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et qu’on paye aujourd’hui dans les ventes depuis quatre-vingt jusqu’à quatre-vingt-dix livres.

La Coutume de Bourgogne du président Bouhier, dont l’édition s’épuise et le prix augmente, parce qu’on sait bien que le libraire de Dijon ne se dispose pas à la réimprimer, se vendait originairement quarante-huit livres, et se porte maintenant dans les ventes depuis cinquante-quatre livres jusqu’à soixante livres.

La Jurisprudence de Ducase, volume in-quarto que le libraire de Toulouse a laissé manquer et qu’On n’achetait d’abord que 9 livres, se paye aux ventes depuis quinze jusqu’à seize livres.

On n’en remporte pas non plus la Coutume de Senlis, volume in-quarto, à moins de seize à dix-huit livres.

La librairie de Paris, qui, malgré les difficultés qu’elle a trouvées dans le maintien des lois qui la soutenaient, n’a pas laissé tomber les livres nécessaires, et dont les presses nous ont fourni plus de vingt volumes in-folio seulement de jurisprudence et depuis dix ans, préparait une édition nouvelle des Ordonnances de Néron, en quatre volumes in-folio. La collection des matériaux lui avait coûté plus de dix mille francs. Malgré ces avances, l’arrêt du Conseil prononcé en faveur des demoiselles La Fontaine l’a découragée, et elle a abandonné une entreprise dont elle aurait supporté tout le fardeau et dont le bénéfice s’en irait à d’autres, si l’on se croyait en droit de disposer d’un privilège et s’il n’y avait plus d’ouvrages dont la propriété fût assurée. Cependant cet auteur, qui ne forme actuellement que deux volumes in-folio, valait soixante francs avant le projet de la nouvelle édition, et il n’y a pas d’apparence que l’abandon prudent de ce projet le fasse baisser de prix.

Voilà, monsieur, le sort qu’auront tous les grands ouvrages à mesure qu’ils manqueront. Si je ne vous ai cité que de ceux qui sont à l’usage de la France, c’est que l’étranger, qui ne les réimprimera pas, ne nous

laissera pas manquer des autres en payant, et, quoique le mal soit général, c’est surtout dans les choses qui nous sont propres qu’il se fera sentir. Un projet solide est celui qui assure à la société et aux par-