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CHAPITRE XV.


Page 56. — Les hommes finissent par croire les opinions qu’on les force de publier.

Rien de plus contraire que cette maxime à l’effet qu’on attribue à la persécution : Sanguis martyrum semen Christianorum. Combien de têtes enivrées par la vapeur du sang des martyrs !

Ibid. — Ce que ne peut le raisonnement, la violence l’exécute.

Je ne sache rien de plus contraire à l’expérience.

Ibid. — L’intolérance dans les monarques est toujours l’effet de leur amour pour le pouvoir. Ne pas penser comme eux, c’est mettre une borne à leur autorité.

Cela, c’est une idée creuse qui n’a jamais passé par la tête d’aucun.

Page 59. — Du moment où le fort a parlé, le faible se tait, s’abrutit et cesse de penser.

Ce n’est point là ce qui se passe. Au moment où le fort a ordonné le silence, la fureur de parler prend au faible.

Il faut bien du temps pour abrutir une nation éclairée. Il y a longtemps qu’on y travaille ici, et il me semble que la besogne n’est pas fort avancée.

Page 60. — Helvétius, admirateur outré du roi de Prusse, ne s’est pas douté qu’il peignait son administration trait pour trait.


CHAPITRE XXII.


Dans ce chapitre, l’auteur récapitule ses paradoxes avec une intrépidité qui m’étonne. Là, je me suis aperçu qu’on avait retenu toutes les conséquences vicieuses, aucune des preuves, rien de ce long enchaînement de ces vérités neuves, piquantes, fortement exprimées, de ces observations subtiles par lesquelles on avait été conduit. De ce défaut qui me chagrine, les esprits médiocres qui font toujours le grand nombre, et l’envie, dont l’auteur prétend que personne n’est parfaitement exempt, s’en serviront avec succès pour rabaisser le prix de l’ouvrage et en arrêter l’utilité ; mais le temps le remettra à sa place.

Il y a plus de véritable substance dans un de ces chapitres que dans les quinze volumes de Nicole ; il est plus lié, plus suivi