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CLXXI
QUATRIÈME ÉPOQUE.

reste fut pillé, et ce qu’il y eut de plus fâcheux dans ce désordre, c’est que des manuscrits précieux, notamment huit grands volumes en parchemin, écrits en lettres d’or et ornés de figures enluminées, furent brûlés ; d’autres manuscrits rares et en grand nombre pillés. Le couvent des cordeliers fut réduit en cendres, et l’acharnement fut tel contre cette maison, que les incendiaires portaient de la paille et des étoupes allumées aux lieux où le feu ne pouvait pénétrer. Tout ce qui ne fut pas consumé par les flammes devint la proie de la populace ; et un avocat nommé Guillaume Thomas, en fit transporter des poutres et des solives dans son lieu de la Futaye, paroisse de S.-Pavin-des-Champs.

Les mémoires du temps rendent compte des causes de l’acharnement des réformés contre ces deux communautés : « Ils avaient avisé et regardé tous ensemblement, qu’en ôtant ces deux couvents de belistres ( ce sont les titres dont ils qualifiaient ces religieux), il se trouvait d’épargné la somme de 15 mille livres par an pour le pays du Maine ; qu’on n’avait affaire de Jacobins ni de Cordeliers ; qu’ils ne servaient à rien ; que le couvent des premiers était trop magnifique pour des moines, et conviendrait mieux pour loger un prince. »

L’église de Saint-Pierre de la Cour, enrichie des dons considérables d’Henri II roi d’Angleterre et comte du Maine, en pierreries et ornemens, ne fut point épargnée par eux ; et le 7 mai, jour de l’Ascension, ils procédèrent, avec une sorte de régularité, à la spoliation du trésor et des objets les plus précieux de l’église cathédrale, l’une des plus riches de France, dont le pillage fut évalué à 256,536 livres, à une époque où le marc d’argent valait 16 livres, ce qui ferait une somme plus que triple aujourd’hui. Les profanations suivirent l’enlèvement des objets précieux : elles étaient la conséquence de leur dissidence avec les catholiques, sur le culte des images, et sur une foule de choses qu’ils avaient cessé de vénérer et de considérer comme