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LETTRES
À L’ABBÉ LE MONNIER



I


Monsieur et cher abbé, si j’avais un service à vous rendre, je ne manquerais pas d’aller chez vous ; mais j’en ai un à vous demander et il faut vous en ménager toute la bonne grâce ; donnez-vous donc la peine de venir chez moi. Demain, par exemple, vous me trouveriez dans la matinée ; songez que ce délai peut vous priver du plaisir d’obliger et de m’obliger. Si vous différiez à m’apparaître, je vous croirais indisposé ou retenu par quelque contre-temps fâcheux, et j’en aurais plus de souci que de mon affaire. Et ce Philosophe sans le savoir, où est-il ? et ce Térence ? et ces figures ? Venez me dire tout cela et que la chose à laquelle je m’intéresse n’est pas infaisable. Bonjour, je vous embrasse de tout mon cœur. Songez à votre poitrine et soyez sage. Voyez de jolies femmes et regardez-les tant qu’il vous plaira. Soupez avec des gens qui boivent du bon vin de Champagne, mais laissez-les faire. Votre serviteur et ami.


II


Je n’y veux rien faire à cette pièce, mon très-cher abbé[1]. Malheur à ceux qui n’en seront pas fous ! Dans l’état où elle est,

  1. Cette lettre a été certainement écrite au sortir de la répétition générale du Philosophe sans le savoir, qui eut lieu le 30 novembre 1763, devant M. de Sartine et d’autres magistrats. Voir à ce sujet la Correspondance littéraire de Grimm, du 15 décembre 1765.