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les merveilles de la nature sans matière et sans intelligence ; des substances intelligentes subalternes, qui agissent sur la matière d’une manière inintelligible ; de la simultanéité de la création et de la formation des substances, qui, contenues les unes dans les autres, se développent dans le temps par la continuation d’un premier miracle ; et de l’extemporanéité de leur production qui n’est qu’un enchaînement de miracles réitérés à chaque instant de la durée ; il a pensé que tous ces systèmes peu philosophiques n’auraient point eu lieu, sans la crainte mal fondée d’attribuer des modifications très-connues à un être dont l’essence nous étant inconnue, peut être par cette raison même, et malgré notre préjugé, très-compatible avec ces modifications. Mais quel est cet être ? quelles sont ces modifications. Le dirai-je ? Sans doute, répond le docteur Baumann. L’être corporel est cet être ; ces modifications sont le désir, l’aversion, la mémoire et l’intelligence ; en un mot, toutes les qualités que nous reconnaissons dans les animaux, que les Anciens comprenaient sous le nom d’âme sensitive, et que le docteur Baumann admet, proportion gardée des formes et des masses, dans la particule la plus petite de matière, comme dans le plus gros animal. S’il y avait, dit-il, du péril à accorder aux molécules de la matière quelques degrés d’intelligence, ce péril serait aussi grand à les supposer dans un éléphant ou dans un singe, qu’à les reconnaître dans un grain de sable. Ici le philosophe de l’académie d’Erlangen emploie les derniers efforts pour écarter de lui tout soupçon d’athéisme ; et il est évident qu’il ne soutient son hypothèse, avec quelque chaleur, que parce qu’elle lui paraît satisfaire aux phénomènes les plus difficiles, sans que le matérialisme en soit une conséquence. Il faut lire son ouvrage pour apprendre à concilier les idées philosophiques les plus hardies, avec le plus profond respect pour la religion. Dieu a créé le monde, dit le docteur Baumann ; et c’est à nous à trouver, s’il est possible, les lois par lesquelles il a voulu qu’il se conservât, et les moyens qu’il a destinés à la reproduction des individus. Nous avons le champ libre de ce côté ; nous pouvons proposer nos idées ; et voici les principales idées du docteur.

L’élément séminal, exilait d’une partie semblable à celle qu’il doit former dans l’animal, sentant et pensant, aura quelque