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quatre-vingt-deux ans et presque aveugle. L’abbé Galiani désira que sa machine utile fût connue ; il écrivit donc le petit traité qui a pour titre : Della perfetta conservazione del grano ; et comme sa fantaisie a toujours été de garder l’anonyme, il n’avoua point cet ouvrage, qu’il laissa paraître sous le nom de l’inventeur Intieri : mais personne n’ignora qu’il en était l’auteur ; et dans les premiers temps de son séjour à Paris, il m’en fit présent, ainsi qu’à quelques autres hommes de lettres avec lesquels il était en liaison. Le frère de l’abbé Galiani avait dessiné les planches, au bas desquelles on lit même son nom dans l’édition italienne. M. Duhamel, de notre Académie des sciences, toujours poussé du beau zèle de nous enrichir des inventions étrangères, ne dédaigna pas de publier la machine d’Intieri, sans se souvenir de l’auteur. Le marquis Galiani, frère de l’abbé, lui en avait envoyé les dessins, que notre académicien fit regraver, mais sans nous prévenir que les additions et variations qu’il adoptait d’après Intieri, et qu’il donnait comme des moyens de perfection, étaient impraticables dans l’exécution. Vous conclurez de ce petit historique littéraire tout ce qui vous plaira. Quant à moi, l’abbé Galiani ayant publié, en 1754, son ouvrage sur la conservation des grains, et, en 1749, son Traité de la Monnaie, il me semble que c’est mal à propos qu’on a traité d’intrus, de nouveau venu dans l’étable économique, le premier-né du troupeau ; et qu’on aurait bien fait de le laisser tranquille dans le coin qu’il y occupait depuis vingt ans, époque antérieure à la formation du bercail.

Comme j’aime à m’entretenir de mes amis, je ne puis me refuser à l’occasion de vous instruire de quelques particularités de la vie studieuse de notre cher abbé ; je dis notre cher abbé, parce qu’il est cher à beaucoup d’autres qu’à moi.

Il naquit à Naples le 2 décembre 1728. Il se fit connaître en 1748 par une plaisanterie poétique et une oraison funèbre du grand maître des hautes œuvres à Naples, Dominique Jannaccone, d’illustre mémoire. Son Traité de la monnaie parut en 1749 et son ouvrage sur la Conservation des blés en 1754. En 1755, il écrivit une Dissertation sur l’histoire naturelle du Vésuve. Cette Dissertation, qui n’a point été imprimée, fut envoyée au pape Benoît XIV avec une collection des pierres produites par ce volcan. M. Bernard de Jussieu la connaît, et quel-