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CCLXVI
précis historique.

de cent mille élémens. Chaque siècle pèse sur le siècle qui le suit, par sa masse inapperçue ; il entraîne d’un insensible mouvement les opinions, les institutions et les rapports sur lesquels on les avait fondées. Impitoyable novateur, le temps prépare en secret les métamorphoses ; l’habileté du législateur consiste à marcher du même pas que lui, et à atténuer sa domination en la partageant. Mais les empires et les usages s’écroulent, lorsque les résultats nécessaires de l’état social ne sont plus en harmonie avec les lois positives : c’est au moment de leur choc, que se développent les révolutions générales qui renversent des institutions vénérables ou abusives, dont le ciment se trouve absolument dissous. »

Ce raisonnement, auquel je ne crois pas qu’il soit facile de répondre, est, ce me semble, admis aujourd’hui comme principe, partout ce qu’il y a d’hommes réfléchis, instruits et non prévenus. Bossuet avait écrit : « Il n’est pas arrivé de grands changemens, qui n’ait eu sa cause dans les siècles précédens ; » et Burke, dans ses Lettres sur la révolution française dit : « Une révolution silencieuse dans le monde moral, devança la révolution politique et la prépara. » Tout le monde connaît ce mot de Leibnitz, ce mot qui, aujourd’hui même, semble être encore de circonstance : « Le temps présent est gros de l’avenir ! » Montgaillard, qui a bien analysé toutes les causes et tous les présages de cette grande catastrophe qui, plus ou moins promptement, doit bouleverser et régénérer le monde, dit avec raison : « En rejetant les témoignages de l’évêque de Beauvais, de Bossuet, de Leibnitz, de Burke, de Rousseau, de Voltaire, de Montesquieu, qui tous dans leurs écrits annonçaient le nuage révolutionnaire qui leur semblait prêt à éclater, attribuerait-on la révolution à telle ou telle rencontre, à un homme de plus ou de moins, à un accident imprévu ? Ou voudrait-on soutenir que, dans son ensemble et ses