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vais rendre la parole à ceux à qui j’avais demandé et qui m’avaient promis des secours, et restituer à d’autres les articles qu’ils m’avaient déjà fournis, et que je ne veux pas livrer à votre despotisme. C’est assez de tracasseries auxquelles je serai bientôt exposé, sans encore les multiplier de propos délibéré. Allez demander à votre associé ce qu’il pense de votre position et de la mienne, et vous verrez ce qu’il vous en dira.


XXXI

À D’ALEMBERT[1].
[1765.]

Grand merci, mon ami. Je vous avais déjà lu et vous m’avez fait grand plaisir[2]. Ils n’en diront rien, mais ils n’en enrageront pas moins. Je voudrais bien qu’il y eût une gazette moliniste, comme il y en a une janséniste, afin que votre épigraphe se vérifiât et que vous eussiez le plaisir de voir l’une approuvant ce que l’autre blâmerait, et réciproquement votre impartialité bien constatée. La belle nuée d’ennemis secrets que vous allez vous faire ! Mais il faut en passer par là, ou renoncer à dire la vérité. Recevez mon compliment et mon remerciement. Faites-nous souvent de ces ouvrages-là, pour l’honneur de la philosophie, le vôtre et votre santé. Car il est impossible qu’on n’ait pas grand plaisir à écrire ce qu’on en a tant à lire. C’est bien dommage que cela n’ait pas paru plus tôt ; j’en aurais tiré bon parti. Les ennemis de la philosophie sont faits pour recevoir coup sur coup toutes ces sortes de désagréments : l’année est mauvaise pour eux. Voici un événement qui ne les réjouira pas plus que votre ouvrage. J’avais fait proposer par Grimm, à l’impératrice de Russie, d’acheter ma bibliothèque. Savez-vous ce qu’elle a

  1. Publiée dans les Œuvres posthumes de d’Alembert, Paris, Pougens, an VII (1799), 2 v. in-12, t. I, p. 424.
  2. Il s’agit de la brochure : Sur la destruction des Jésuites par un auteur désintéressé, 1765, in-12.