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dessus celui d’Eïonée et celui d’Admète, qu’on n’a point encore dépouillés. Au-dessus, d’autres cadavres. Proche du piédestal de pierre, au-dessous du lavacre, celui de Léocritus qu’Ulysse avait égorgé. Au-dessus d’Eïonée et d’Admète, celui de Corœbus, fils de Mygdon, et celui d’Érétus. Vers le cadavre de Corœbus, on voit Priam, Axion et Agénor. Proche d’eux, Sinon, compagnon d’Ulysse, et Anchialus traînant le cadavre de Laomédon. Onzième masse.

Vous avez beau dire, mon ami, cela effraye. Le peintre termine sa composition par montrer le vestibule et la porte de la maison d’Anténor. On voit encore à la porte la peau de léopard suspendue, signe dont il convint avec les Grecs pour que ses foyers fussent reconnus et épargnés. C’est là que le peintre a placé Théano avec ses enfants Glaucus et Eurymachus, l’un assis sur une cuirasse, l’autre sur une pierre. Proche d’eux Anténor et Crino sa fille. Crino tient son enfant entre ses bras, l’expression de la douleur n’est aussi forte dans aucune autre figure ; c’était par la trahison de son père que Troie avait été prise et saccagée. Des domestiques d’Anténor chargent sur un âne une cruche couverte d’osier, et d’autres bagages ; ils ont assis entre la cruche et le bagage un jeune enfant. Douzième masse.

Toutes ces scènes se passent à la fois entre le rivage de la mer et les ruines de Troie.

Si vous voulez vous en donner la peine, nous ne tarderons pas à voir ce tableau peu différent de la manière dont Polygnote l’exécuta[1]. Les lois du technique ne laissent guère aux figures d’un groupe et de différents groupes qu’un seul plan, une seule place à remplir. Essayez seulement et ne soyez plus surpris que Polygnote jouît de son temps de la plus grande réputation, et qu’il l’ait conservée jusqu’au temps de Pausanias.

  1. Voyez la Description de la Grèce de Pausanias, traduite par Clavier, livre X ; chap. xxv, xxvi et xxvii.