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NOTICE PRÉLIMINAIRE.

sonné des sciences, arts et métiers, par une société de gens de lettres, les auteurs dudit dictionnaire en auraient fait paraître les deux premiers volumes, dont Sa Majesté aurait ordonné la suppression par son arrêt du 7 février 1752, pour les causes contenues audit arrêt ; mais en considération de l’utilité dont l’ouvrage pouvait être à quelques égards, Sa Majesté n’aurait pas jugé à propos de révoquer pour lors le privilége, et se serait contentée de donner des ordres plus sévères pour l’examen des volumes suivants ; nonobstant ces précautions, Sa Majesté aurait été informée que les auteurs dudit ouvrage, abusant de l’indulgence qu’on avait eue pour eux, ont donné cinq nouveaux volumes qui n’ont pas moins causé de scandale que les premiers, et qui ont même déjà excité le zèle du ministère public de son parlement. Sa Majesté aurait jugé qu’après ces abus réitérés, il n’était pas possible de laisser subsister ledit privilége ; que l’avantage qu’on peut retirer d’un ouvrage de ce genre, pour le progrès des sciences et des arts, ne peut jamais balancer le tort irréparable qui en résulte pour les mœurs et la religion ; que d’ailleurs quelques nouvelles mesures qu’on prît pour empêcher qu’il ne se glissât dans les derniers volumes des traits aussi répréhensibles que dans les premiers, il y aurait toujours un inconvénient inévitable à permettre de continuer l’ouvrage, puisque ce serait assurer le débit non-seulement des nouveaux volumes, mais aussi de ceux qui ont déjà paru ; que ladite Encyclopédie étant devenu un Dictionnaire complet et un traité général de toutes les sciences, serait bien plus recherché du public et bien plus souvent consultée, et que par là on répandrait encore davantage et on accréditerait en quelque sorte les pernicieuses maximes dont les volumes déjà distribués sont remplis. À quoi voulant pourvoir, le roi étant en son conseil, de l’avis de M. le chancelier, a révoqué et révoque les lettres de privilége obtenues le 21 janvier 1746, pour le livre intitulé : Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, arts et métiers, par une société de gens de lettres ; fait défenses à tous libraires et autres, de vendre, débiter ou autrement distribuer les volumes qui ont déjà paru, et d’en imprimer de nouveaux, à peine de punition exemplaire. Enjoint Sa Majesté au sieur Bertin, maître des requêtes ordinaire de son hôtel, lieutenant général de police, de tenir la main à l’exécution du présent arrêt, lequel sera imprimé, publié et affiché partout où il appartiendra. Fait au Conseil d’État du roi, Sa Majesté y étant, tenu à Versailles, le huitième mars mil sept cent cinquante-neuf.

Signé Phélypeaux.


ARRÊT DU CONSEIL D’ÉTAT DU ROI

QUI ORDONNE AUX LIBRAIRES Y DÉNOMMÉS DE RENDRE LA SOMME DE SOIXANTE-DOUZE LIVRES À CEUX QUI ONT SOUSCRIT POUR LE DICTIONNAIRE DES SCIENCES
du 21 juillet 1759
(Extrait des registres du Conseil d’État.)

Le roi étant informé que la suppression de l’ouvrage intitulé Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, arts et métiers, par une société de gens de lettres, ordonnée par l’arrêt du 8 mars 1759, aurait donné lieu à des plaintes de la part des souscripteurs qui ont payé d’avance aux libraires la plus grande partie du prix dudit ouvrage, pour lequel ils n’ont reçu que sept volumes, dont la valeur n’est pas proportionnée aux avances qu’ils ont faites, dans l’espérance d’avoir un