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devient tributaire. On la spolie. L’honnête Caton en transporte à Rome les riches dépouilles comme des guenilles ; cela est tout à fait à la moderne, excepté le poison. On empoisonne, on ne s’empoisonne plus.


CCVII.

Jeter des haines entre ses ennemis, acharner deux puissances l’une contre l’autre, afin de les affaiblir et de les perdre toutes deux, c’est ce que Drusus fit dans la Germanie, et ce que Tacite[1] approuve. Et l’on blâmera ce pape, qui fomentait la querelle des Colonnes et des Ursins ; tantôt favorable, tantôt contraire à l’un et l’autre parti ; leur fournissant secrètement de l’argent et des armes jusqu’à ce que, réduits à la dernière nécessité par des succès et des défaites alternatives, il les étouffa sans résistance de leur part et sans fatigue de la sienne !


CCVIII.

Celui qui préfère une belle ligne dans l’histoire à l’invasion d’une province, pourrait bien n’avoir ni la province, ni la belle ligne.


CCIX.

La raison pour laquelle on crie contre les fermiers généraux en France, est précisément celle pour laquelle on les institue ailleurs.


CCX.

Disgracier ceux à qui l’on aurait des pensions à faire ; cela est toujours facile.


CCXI.

Tout voir par ses yeux, tenir de la clarté dans ses affaires, et rendre la colonne de la recette la plus longue, et celle de la dépense la plus petite possible ; il n’y a point de commerce ni d’empire qui ne prospèrent par ces moyens.

  1. Haud leve decus Drusus quæsivit, illiciens Germanos ad discordias. Tacit Annal, lib. II, cap. lxii. (N.)