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le commandeur.

Je te croyais avec l’ami.

cécile.

Qui, l’ami ?

le commandeur.

Eh ! Germeuil.

cécile.

Il vient de sortir.

le commandeur.

Que te disait-il ? que lui disais-tu ?

cécile.

Des choses déplaisantes, comme c’est sa coutume.

le commandeur.

Je ne vous conçois pas ; vous ne pouvez vous accorder un moment : cela me fâche. Il a de l’esprit, des talents, des connaissances, des mœurs dont je fais grand cas ; point de fortune, à la vérité, mais de la naissance. Je l’estime ; et je lui ai conseillé de penser à toi.

cécile.

Qu’appelez-vous penser à moi ?

le commandeur.

Cela s’entend ; tu n’as pas résolu de rester fille, apparemment ?

cécile.

Pardonnez-moi, monsieur, c’est mon projet.

le commandeur.

Cécile, veux-tu que je te parle à cœur ouvert ? Je suis entièrement détaché de ton frère. C’est une âme dure, un esprit intraitable ; et il vient encore tout à l’heure d’en user avec moi d’une manière indigne, et que je ne lui pardonnerai de ma vie… Il peut, à présent, courir tant qu’il voudra après la créature dont il s’est entêté ; je ne m’en soucie plus… On se lasse à la fin d’être bon… Toute ma tendresse s’est retirée sur toi, ma chère nièce… Si tu voulais un peu ton bonheur, celui de ton père et le mien…

cécile.

Vous devez le supposer.