pour la moitié du profit. On peut juger par ces avances combien les rentrées devoient être considérables.
19°. Que si la Compagnie Angloise qui avoit traité de ces mines, s’en est mal trouvée, c’est qu’elle a été d’abord obligée de se constituer dans des frais immenses, en machines, en maison, en magasin, en fourneaux, en halles, &c. sans compter les gages trop forts qu’elle donnoit aux ouvriers.
20°. Qu’il conviendroit, pour prévenir tout abus, qu’il y eût des Directeurs, Inspecteurs & Contrôleurs des mines établis par le Roi.
21°. Que les terrains des particuliers que l’on occupe pour l’exploitation des mines, sont remplacés par d’autres, selon l’estimation du traitant ; mais non à sa charge, tant dans les autres mines du Royaume, que dans les mines étrangeres, & qu’il faudroit étendre ce privilége à celles d’Alsace.
22°. Qu’afin que les précautions qu’on prendra pour exploiter utilement ces mines, ne restent pas inutiles, il faudroit ménager les bois, & avoir une concession à cet effet de certains bois à perpétuité, ainsi qu’il est pratiqué dans toutes les autres mines de l’Europe ; parce que les baux à tems n’étant jamais d’un terme suffisant pour engager les Entrepreneurs aux dépenses nécessaires, il arrive souvent que les Entrepreneurs à tems limité, ou travaillent & disposent les mines à l’avantage des successeurs, ou que les Entrepreneurs à tems, voyant leurs baux prêts à expirer, font travailler à fortfait pour en tirer le plus de profit, & préparent ainsi une besogne ruineuse à ceux qui y entrent après eux.
23°. Que pour le bon ordre des mines en général, il conviendroit que le Roi établit de sa part un Officier, non-seulement pour lui rendre compte de la vigilance des Entrepreneurs & des progrès qu’ils pourroient faire ; mais qui pût encore y administrer la justice pour tout ce qui concerne les Officiers, Ouvriers, Mineurs ; & les appels en justice ordinaire étant toûjours dispendieux, que ceux des Jugemens de cet Officier ne se fissent que pardevant les Intendans de la province.
24°. Que tous les Officiers, Mineurs, Fondeurs, maîtres des boccards & lavoirs, ainsi que les voituriers ordinaires qui conduisent les bois & charbons, jouissent de toute franchise, soit de taille, soit de corvée.
25°. Qu’il plût au Roi d’accorder la permission de passer en toutes les provinces du Royaume les cuivres & les plombs, sans payer droits d’entrée & de sortie.
26°. Que le Conseil rendit un Arrêt par lequel il fût dit que, tous les Associés dans l’entreprise des mines seront tenus de fournir leur part ou quotité des fonds & avances nécessaires, dans le mois ; faute de quoi ils seront déchus & exclus de la société, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune sommation ni autorité de justice ; cette loi étant usitée dans toute l’Europe en fait de mines.
Voilà ce que des personnes éclairées pensoient en 1741, devoir contribuer à l’exploitation avantageuse, tant des mines d’Alsace, que de toute mine en général : nous publions aujourd’hui leurs observations, presque sûrs qu’il s’en trouvera quelques-unes dans le grand nombre, qui pourroient encore être utiles, quelque changement qu’il soit peut-être arrivé depuis 1741 dans ces mines. Que nous serions satisfaits de nous tromper dans cette conjecture, & que l’intervalle de dix ans eût suffi pour remettre les choses sur un si bon pié, qu’on n’eût plus rien à desirer dans un objet aussi important !
Elles observoient encore en 1741 dans les visites qu’elles ont faites de ces mines, que les Mineurs se conduisoient sans aucun secours de l’art ; que les Entrepreneurs n’avoient aucune connoissance de la Géométrie soûterraine ; qu’ils ignoroient l’anatomie des montagnes ; que les meilleurs fondans y étoient in-
soucioient fort peu du reste, de la bonne façon & de la bonne qualité, qui ne dépend souvent que d’une espece de fondant qui rendroit le métal plus net, plus fin, & meilleur ; que les ouvriers s’en tenoient à leurs fourneaux, sans étudier aucune forme nouvelle ; qu’ils n’examinoient pas davantage les matériaux dont ils devoient les charger ; qu’ils imaginoient qu’on ne peut faire mieux que ce qu’ils font ; qu’on est ennemi de leur intérêt, quand on leur propose d’autres manœuvres : que quand on leur faisoit remarquer que les scories étoient épaisses, & que le métal fondu étoit impur, ils vous répondoient, c’est la qualité de la mine, tandis qu’ils devoient dire, c’est la mauvaise qualité du fondant, & en essayer d’autres : que si on leur démontroit que leurs machines n’avoient pas le degré de perfection dont elles étoient susceptibles, & qu’il y auroit à reformer dans la construction de leurs fourneaux, ils croyoient avoir satisfait à vos objections, quand ils avoient dit, c’est la méthode du pays ; & que si leurs usines étoient mal construites, on ne les auroit pas laissées si long-tems imparfaites : qu’il est constant qu’on peut faire de l’excellent acier en Alsace ; mais que l’ignorance & l’entêtement sur les fondans, laisse la matiere en gueuse trop brute, le fer mal préparé, & l’acier médiocre. Qu’on croyoit à Kingdall que les armes blanches étoient de l’acier le plus épuré, & qu’il n’en étoit rien ; que la présomption des ouvriers, & la suffisance des maîtres, ne souffroient aucun conseil : qu’il faudroit des ordres ; & que ces ordres, pour embrasser le mal dans toute son étendue, devroient comprendre les tireries, fonderies, & autres usines : que la conduite des eaux étoit mal entendue ; les machines mauvaises, & les trempes médiocres ; qu’il n’y avoit nulle œconomie dans les bois & les charbons ; que les établissemens devenoient ainsi presqu’inutiles ; que chaque entrepreneur détruisoit ce qu’il pouvoit pendant son bail ; que tout se dégradoit, usines & forêts : qu’il suffisoit qu’on fût convenu de tant de charbon, pour le faire supporter à la mine ; que dure ou tendre, il n’importoit, la même dose alloit toûjours ; que le fondant étant trop lent à dissoudre, il faudroit quelquefois plus de charbon ; mais que ni le Maître ni l’ouvrier n’y pensoient pas : en un mot, que la matiere étoit mauvaise, qu’ils la croyoient bonne, & que cela leur suffisoit. Voilà des observations qui étoient très-vraies en 1741 ; & il faudroit avoir bien mauvaise opinion des hommes, pour croire que c’est encore pis aujourd’hui.
Mais les endroits dont nous avons fait mention ne sont pas les seuls d’où on tire de la mine en Alsace : Sainte-Marie-aux-Mines donne fer, plomb & argent ; Giromagny & Banlieu, de même ; Lach & Val-de-Willé, charbon, plomb ; d’Ambach, fer ordinaire, fer fin ou acier ; Ban-de-la-Roche, fer ordinaire ; Framont, fer ordinaire ; Molsheim, fer ordinaire, plâtre, marbre ; Sultz, huile de pétrole & autres bitumes. Ces mines ont leurs usines & hauts-fourneaux ; au Val de Saint-Damarin, pour l’acier ; au Val de Munster pour le laiton ; à Kingdall pour les armes blanches & les cuivres ; à Baao, pour le fer & l’acier.
L’Alsace a aussi ses carrieres renommées : il y a à Rousack, moilons, pierre de taille, chaux & pavé ; à Bolwil, chaux ; à Rozeim, pierre de taille, pavé, meules de moulin, bloc, & bonne chaux ; à Savernes, excellent pavé.
Les mines non exploitées sont, pour le fer, le Val de Munster & celui d’Orbay ; pour le fer & cuivre, le Val de Willé, Baao & Thaim ; pour le gros fer, le fin, & le plomb, d’Ambach ; pour l’argent, le plomb & le fer, Andlau ; pour le plomb, Oberenheim ; pour le charbon, Vische ; pour le fer & l’alun, le Ban-de-la-Roche & Framont. On trouve encore à Marlheim,