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vous en aviez seulement gros comme un grain de navette, il est de soi que vous transporteriez des montagnes et je ne crois pas d’honneur que vous en soyez encore là. Si, par hasard, je me trompais, laissez les montagnes où elles sont, mais transportez-vous vous-même ici, seulement pour une minute, que je vous voie, que je vous embrasse, que je vous charge de compliments et de respects pour les personnes qui vous possèdent, et puis vous irez les rejoindre par la même voiture, qui doit être fort douce ainsi que je le présume, quoique je ne l’aie jamais éprouvé. Je suis, avec l’estime la plus sincère et le dévouement le plus vrai, monsieur et cher abbé, etc.


XVI[1]


Paris, 9 octobre 1779.


Voici, monsieur et cher abbé, une belle occasion d’exercer votre bienfaisance. Si la distance des lieux était moins grande et ma santé moins mauvaise, je serais à présent à Canon, et je resterais aux genoux de M. Target jusqu’à ce que j’en eusse obtenu la faveur ou la justice que vous solliciterez à ma place avec autant de chaleur que j’y en mettrais et avec un tout autre avantage, parce que M. Target est votre ami.

Il s’agit de M. Vallet de Fayolle, fils de notre amie commune Mme de Blacy, et neveu de Mlle Volland, que j’envoyai à Cayenne en 63, je crois, et qui y est malheureux depuis seize ans.

Vous direz à M. Target que Vallet de Fayolle, à l’âge de vingt-deux ans, vint me trouver et me tint le propos qui suit : « Mon cher tuteur, je vous supplie d’intercéder auprès de mes parents pour que l’on me chasse incessamment de Paris ; je me sens entraîné à toutes sortes de vices, et je suis sur le point de me perdre. »

On lui proposa de passer à Cayenne avec la foule de ces

  1. Inédite. Communiquée par M. J. Desnoyers, de l’Institut. La suscription porte : À monsieur l’abbé Le Monnier, curé de Montmartin, près Carentan.