successivement en ut naturel et en ut dièse ; ces deux mouvements sont obtenus par l’action de 7 pédales, dont 3 sont gouvernées par le pied gauche et 4 par le pied droit. Selon le changement d’accord effectué d’un seul coup au moyen des pédales, les 46 ou 47 cordes de l’instrument produisent donc à volonté le son bémolisé, naturel ou diésé ; officiellement introduite en 1845 dans l’enseignement du Conservatoire de Paris et adoptée, pendant le xixe s., par tous les virtuoses, la H. à double mouvement d’Érard a conquis dans l’orchestre le rôle tour à tour poétique ou puissant que méritaient ses belles sonorités et qui était resté exceptionnel ou effacé chez les maîtres de l’époque classique, absent même, sauf peu d’exceptions, des œuvres de l’école allemande. Berlioz, avec son sens divinatoire des couleurs orchestrales, sut l’un des premiers en reconnaître toutes les ressources. Meyerbeer, l’employant à scander des accords verticaux, en tira de grands effets de puissance :
Soit par l’influence d’antiques traditions, interrompues cependant pendant une longue suite de siècles, soit plutôt en raison des effets musicaux que l’on peut en obtenir et en particulier de l’élan que les grands accords arpégés, auxquels elle a donné son nom, communiquent aux mélodies exprimant des sentiments exaltés, la H. tient une place pour ainsi dire obligée dans les scènes religieuses des opéras, les visions, les apothéoses. Gevaert en a rappelé les exemples les plus célèbres, la prière de Moïse, de Rossini (1822), l’air Roi du ciel, du Prophète, de Meyerbeer (1849), l’invocation Anges purs, de Faust, de Gounod (1859). Les mêmes moyens ont été introduits, avec moins d’opportunité, dans quelques œuvres de musique sacrée. Le culte israélite affectionne particulièrement la H., instrument symbolique du roi David, et la fait concourir au luxe des solennités nuptiales. Les musiciens contemporains lui confient maint détail essentiel de leurs œuvres descriptives. Wagner, dans la scène du feu, de la Walkyrie, fait exécuter par six H. le dessin persistant qui exprime l’animation des flammes, mais il divise ces 6 H. en deux groupes de trois qui alternent selon que les modulations du dessin l’exigent, pour ne pas compliquer le maniement des pédales.
C’est afin d’obvier à ce genre de
difficulté, et en particulier à celle que
présentent les morceaux composés
dans les tons mineurs, à degrés variables,
qu’a été créée, en 1897,
par G. Lyon, la H. chromatique,
qui permet à l’exécutant de passer
d’un ton dans un autre sans être
obligé de modifier l’accord de l’instrument
par le secours d’un mécanisme
spécial. Les cordes, dont le
nombre a été porté à 78 au lieu de 47,
sont disposées dans l’ordre des cordes
d’un piano, croisées comme
dans l’ancienne harpe double
du xviie s., et différenciées,
comme les touches
du clavier, par leurs couleurs,
le noir et le blanc.
Harpe chromatique.
Une vive opposition, analogue
à celle qui s’était élevée
contre la H. à double
mouvement de Séb. Érard,
fut suscitée contre la H.
chromatique par les facteurs
et par un certain
nombre de harpistes
attachés aux
procédés d’exécution
du système habituel.
Une classe
de H. chromatique
avait été ouverte
dès 1902 au Conservatoire
de
Bruxelles ; celle que
l’on inaugura en
1903 au Conservatoire
de Paris fut
des plus attaquées,
sans que l’on puisse
en conclure que la
H. chromatique ait
dit son dernier
mot.
|| La H. ditale,
inventée en 1798
par Edward Light,
facteur anglais,
était une réduction
de la H., ramenée