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corps, représentèrent que la visite des livres de dehors prenant déjà une grande partie de leur temps, ils ne pourraient suffire à celle des imprimeries si, s’éloignant les unes des autres, elles se répandaient sur un plus grand espace.

De là les arrêts du Conseil et du Parlement, et les déclarations rapportées au Code de la librairie sous l’article 12 du règlement de 1723 qui défend aux imprimeurs et libraires de Paris de porter leur domicile hors du quartier de l’Université.

Cette petite enceinte fut strictement désignée a ceux qui tiendraient magasin et boutique ouverte et qui seraient en même temps imprimeurs et libraires. Quant à ceux qui ne seraient que libraires, on leur accorda le dedans du Palais, et l’on permit à quelques autres dont le commerce était restreint à des Heures et à des petits livres de prières, d’habiter les environs du Palais et de s’étendre jusque sur le quai de Gesvres.

Toute cette police des domiciles est confirmée depuis 1600 par une suite de sentences, d’arrêts et de déclarations ; elle a subsisté même après la réduction du nombre des imprimeurs de Paris à trente-six. Elle subsiste encore, sans qu’il reste aucun des motifs de son institution. Autant l’état ancien de la librairie et des lettres semblait exiger cet arrangement, autant leur état actuel en demande la réforme.

L’art typographique touche de si près à la religion, aux mœurs, au gouvernement et à tout l’ordre public, que pour conserver aux visites leur exécution prompte et facile, peut-être est-il bien de renfermer les imprimeries dans le plus petit espace possible. Que le règlement qui les retient dans le seul quartier de l’Université subsiste, à la bonne heure. Mais pour les boutiques et magasins de librairie, dont les visites sont moins fréquentes, il est rare que la publicité de la vente ne mène droitement au lieu de la malversation, et que l’application du remède, quand il en est besoin, soit ou retardée ou empêchée par aucun obstacle.

D’ailleurs la partie de la ville qui est hors de l’enceinte de l’Université est la plus étendue. Il y a des maisons religieuses, des communautés ecclésiastiques, des gens de loi, des littérateurs et des lecteurs en tout genre. Chaque homme opulent, chaque petit particulier qui n’est pas brute, a sa bibliothèque plus ou moins étendue. Cependant la vieille police qui concentrait les libraires dans un espace continuant de s’exercer, lorsque