Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VI.djvu/265

Cette page a été validée par deux contributeurs.

maroufle, au moment le plus intéressant de mon histoire !… » et c’est à ce moment même que Jacques attendait son maître. « Te réveilleras-tu ?

— Je ne le crois pas.

— Et pourquoi ?

— C’est que si je me réveille, mon mal de gorge pourra bien se réveiller aussi, et que je pense qu’il vaut mieux que nous reposions tous deux… »

Et voilà Jacques qui laisse tomber sa tête en devant.

« Tu vas te rompre le cou.

— Sûrement, si cela est écrit là-haut. N’êtes-vous pas entre les bras de Mlle  Agathe ?

— Oui.

— Ne vous y trouvez-vous pas bien ?

— Fort bien.

— Restez-y.

— Que j’y reste, cela te plaît à dire.

— Du moins jusqu’à ce que je sache l’histoire de l’emplâtre de Desglands.

Le maître.

Tu te venges, traître.

Jacques.

Et quand cela serait, mon maître après avoir coupé l’histoire de mes amours par mille questions, par autant de fantaisies, sans le moindre murmure de ma part, ne pourrais-je pas vous supplier d’interrompre la vôtre, pour m’apprendre l’histoire de l’emplâtre de ce bon Desglands, à qui j’ai tant d’obligations, qui m’a tiré de chez le chirurgien au moment où, manquant d’argent, je ne savais plus que devenir, et chez qui j’ai fait connaissance avec Denise, Denise sans laquelle je ne vous aurais pas dit un mot de tout ce voyage ? Mon maître, mon cher maître, l’histoire de l’emplâtre de Desglands ; vous serez si court qu’il vous plaira, et cependant l’assoupissement qui me tient, et dont je ne suis pas maître, se dissipera et vous pourrez compter sur toute mon attention.

Le maître, dit en haussant les épaules.

Il y avait dans le voisinage de Desglands une veuve charmante, qui avait plusieurs qualités communes avec une célèbre