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Le premier ordre Religieux de cette espece fut établi en 1232, par sept marchands Florentins, & c’est l’ordre des Servites ou serviteurs de la Vierge. Voyez Servites.

Le second fut fondé à bourges par Jeanne Reine de France, fille de Louis XI. & femme de Louis XII. qui la répudia de son consentement, & avec dispense du Pape Alexandre VI. La regle de ces Religieuses est établie sur 12 articles, qui regardent 12 vertus de la Ste Vierge, & approuvée par Jules II. & Leon X.

Le troisieme, qu’on appelle des Annonciades célestes, fut fondé vers l’an 1600, par une pieuse veuve de Genes, nommée Marie-Victoire Fornaro, qui mourut en 1617. Cet ordre a été approuvé par le saint Siége, & il y en a quelques maisons en France. Leur regle est beaucoup plus austere que celle des Annonciades fondées par la Reine Jeanne. (G)

Annonciade, s. f. (Hist. mod.) Société fondée à Rome dans l’Eglise de Notre-Dame de la Minerve, l’an 1460, par le Cardinal Jean de Turrecremata, pour marier de pauvres filles. Elle a été depuis érigée en Archi-Confraternité, & est devenue si riche par les grandes aumônes & legs qu’on y a faits, que tous les ans le 25 de Mars, fête de l’Annonciation de la sainte Vierge, elle donne des dots de 60 écus Romains chacune à plus de 400 filles, une robe de serge blanche, & un florin pour des pantoufles. Les Papes ont fait tant d’estime de cette œuvre de piété, qu’ils vont en cavalcade, accompagnés des Cardinaux & de la Noblesse de Rome, distribuer les cédules de ces dots à celles qui doivent les recevoir. Celles qui veulent être Religieuses ont le double des autres, & sont distinguées par une couronne de fleurs qu’elles portent sur la tête. L’Abbé Piazza, Ritratto di Roma moderna. (G)

Annonciade, s. f. (Hist. mod.) Ordre de Chevalerie, institué en 1362 par Amedée VI. Comte de Savoie, dit le Verd, auquel on dit qu’une Dame présenta un brasselet de ses cheveux tressés en lacs d’amour ; ce qui lui donna lieu d’instituer un ordre Militaire qu’il appella du lacs d’amour, & dont il fit la premiere cérémonie le jour de la fête de S. Maurice, Patron de Savoie, le 22 Septembre 1355. D’autres donnent une origine plus sainte à cet ordre, & disent qu’Amedée l’institua en mémoire des 15 Mysteres de Jesus-Christ & de la sainte Vierge, & aussi en mémoire des actions glorieuses de son ayeul Amedée V. Il créa quinze Chevaliers, & ordonna que les Comtes (aujourd’hui Ducs) de Savoie, seroient les chefs de cet ordre. Le collier étoit composé de roses d’or, émaillées de rouge & de blanc, jointes par des lacs d’amour, sur lesquels étoient entrelacées ces quatre lettres FERT, qui signifient selon quelques-uns : fortitudo ejus Rhodum tenuit, c’est-à-dire, sa valeur a maintenu Rhodes, pour marquer la belle action d’Amedée-le-Grand, qui fit lever aux Sarrasins le siége de Rhodes en 1310. Selon Guichenon, ces quatre lettres signifient : frappez, entrez, rompez tout. Au bout du collier pendoit une ovale d’or émaillée de rouge & de blanc, au-dedans de laquelle étoit l’image de S. Maurice. Amedée VIII. premier Duc de Savoie, qui fut élû Pape au Concile de Bâle, & prit le nom de Felix V. voulut en 1434 que cet ordre du lacs d’amour fût dorénavant appellé l’ordre de l’Annonciade, & fit mettre au bout du collier une Vierge, au lieu de S. Maurice, changeant aussi les lacs d’amour en cordelieres. A l’égard du manteau des Chevaliers, il éprouva aussi des changemens. Il étoit rouge cramoisi, frangé & bordé de lacs d’amour de fin or sous Charles-le-Bon, vers l’an 1330. Il fut ensuite bleu, doublé de taffetas blanc sous Emmanuel Philibert, environ l’an 1560. puis de couleur d’amarante, doublé d’une toile d’argent à fond bleu sous Charles Emmanuel en 1627. Le grand collier de l’ordre que

les Chevaliers portent aux fêtes solennelles, est du poids de 250 écus d’or ; & dans l’ovale clechée en lacs d’amour, sont les paroles de la salutation Angélique. Le petit collier est comme un hausse-col de deux doigts de large, du poids de cent écus d’or. Suivant l’institution, les chapitres où les assemblées de cet ordre devoient se tenir dans le Bugey : mais cette coûtume, aussi-bien que celle d’y enterrer les Chevaliers, a cessé par l’échange de la Bresse & du Bugey pour le Marquisat de Saluces. Alors le chapitre fut transféré dans l’église de S. Dominique de Montmélian ; & en 1627 le Duc Charles-Emmanuel transféra la chapelle de l’ordre dans l’hermitage de Camaldoli sur la montagne de Turin : depuis son institution en 1362 par Amedée VI. jusqu’au Roi de Sardaigne aujourd’hui régnant, cet ordre a eu dix-huit chefs ou Grands-Maîtres, & un très-grand nombre de Chevaliers d’une noblesse très-distinguée. (G)

ANNONCIATION, s. f. (Théol.) est la nouvelle que l’Ange Gabriel vint donner à la sainte Vierge, qu’elle concevroit le Fils de Dieu par l’opération du S. Esprit. Voyez Incarnation, Salutation,

Ce mot est composé de la préposition Latine ad, & du verbe, nuntiare, annoncer, déclarer une chose à quelqu’un. Les Grecs l’appellent εὐαγγελισμος, bonne nouvelle, & χαιρετίσμος, salutation.

Annonciation est aussi le nom d’une fête qu’on célebre dans l’Eglise Romaine, communément le 25 de Mars, en mémoire de l’Incarnation du Verbe. Aussi est-elle appellée la fête de l’Annonciation & de l’Incarnation du Verbe divin, en mémoire de ces deux mysteres qui n’en font proprement qu’un. Le peuple appelle cette fête Notre-Dame de Mars, à cause du mois où elle tombe.

Il paroît que cette fête est de très-ancienne institution dans l’Eglise Latine : parmi les sermons de saint Augustin, qui mourut en 430, nous en avons deux sur l’Annonciation ; savoir, le 17e & le 18e de sanctis. Le sacramentaire du pape Gelase premier, montre que cette fête étoit établie à Rome avant l’an 496 ; mais l’Eglise Greque a des monumens d’un tems encore plus reculé. Proclus qui mourut en 446, S. Jean Chrysostome en 407, & S. Grégoire Thaumaturge en 295, ont dans leurs ouvrages des discours sur le même mystere. Rivet, Perkins & quelques autres écrivains Protestans, ont à la vérité révoqué en doute l’authenticité de deux homélies de ce dernier Pere sur ce sujet : mais Vossius les admet, & prouve qu’elles sont véritablement de ce saint docteur.

Ajoûtons que quelques Auteurs pensent que cette fête dans son origine fut d’abord célébrée en mémoire de l’Incarnation du Verbe, & que l’usage d’y joindre le nom de la sainte Vierge est d’une date bien moins ancienne.

Il en est de même du 25 de Mars, où elle est fixée. Cet usage a varié ; car plusieurs Eglises d’orient célebrent cette fête dans un autre tems que celles d’occident ; & parmi celles-ci, quelques-unes l’ont célébrée dans le mois de Décembre, avant la fête de Noël. Le X. concile de Tolede tenu en 656, avoit ordonné de la solenniser le 18 de Décembre, à cause que le 25 de Mars tombe assez souvent dans la semaine-sainte, qui est plûtôt un tems de pénitence que de joie. On la remit cependant au 25 de Mars, où le Grecs la célebrent maintenant, comme les Latins, à la charge de la remettre après la quinzaine de Pâques, si elle tombe dans la semaine-sainte. On dit que l’église du Puy-en-Vélai a le privilége de la solenniser cette semaine, même le vendredi-saint. L’église de Milan & les églises d’Espagne la mettent au Dimanche devant Noël : mais ces dernieres la célebrent encore en Carême. Enfin les Syriens l’appellent Buscaragh, c’est-à-dire, information, perquisition, & la fixent dans leur calendrier au premier jour de Décembre ; & les Ar-