plus, les rayons qui tombent fort obliquement sur une goutte d’eau, ne font point de couleurs sensibles dans leur seconde réfraction ; comme on le verra aisément par ce que nous dirons dans la suite. A l’égard de M. Descartes, qui a le premier expliqué l’arc-en-ciel extérieur par deux réflexions & deux réfractions, il n’a pas remarqué que les rayons extrèmes qui font le rouge, ont leur réfraction beaucoup moindre que selon la proportion de 3 à 4, & que ceux qui font le violet, l’ont beaucoup plus grande : de plus, il s’est contenté de dire qu’il venoit plus de lumiere à l’œil sous les angles de 41 & de 42d, que sous les autres angles, sans prouver que cette lumiere doit être colorée ; & ainsi il n’a pas suffisamment démontré d’où vient qu’il paroît des couleurs sous un angle d’environ 42d, & qu’il n’en paroît point sous ceux qui sont au-dessous de 40d, & au-dessus de 44 dans l’arc-en-ciel intérieur. Ce célebre auteur n’a donc pas suffisamment expliqué l’arc-en-ciel, quoiqu’il ait fort avancé cette explication. Newton l’a achevée par le moyen de sa doctrine des couleurs.
Théorie de l’arc-en-ciel. Pour concevoir l’origine de l’arc-en-ciel, examinons d’abord ce qui arrive lorsqu’un rayon de lumiere qui vient d’un corps éloigné, tel que le soleil, tombe sur une goutte d’eau sphérique, comme sont celles de la pluie. Soit donc une goutte d’eau ADKN, (Tab. Opt. fig. 45. n°. 2.) & les lignes EF, BA, &c. des rayons lumineux qui partent du centre du soleil, & que nous pouvons concevoir comme paralleles entre-eux à cause de l’éloignement immense de cet astre, le rayon BA étant le seul qui tombe perpendiculairement sur la surface de l’eau, & tous les autres étant obliques, il est aisé de concevoir que tous ceux-ci souffriront une réfraction & s’approcheront de la perpendiculaire ; c’est-à-dire que le rayon EF, par exemple, au lieu de continuer son chemin suivant FG, se rompra au point F, & s’approchera de la ligne HFI perpendiculaire à la goutte en F, pour prendre le chemin FK. Il en est de même de tous les autres rayons proches du rayon EF, lesquels se détourneront d’F vers K, où il y en aura vraissemblablement quelque,-uns qui s’échapperont dans l’air, tandis que les autres se refléchiront sur la ligne KN pour faire des angles d’incidence & de réflexion égaux entre-eux. Voyez Réflexion.
De plus, comme le rayon KN & ceux qui le suivent, tombent obliquement sur la surface de ce globule, ils ne peuvent repasser dans l’air sans se rompre de nouveau, & s’éloigner de la perpendiculaire MNL ; de sorte qu’ils ne peuvent aller directement vers Y, & sont obligés de se détourner vers P. Il faut encore observer ici que quelques-uns des rayons après qu’ils sont arrivés en N, ne passent point dans l’air, mais se réfléchissent de nouveau vers Q, où souffrant une réfraction comme tous les autres, ils ne vont point en droite ligne vers Z, mais vers R, en s’éloignant de la perpendiculaire TV : mais comme on ne doit avoir égard ici qu’aux rayons qui peuvent affecter l’œil que nous supposons placé un peu au-dessous de la goutte, au point P par exemple, nous laissons ceux qui se réfléchissent de N vers Q comme inutiles, à cause qu’ils ne parviennent jamais à l’œil du spectateur. Cependant il faut observer qu’il y a d’autres rayons, comme 2, 3, qui se rompant de 3 vers 4, de là se réfléchissant vers 5, & de 5 vers 6, puis se rompant suivant 6, 7, peuvent enfin arriver à l’œil qui est placé au-dessous de la goutte.
Ce que l’on a dit jusqu’ici est très-évident : mais pour déterminer précisément les degrés de réfraction de chaque rayon de lumiere, il faut recourir à un calcul par lequel il paroît que les rayons qui tombent sur le quart cercle AD, continuent leur chemin suivant les lignes que l’on voit tirées dans la goutte ADKN,
où il y a trois choses extrèmement importantes à observer. En premier lieu, les deux réfractions des rayons à leur entrée & à leur sortie sont telles que la plûpart des rayons qui étoient entrés paralleles sur la surface AF, sortent divergens, c’est-à-dire, s’écartent les uns des autres, & n’arrivent point jusqu’à l’œil ; en second lieu, du faisceau de rayons paralleles qui tombent sur la partie AD de la goutte, il y en a une petite partie qui ayant été rompus par la goutte, viennent se réunir au fond de la goutte dans le même point, & qui étant refléchis de ce point, sortent de la goutte paralleles entre-eux comme ils y étoient entrés. Comme ces rayons sont proches les uns des autres, ils peuvent agir avec force sur l’œil en cas qu’ils puissent y entrer, & c’est pour cela qu’on les a nommés rayons efficaces ; au lieu que les autres s’écartent trop pour produire un effet sensible, ou du moins pour produire des couleurs aussi vives que celles de l’arc-en-ciel. En troisieme lieu, le rayon NP a une ombre ou obscurité sous lui ; car puisqu’il ne sort aucun rayon de la surface N 4, c’est la même chose que si cette partie étoit couverte d’un corps opaque. On peut ajoûter à ce que l’on vient de dire, que le même rayon NP a de l’ombre au-dessus de l’œil, puisque les rayons qui sont dans cet endroit n’ont pas plus d’effet que s’ils n’existoient point du tout.
De là il s’ensuit que pour trouver les rayons efficaces, il faut trouver les rayons qui ont le même point de réflexion, c’est-à-dire, qu’il faut trouver quels sont les rayons paralleles & contigus, qui après la réfraction se rencontrent dans le même point de la circonférence de la goutte, & se réfléchissent de là vers l’œil.
Or supposons que NP soit le rayon efficace, & que EF soit le rayon incident qui correspond à NP, c’est-à-dire que F soit le point où il tombe un petit faisceau de rayons paralleles, qui après s’être rompus viennent se réunir en K pour se refléchir de là en N, & sortir suivant NP, & nous trouverons par le calcul que l’angle ONP, compris entre le rayon NP & la ligne ON tirée du centre du soleil, est de 41d 30′. On enseignera ci-après la méthode de le déterminer.
Mais comme outre les rayons qui viennent du centre du soleil à la goutte d’eau, il en part une infinité d’autres des différens points de sa surface, il nous reste à examiner plusieurs autres rayons efficaces, sur-tout ceux qui partent de la partie supérieure & de la partie inférieure de son disque.
Le diametre apparent du soleil étant d’environ 32′, il s’ensuit que si le rayon EF passe par le centre du soleil, un rayon efficace qui partira de la partie supérieure du soleil, tombera plus haut que le rayon EF de 16′, c’est-à-dire fera avec ce rayon EF un angle d’environ 16′. C’est ce que fait le rayon GH (fig. 46.) qui souffrant la même réfraction que EF, se détourne vers I & de là vers L, jusqu’à ce que sortant avec la même réfraction que NP, il parvienne en M pour former un angle de 41d 14′ avec la ligne ON.
De même le rayon QR qui part de la partie inférieure du soleil, tombe sur le point R 16′ plus bas, c’est-à-dire fait un angle de 16′ en dessous avec le rayon EF ; & souffrant une réfraction, il se détourne vers S, & de là vers T, où passant dans l’air il parvient jusqu’à V ; de sorte que la ligne TV & le rayon OT forment un angle de 41d 46′.
A l’égard des rayons qui viennent à l’œil après deux réflexions & deux réfractions, on doit regarder comme efficaces ceux qui, après ces deux réflexions & ces deux réfractions, sortent de la goutte paralleles entre-eux.
Supputant donc les réflexions des rayons qui vien-