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Oui, je connais vos Intérêts de la France mal entendus. C’est un livre qui a du succès[1]. M. Gaschon m’a fait dîner une fois avec l’auteur. Cet homme connaît assez bien le mal ; mais il n’entend rien aux remèdes. Il a des observations assez justes qui marquent un homme instruit, mais sans génie. Il a un monde de choses dont il ne sait rien faire ; et le génie sait faire un monde de rien.

Non, non, mon ami vaut mieux que moi ; personne ne peut lui être comparé, soit qu’il plaisante, soit qu’il raisonne, soit qu’il conseille, soit qu’il écrive, soit qu’il…

(La suite manque.)


XLII


Le 7 octobre 1760.


Pas un moment de repos, comme vous disiez à la fin d’une de vos lettres ; non, pas un moment ! J’arrive, je jette en passant mon sac de nuit à ma porte, et je vole sur le quai des Miramionnes ; j’y trouve une de vos lettres ; j’en achève une que j’ai commencée à la Chevrette. Je m’en retourne chez moi à minuit. Je trouve ma fille attaquée de la fièvre et d’un grand mal de gorge ; je n’ai pas osé m’informer de sa santé. Les questions les plus obligeantes amènent des réponses si dures de la part de la mère, que je ne lui parle jamais sans une extrême nécessité ; mais j’ai interrogé l’enfant, qui m’a très-bien répondu ; j’ai donné des ordres qui marquent l’attention et l’intérêt. Voilà ce que c’est que de se brûler le sang à crier et à travailler. Je devais partir demain pour le Grandval ; voilà un accident qui pourrait bien retarder mon voyage. Nous avons diné, M. Grimm et moi, sous un des chevaux des Tuileries. Longue promenade

  1. Les Intérêts de la France mal entendus (par Ange Goudar, de Montpellier). Le premier volume, qui traite de l’agriculture et de la population, parut au commencement de 1756 ; le second, qui traite des finances et du commerce, parut à la fin de la même année, et le troisième, qui traite de la marine et de l’industrie, ne fut public qu’en 1757. (T.)