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SUR LES PROBABILITÉS.

DE L’INOCULATION


Les réflexions suivantes sur l’inoculation sont justes. Elles montrent beaucoup de subtilité d’esprit. On peut les regarder comme une bonne leçon pour ceux qui tentent de soumettre au calcul des sujets de cette nature, mais concluant, au moins indirectement, contre une pratique évidemment utile au genre humain ; tendant à augmenter par des doutes singuliers la pusillanimité des pères et des mères à qui l’inoculation ne répugne déjà que trop ; montrant sous un coup d’œil défavorable tout ce qu’on a écrit sur cette matière ; je crois qu’un homme plus attentif au bien général qu’à l’accroissement de sa réputation, aurait renfermé dans son portefeuille un morceau dont la lecture publique que l’auteur en fit à une rentrée de l’Académie des sciences[1], avait causé tant de plaisir aux imbéciles adversaires de l’inoculation, et un scandale si affligeant aux honnêtes gens.

M. d’Alembert dit : On n’inocule guère avant l’âge de quatre ans ;

Depuis cet âge jusqu’au terme ordinaire de la vie, la petite vérole naturelle détruit environ la septième partie du genre humain ;

Au contraire, l’inoculation prend à peine 1 victime sur 300 ;

Donc le risque de mourir de la petite vérole naturelle est, au risque de mourir de l’inoculée, comme 300 à 7[2], ou 40 à 50 fois plus grand.

Voilà, continue M. d’Alembert, le raisonnement des défenseurs de l’inoculation. Ce qui n’est pas exact. Ils prétendent,

  1. En 1760.
  2. D’Alembert dit « à 7 1/2, c’est-à-dire quarante fois plus grand. »