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CHALLE[1].


L’idée et l’exécution du jeune Turenne endormi sur l’affût d’un canon me plaisent ; seulement il est mal que l’enfant soit aussi long que le canon.

C’est une fort belle chose que le Berger Phorbas qui détache de l’arbre Œdipe enfant, qui y était suspendu par les pieds. L’enfant, ou je me trompe fort, est sublime. Il crie ; il sent le bras qui le secourt ; il le saisit ; il le serre. Il y a une grande commisération sur le visage de Phorbas. Vous me direz qu’il est un peu campé ; mais comme il a de la peine à atteindre de la main la branche où la courroie est nouée, cette contrainte détermine son attitude. J’ai bien un autre petit chagrin ; c’est que son action est équivoque, et qu’on ne sait s’il suspend ou s’il détache. On s’élève également sur la pointe du pied pour suspendre et pour détacher ; on étend également un bras ; on soutient également le corps ; la courroie est également lâche.

Le Bacchus nouvellement né, et soustrait par Mercure à la jalousie de Junon, ne me déplaît pas. Le reste est commun.


CAFFIERI[2].


Le buste de Rameau par Caffieri[3] est frappant. On l’a fait froid, maigre et sec, comme il est ; et on a très-bien attrapé sa finesse affectée et son souris précieux.


PAJOU.


Entre plusieurs morceaux de Pajou, aucun qu’on puisse comparer au buste de Le Moyne, qu’il exposa au dernier Salon. Cependant un Ange[4] de beau caractère, et deux Portraits en terre cuite qui se font remarquer.

  1. Simon Challe, né à Paris en 1720, académicien, mort en 1763.
  2. Jean-Jacques Caffieri, né à Paris le 29 avril 1725, élève de Le Moyne, académicien en 1759, mort le 21 juin 1792.
  3. Ce buste était au foyer de l’Opéra avant l’incendie. Voyez le Salon de 1765.
  4. Ce modèle devait être exécuté pour servir de bénitier dans l’église Saint-Louis de Versailles.