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Et, dans les murs de la cité,
Il reconnaît l’homme sauvage
S’agitant sous les fers dont il est garrotté.

ANTISTROPHE.

On a pu l’asservir, on ne l’a pas dompté.
Un trait de physionomie,
Un vestige de dignité
Dans le fond de son cœur, sur son front est resté ;
Et mille fois la tyrannie,
Inquiète où trouver[1] de la sécurité,
A pâli de l’éclair de son œil irrité.

ÉPODE.

C’est alors qu’un trône vacille ;
Qu’effrayé, tremblant, éperdu,
D’un peuple furieux le despote imbécile
Connaît la vanité du pacte prétendu.

STROPHE.

Répondez, souverains : qui l’a dicté, ce pacte ?
Qui l’a signé ? qui l’a souscrit ?
Dans quel bois, clans quel antre en a-t-on dressé l’acte ?
Par quelles mains fut-il écrit ?
L’a-t-on gravé sur la pierre ou l’écorce ?
Qui le maintient ? la justice ou la force ?
De droit, de fait, il est proscrit.

ANTISTROPHE.

J’en atteste les temps ; j’en appelle à tout âge ;
Jamais au public avantage
L’homme n’a franchement sacrifié ses droits ;
S’il osait de son cœur n’écouter que la voix,
Changeant tout à coup de langage,
Il nous dirait, comme l’hôte des bois :
« La nature n’a fait ni serviteur ni maître;
« Je ne veux ni donner ni recevoir de lois. »

  1. Variante : Et.