donc l’honnête et dur M. Hébert, avec ses deux jeunes et compatissants acolytes. Ils se rappelèrent apparemment l’état déplorable où j’avais autrefois comparu devant eux ; leurs yeux s’humectèrent ; et je remarquai sur leur visage l’attendrissement et la joie. M. Hébert s’assit, et me fit asseoir vis-à-vis de lui ; ses deux compagnons se tinrent debout derrière sa chaise ; leurs regards étaient attachés sur moi. M. Hébert me dit :
« Eh bien ! Suzanne, comment en use-t-on à présent avec vous ? »
Je lui répondis : « Monsieur, on m’oublie.
— Tant mieux.
— Et c’est aussi tout ce que je souhaite : mais j’aurais une grâce importante à vous demander ; c’est d’appeler ici ma mère supérieure.
— Et pourquoi ?
— C’est que, s’il arrive que l’on vous fasse quelque plainte d’elle, elle ne manquera de m’en accuser.
— J’entends ; mais dites-moi toujours ce que vous en savez.
— Monsieur, je vous supplie de la faire appeler, et qu’elle entende elle-même vos questions et mes réponses.
— Dites toujours.
— Monsieur, vous m’allez perdre.
— Non, ne craignez rien ; de ce jour vous n’êtes plus sous son autorité ; avant la fin de la semaine vous serez transférée à Sainte-Eutrope, près d’Arpajon. Vous avez un bon ami.
— Un bon ami, monsieur ! je ne m’en connais point.
— C’est votre avocat.
— M. Manouri ?
— Lui-même.
— Je ne croyais pas qu’il se souvînt encore de moi.
— Il a vu vos sœurs ; il a vu M. l’archevêque, le premier président, toutes les personnes connues par leur piété ; il vous a fait une dot dans la maison que je viens de vous nommer ; et vous n’avez plus qu’un moment à rester ici. Ainsi, si vous avez connaissance de quelque désordre, vous pouvez m’en instruire sans vous compromettre ; et je vous l’ordonne par la sainte obéissance.
— Je n’en connais point.