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QUATRIÈME ÉPOQUE.

d’où, à défaut de bourreaux qui voulussent le défaire de cet obstiné concurrent, il le fit descendre lui-même sur le bord de la rivière, le fit entrer dans un bateau qu’il conduisit sur le milieu du fleuve, lui plongea son épée dans le cœur, et lui ayant attaché une pierre au cou, le précipita dans les flots.

La duchesse Constance, instruite de cette affreuse catastrophe, demande justice au roi de France du meurtre commis sur son vassal, par un autre de ses vassaux, sur les terres de son obéissance : toute la noblesse de Bretagne, dont Jean voulait s’emparer, se joint à la duchesse pour demander vengeance de cet attentat. Philippe-Auguste fait citer Jean à la cour des pairs : celui-ci ne comparaissant pas est déclaré, par arrêt de cette cour, atteint et convaincu de félonie et de parricide, condamné à perdre toutes les terres qu’il possédait en France, lesquelles seraient acquises et confisquées à la couronne ; et ceux qui le défendaient réputés criminels de lèze-majesté.

Les provinces françaises qui se trouvaient sous la domination anglaise, furent promptement rangées sous l’obéissance du roi de France. Guillaume Desroches, sénéchal du Maine et d’Anjou, qui dans ces nombreux différens avait montré de fréquentes tergiversations, dont la dernière avait causé la perte du prince Arthur, ouvrit les portes du Mans aux troupes du roi. Ainsi se trouva réuni à la couronne de France, le comté du Maine, après deux siècles d’indépendance féodale sous des comtes particuliers, dont 136 ans sous les princes anglo-normands.

Philippe-Auguste, loyal et généreux en cette occasion, donna à la reine Bérengère, veuve de Richard-Cœur-de-Lion, pour son douaire, la jouissance de la seigneurie du Maine, à titre de comtesse de cette province. Non-seulement elle y jouit, comme telle, des droits qu’on appelle utiles, mais aussi des droits honorifiques qui étaient attachés à cette dignité. Cette princesse résida pendant plus de trente ans dans