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Cependant cet Amour qui commande à ses cadets est peint à merveille ; sa draperie blanche est d’une touche légère. Placé à peu près au centre du tableau, il y domine bien. Et ces trois Amours qui arrivent d’en haut à tire-d’aile, sont d’une légèreté surprenante et d’une couleur douce.

Mais, encore une fois, ceux qui font l’exercice se ressemblent trop. Ils ont des fusils énormes pour eux. Leurs bras et leurs jambes sont raides et minces.

Ce n’est pas sans peine que l’artiste a rendu sa terrasse d’un vert aussi dur. L’ensemble est discordant ; c’est le mauvais effet de couleurs qui tranchent et ne participent point les unes des autres. Cela sent la palette. Ajoutez à cela, si vous voulez, que cet Amour placé sur le devant et qui se chausse est isolé et mal dessiné. Un peintre sent un vide dans sa composition, il imagine que, pour le remplir, il n’y a qu’à y placer un objet. — Bien imaginé !


RESTOUT.


3. orphée descendu aux enfers pour demander eurydice.


Quel sujet pour un poëte et pour un peintre ! qu’il exige de génie et d’enthousiasme ! Ah ! mon ami, qui est-ce qui trouvera la vraie figure d’Eurydice ? et celle d’Orphée promenant ses doigts sur sa lyre et suspendant par ses accords harmonieux le travail des Danaïdes, le rocher de Sisyphe, la roue d’Ixion, les eaux du Cocyte ; récréant les serpents sur la tête des Euménides ; attirant Cerbère qui vient lui lécher les pieds, répandant un rayon de sérénité sur le front sévère du monarque souterrain ; arrachant l’urne fatale des mains de l’inflexible Rhadamante et arrêtant les fuseaux des Parques, qui en ont oublié de filer ? Telle fut l’apparition du chantre de la Thrace aux enfers au moment où ses accents interrompirent le silence éternel et percèrent la nuit du Tartare. Mais le peintre en a choisi un autre. Pluton va prononcer, et l’époux redevenir possesseur de sa moitié.

La composition est grande, belle et une. On voit en haut Pluton assis sur son trône ; Proserpine est à côté de lui. Au-dessous, à droite, deux des juges infernaux. Plus bas, Orphée, et