Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIX.djvu/313

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ah ! voilà M. l’abbé Marin arrivé ! J’entendrai parler de vous quand il plaira à Dieu. Mais je commence à me résigner à tout.

Je savais tout ce que vous me dites de M. et de Mme Duclos ; celui-ci est bien heureux de ne pouvoir vieillir ; je lui envie ce secret, et le plaisir d’être auprès de vous. Voilà une ligne que vous ne passerez pas, parce qu’écrite elle ne signifie pas grand’chose, et que passée, on y mettrait de l’importance.

Agréez tout mon respect.


CXX


Paris, le 22 novembre 1768.
Mesdames et bonnes amies,

Votre départ n’est pas encore fixé. Est-ce que ces mauvais temps-ci ne hâteront pas votre retour ? Que faites-vous au château d’Isle, que vous ne fissiez mieux encore dans la rue Saint-Thomas-du-Louvre ? Il y a là un jardinet pour le premier rayon du soleil ; des amis que vous désirez et qui vous attendent ; une petite table verte sur laquelle on peut s’accouder ; des nouvelles vraies ou fausses qu’on tient de la première main ; un âtre autour duquel on peut se presser dans les grands froids ; quelques amusements que rien ne peut remplacer à la campagne, lorsque la pluie, les vents, les frimas, ne permettent plus de s’éloigner de la maison. Il y a des jours où nous ferions bien à trois ou quatre la monnaie de l’abbé Marin.

Où est le temps où mon impatience, mon dépit, ma colère vous auraient fait grand plaisir ? où vous auriez été enchantée que je n’eusse donné le temps ni à mes lettres ni à vos réponses d’arriver ? où deux jours passés sans avoir entendu parler de moi m’auraient été reprochés comme un silence de deux semaines ? Cela vous paraît injuste aujourd’hui : vous êtes d’une justesse admirable dans vos calculs ; on ne saurait avoir plus de raison que vous en avez acquis ; vous ne vous fâchez plus ; vous