. IX. cap. v. n. 24. usucapion.

Mariage par confarréation, per confarreationem, étoit aussi une forme de mariage usitée chez les Romains du tems du paganisme ; elle fut introduite par Romulus : les futurs époux se rendoient à un temple où l’on faisoit un sacrifice en présence de dix témoins ; le prêtre offroit entr’autres choses un pain de froment & en dispersoit des morceaux sur la victime ; c’étoit pour marquer que le pain symbole de tous les autres biens, seroit commun entre les deux époux & qu’ils seroient communs en biens, ce rit se nommoit confarréation. La femme par ce moyen étoit commune en biens avec son mari, lequel néanmoins avoit l’administration : lorsque le mari mouroit sans enfans, elle étoit son héritiere ; s’il y avoit des enfans, la mere partageoit avec eux : il paroît que dans la suite cette forme devint particuliere aux mariages des prêtres. Voyez Loiseau, du déguerpissem. liv. II. ch. iv. n. 5. Voyez Gregorius, in syntag. jur. liv. IX. ch. v. n. 7. & M. Terrasson, Hist. de la jurisp. rom. (A)

Mariage clandestin, est celui qui est célebré sans y observer toutes les formalités requises pour la publicité des mariages, comme lorsqu’il n’y a pas le concours des deux curés, ou qu’il n’y a pas eu de publication de bans, ou du moins une dispense pour ceux qui n’ont pas été publiés.

Ces sortes de mariages sont nuls, du moins quant aux effets civils, ainsi les enfans qui en proviennent sont incapables de toutes successions directes & collatérales.

Mais la clandestinité ne fait pas toujours seule annuller un mariage, on le confirme quelque fois quoad