Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XVIII.djvu/330

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Je n’ai pu obtenir de l’Académie un plus long séjour ici pour les jeunes élèves ; ils sont partis et j’en suis désolé. Ils étaient au moment qui décide le talent. Qui sait ce qu’ils deviendront en Italie ?

Je ne vous dis rien d’un point qui vous tient à cœur ; mais comptez incessamment sur une agréable surprise.


À Paris, ce 15 novembre 1769.


XXVII


J’ai reçu, mon ami, la lettre que vous avez confiée à M. Shwartz. Je vois que mes réponses à vos précédentes se sont encore égarées ; sans ces contre-temps qui me dépitent, vous sauriez que j’ai touché la dernière lettre de change de Mlle Collot, et que je me suis acquitté, avec exactitude, de toutes les petites commissions que vous m’avez données. Je n’entrerai ici dans aucun détail là-dessus. Je renvoie tout ce que j’ai à vous dire au retour de M. Shwartz. Je vous suis obligé des égards que vous avez à mes recommandations. Je tâche de ne pas les multiplier, non que je craigne d’être importun, mais on sait que je suis votre ami ; on sait que vous jouissez de quelque faveur auprès de l’impératrice ; on croit que je puis quelque chose auprès de vous. Jugez combien un refus aurait mauvaise grâce. Je m’exposerais à laisser croire qu’un sentiment dont nous nous honorons réciproquement se serait affaibli. On nous regarderait l’un et l’autre comme deux êtres personnels, ou l’on s’imaginerait que vous auriez encouru quelque disgrâce qui vous rendrait inutile. Et puis, il y a des occasions où je suis faible, et où le plaisir d’obliger me tyrannise ; et quelques autres où l’amitié, la reconnaissance, des liaisons qui me sont chères, disposent absolument de ma bonne volonté, et celle qui se présente dans ce moment est précisément une des dernières. Il s’agit de M. de Romilly[1] que j’aime, que j’estime, et que

  1. Sans doute Jean-Edme Romilly, pasteur, mort en 1779, auteur des articles Tolérance et Vertu dans l’Encyclopédie.