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tentrional de la terre) l’extrémité boréale de l’aiguille, & la partie inférieure de la barre, attire le sud de l’aiguille (fig. 55.) : mais si on renverse la barre, ensorte que sa partie supérieure soit celle même qui étoit en-bas dans le cas précédent, le nord de l’aiguille sera toûjours attiré constamment par l’extrémité supérieure de la barre, & le sud par l’extrémité inférieure ; d’où il est évident que la position verticale détermine les poles d’une barre de fer ; savoir, le bord supérieur est toûjours (dans notre hémisphere) un pole austral, & l’inférieur un pole boréal : & comme l’on peut mettre chaque extrémité de la barre en haut ou en bas, il est clair que les poles qu’elle acquiert par cette méthode sont variables. On donne à une barre de fer des poles fixes en cette sorte : On la fait rougir & on la laisse refroidir en la tenant dans le plan du méridien : alors l’extrémité qui regarde le nord, devient un pole boréal constant ; & celle qui se refroidit au sud, devient un pole austral aussi constant. Mais pour que cette expérience réussisse, il doit y avoir une certaine proportion entre la grosseur de la barre & sa longueur : par exemple, une barre de de pouce de diametre doit avoir au moins 30 pouces pour acquérir des poles fixes par cette méthode ; & une barre de 30 pouces de long, doit n’avoir que de pouce de diametre ; car si elle étoit plus épaisse, elle n’auroit que des poles variables.

5°. On a vû précédemment qu’une percussion forte & prompte dans un morceau de fer aimanté, est capable de détruire sa vertu magnétique ; une semblable percussion dans un morceau de fer qui n’a jamais touché à l’aimant, est capable de lui donner des poles. On a mis sur une grosse enclume, & dans le plan du méridien, une barre de fer doux, longue & mince, & on a frappé avec un marteau sur l’extrémité qui étoit tournée du côté du nord : aussi-tôt elle est devenue pole boréal ; on a frappé pareillement l’autre extremité, laquelle est devenue pole austral : il faut toûjours observer dans ces sortes d’expériences, que la longueur de la barre soit proportionnée à son épaisseur, sans quoi elles ne réussissent point. Cet effet, au reste, que l’on produit avec un marteau, arrive aussi en limant ou en sciant la barre par une de ses extrémités.

6°. Les outils d’acier qui servent à couper ou à percer le fer, s’aimantent par le travail, sur-tout en s’échauffant, ensorte qu’il y en a qui peuvent soûlever des petits clous de fer. Ces outils n’ont presque point de force au sortir de la trempe : mais lorsqu’après avoir été recuits, on les lime & on les use, ils acquierent alors beaucoup de vertu, qui diminue néanmoins quand ils se refroidissent. Les morceaux d’acier qui se terminent en pointe s’aimantent beaucoup plus fortement que ceux qui se terminent en une langue large & plate : ainsi un poinçon d’acier attire plus par sa pointe qu’un ciseau ou qu’un couteau ordinaire ; plus les poinçons sont longs, plus ils acquierent de vertu ; ensorte qu’un poinçon long d’un pouce & de 9 lignes de diametre attire beaucoup moins qu’un foret de 3 à 4 pouces & d’une ligne de diametre.

On a remarqué que la vertu attractive de tous les corps aimantés de cette maniere étoit beaucoup plus forte lorsqu’on en éprouvoit l’effet sur une enclume ou sur quelqu’autre grosse piece de fer ; ensorte que selon toutes les apparences, les petits clous devenus des aimans artificiels par le contact de l’enclume, presentoient aux poinçons leurs poles de différens noms, ce qui rendoit l’attraction plus forte que lorsqu’ils étoient sur tout autre corps, où ils n’avoient plus de vertu polaire.

7°. On aimante encore très-bien un morceau de fer doux & flexible, & toûjours d’une longueur pro-

portionnée à son épaisseur, en le rompant par l’une

ou l’autre de ses extrémités à force de le plier de côté & d’autre. C’est ainsi qu’on a aimanté un morceau de fil de fer très-flexible, long de deux piés & demi, & de la grosseur du petit doigt ; on l’a serré dans un étau à cinq pouces de son extrémité, & après l’avoir plié de côté & d’autre on l’a cassé, chacun de ses bouts a attiré par la cassure un petit clou de broquette : on a remis dans l’étau le bout le plus long, & on l’a serré à un demi-pouce de la cassure, & on l’a plié & replié plusieurs fois sans le rompre, & on a trouvé sa vertu attractive considérablement augmentée à l’endroit de la cassure : on l’a plié ainsi à huit différentes reprises jusqu’au milieu, & il a pû lever quatre broquettes : mais lorsqu’on a continué de le plier au-delà du milieu vers l’autre extrémité, sa vertu a diminué à l’endroit de la cassure, & il a attiré au contraire par le bout opposé, jusqu’à ce qu’ayant été plié plusieurs fois jusqu’à cette derniere extrémité, il a soûlevé quatre broquettes par celle-ci, tandis qu’il pouvoit à peine soûlever quelques particules de limaille par l’extrémité où il avoit été rompu.

Si on plie un morceau de fer dans son milieu, il n’acquerra presque pas de vertu magnétique : si on le plie à des distances égales du milieu, chacune de ses extrémités sera aimantée, mais plus foiblement que si on ne l’avoit plié que d’un côté.

8°. Enfin, M. Marcel, de la Société Royale de Londres, a trouvé un moyen de communiquer la vertu magnétique à des morceaux d’acier, qui est encore indépendant de la pierre d’aimant.

Ce moyen consiste à mettre ces pieces d’acier sur une enclume bien polie, & à les frotter suivant leur longueur, & toûjours dans le même sens, avec une grosse barre de fer verticale, dont l’extrémité inférieure est arrondie & bien polie ; en répétant ce frottement un grand nombre de fois sur toutes les faces de la piece d’acier qu’on veut aimanter, elle acquiert autant de vertu magnétique que si elle eût été touchée par le meilleur aimant ; c’est ainsi qu’il a aimanté des aiguilles de boussole, des lames d’acier destinées à faire des aimans artificiels, & des couteaux qui pouvoient porter une once trois quarts.

Dans les morceaux d’acier qu’on aimante de cette maniere, l’extrémité par où commence le frottement se dirige toûjours vers le nord, & celle par où le frottement finit se dirige vers le sud, quelle que soit la situation de l’acier sur l’enclume.

Cette expérience réussit, au reste, beaucoup mieux lorsque le morceau de fer ou d’acier qu’on veut aimanter par cette méthode est dans la direction du méridien magnétique, un peu inclinée vers le nord, & sur-tout entre deux grosses barres de fer assez longues pour contenir & contre-balancer l’effort des écoulemens magnétiques qu’on imprime au morceau d’acier.

Cet article nous a été donné tout entier par M. Lemonier, Medecin, des Académies Royales des Sciences de Paris & de Berlin, qui a fait avec beaucoup de succès une étude particuliere de l’aimant. Sur la cause des propriétés de l’aimant. V. Magnétisme.

Aimant. (Mat. med.) On ne fait aucun usage en Medecine de la pierre d’aimant pour l’intérieur du corps, quoique Galien dans le Livre des vertus des remedes simples, y reconnoisse les mêmes vertus que dans la pierre hématite ; & que dans le Livre de la Medecine simple, il vante sa vertu purgative, & surtout pour les humeurs aqueuses dans l’hydropisie ; & que Dioscoride l’ait aussi proposée jusqu’au poids de trois oboles, pour évacuer les humeurs épaisses des mélancholiques.

Quelques-uns croyent qu’il y a dans l’aimant une vertu destructive ; d’autres le nient : mais je croirois