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autant aujourd’hui. Il faut prier pour le succès des armes de Louis XIV, mais non pour le succès des armes de Turenne.


LXX.

Il me tombe sous les yeux un passage de Salluste, où il me semble que je lis le plan de l’éducation de la maison des cadets russes[1]. L’historien fait ainsi parler Marius[2] : Je n’ai point appris les lettres ; je me souciais peu d’une étude qui ne donnait aucune énergie à ceux qui s’y livraient ; j’ai appris des choses d’une tout autre importance pour la République. Frapper l’ennemi, susciter des secours, ne rien craindre que la mauvaise réputation, souffrir également le froid et le chaud, reposer sur la terre, supporter en même temps la disette et le travail ; c’est en faisant ces choses que nos ancêtres ont illustré la République. Là on ne destine à l’état civil, à la magistrature, aux sciences, que ceux qui y sont entraînés par leur penchant naturel ; les autres sont élevés comme Marius. On travaille actuellement à introduire dans cette maison un plan d’éducation morale, qui balance la vigueur de l’éducation physique. Plus l’homme est fort, plus il importe qu’il soit juste.

  1. Voir les Plans et statuts de différents établissements fondés par l’impératrice Catherine II pour l’éducation de la jeunesse du royaume, par le maréchal Betzki. Ci-dessus, note, page 451.
  2. Neque literas græcas didici : parum placebat eas discere ; quippe quæ ad virtutem doctoribus nihil profuerunt. At illa multo optuma reipublicæ doctus sum : hostem ferire, præsidia agitare ; nihil metuere, nisi turpem famam ; hiemem et æstatem juxta pati ; humi requiescere ; eodem tempore inopiam et laborem tolerare… hæc atque talia majores vestri faciundo seque remque publicam celebravere. Sallust. Jugurtha, cap. lxxxv, édit. Édimburg, 1755. (N.)