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PRÉCIS HISTORIQUE,

les citoyens-soldats. Ces sentimens furent tels que, non-seulement M. de Valence, mais plusieurs autres officiers du même régiment, obtinrent la même distinction, notamment M. de la Wœstine[1], et le comte Stanislas de Girardin, celui que nous avons vu, il y a peu d’années, briller à la tribune nationale, et qui, dans ses mémoires, a rendu compte lui-même, d’une manière fort piquante, de ces événemens.

« Nommé à dix-huit ans, dit-il, capitaine dans le régiment de Chartres-dragons, après avoir servi dans ceux Colonel-général et la Reine, j’étais au Mans le 6 juillet 1789, lors que M. de Valence fut reçu colonel du régiment de Chartres, alors en garnison dans cette ville, par M. de la Gondie, lieutenant-colonel : M. de la Wœstine était colonel en second.

« Cette cérémonie avait attiré toute la population de la capitale du Maine. Les capitaines lui donnèrent un dîner auquel nous invitâmes tous les officiers du régiment. Les pères de l’Oratoire prêtèrent leur réfectoire, dont les échos resonnèrent ce jour-là de propos un peu plus profanes que ceux tenus habituellement par ses dévots convives. Le dessert fut très-gai ; on porta force santés, comme cela se pratique en pareille circonstance, pour multiplier les occasions de boire. M. de Valence porta un toast : À nos femmes et à nos maîtresses ! et il cassa son verre en disant qu’après cette santé, il n’était plus possible d’en boire une autre. L’exemple du colonel fut suivi par tous les jeunes officiers, qui mirent une joie folle à briser tout ce qui était fragile. Le saint réfectoire ressemblait à un champ de bataille jonché de bouteilles, de verres, d’assiettes, et arrosé de flots de vin.

« Quelque temps après, il se préparait de grands événemens à Paris, lorsque le 18 juillet on vit arriver au Mans la diligence venant de la capitale. Les voyageurs se montraient

  1. Devenu gendre de M. de Valence et, par conséquent, petit-fils par alliance de M.me de Genlis : cette femme célèbre en parle beaucoup, dans ses mémoires.