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« — Si cela est, il faut avouer que ce Génistan est un cruel homme. Je n’y vois plus qu’un remède…

« — Et quel est-il ?…

« — Ho ! non, je ne vous le dirai pas…

« — Et pourquoi ?…

« — C’est que si je vous le disais, vous le confieriez peut-être à votre tante…

« — Ne craignez rien ; vous ne sauriez croire combien je suis discrète…

« — Eh bien ! j’écrirais…

« — Si c’est là votre secret, n’en parlons plus ; je n’oserais jamais m’en servir…

« — N’en parlons plus, comme vous dites. Il me semble qu’il fait beau, et qu’un tour de promenade vous dissiperait…

« — Très volontiers ; nous rencontrerons peut-être le prince Génistan…

« — Le prince a renoncé à tout amusement. S’il se promène, c’est dans des lieux écartés et solitaires. Je ne sais où le conduira cette triste vie. S’il en mourait pourtant, c’est vous qui en seriez la cause…

« — Mais je ne veux pas qu’il meure, je vous l’ai déjà dit…

« — Écrivez-lui donc…

« — Je n’oserais ; et puis je ne sais que lui écrire…

« — Que ne m’en chargez-vous ? Vous me connaissez un peu, et vous ne me croyez pas, sans doute, aussi maladroite que je le parais. J’arrangerai les choses avec toute la décence imaginable. La lettre sera anonyme. Si la déclaration réussit, c’est vous qui l’aurez faite ; si elle échoue, ce sera moi…

« — Vous êtes bien bonne… »

la sultane.

Cette Serpilla est une dangereuse créature, et la simple Azéma n’en savait pas assez pour sentir ce piège. La lettre fut-elle écrite ?

la seconde femme.

Le prince dit que oui.

la sultane.

Fut-elle répondue ?

la seconde femme.

Le prince dit que non.