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(Tandis qu’ils lisent.) Mais elle ne rougit point, elle ne pâlit point, ils ne se déconcertent pas.

Mademoiselle de Vertillac.

Rassurez-vous, maman : c’est une calomnie, c’est une insigne calomnie.

Madame de Vertillac.

Vous ne m’en imposez point ?

Mademoiselle de Vertillac.

Non, maman.

Madame de Vertillac.

Et toute cette trame serait l’ouvrage d’Hardouin ?

Monsieur de Crancey.

Je crois qu’il aurait pu mettre un peu plus de délicatesse dans les moyens de m’obliger ; mais il est mon ami, mais il voyait ma peine…

Madame de Vertillac.

Où est le scélérat ? Où est-il ? Quelque part qu’il soit, il faut que je le trouve. Il a beau fuir, je le suivrai partout ; rien ne me contiendra : en présence de toute la terre je parlerai ; j’exposerai son indignité ; toutes les portes lui seront fermées, je le déshonorerai… Et cela vous paraît plaisant à vous, monsieur de Crancey ?… Allez, ma fille, avec un peu de pudeur, vous rougiriez jusque dans le blanc des yeux.

Madame de Chepy, entre.

Quel bruit ! qu’est-ce qu’il y a ? Votre fille baisse la vue, M. de Crancey ne demanderait pas mieux que d’éclater, la fureur vous transporte. Que vous est-il donc arrivé depuis un moment ?

Madame de Vertillac.

Où est Hardouin ?

Madame de Chepy.

Que sais-je ? Chez moi peut-être : j’ai une femme de chambre qui n’est pas mal…

Monsieur de Crancey.

Et à qui il fait quelque chose de pis ou de mieux que de supposer un enfant.