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DICTIONNAIRE DES APOCRYPHES.

33. Et ainsi ceux à qui elle avait été donnée ont été rejetés[1], parce qu’ils n’ont conservé la semence qui avait été dans Peurs cœurs.

34. Il arrive ordinairement que quand la terre a reçu la semence, qu’un vaisseau a été mis en mer, qu’on a rempli un vase de quelque nourriture, ces choses dans lesquelles tout cela a été mis venant à être détruites,

35. Ce qu’on y a semé ou inséré, ou ce qui y a été reçu, est détruit en même temps et ne subsiste plus alors parmi nous ; mais il n’en est pas de même à notre égard.

36. Car nous avons été rejetés après avoir violé la loi que nous avions reçue, et notre cœur, où elle avait été jetée comme une semence, a eu le même sort.

37. Mais la loi n’a point été anéantie, et elle a conservé toute sa force.

38. Comme je disais ces choses en moi-même, et que j’étais attentif, je vis à ma droite une femme qui pleurait et qui jetait de grands cris ; elle paraissait très abattue de douleur ; ses vêtements étaient déchirés et elle se couvrait la tête de poussière[2].

39. Alors, interrompant toutes mes réflexions, je me tournai vers elle, et je lui dis :

40. Pourquoi pleurez-vous, et que est le sujet de votre douleur ? Elle me répondit :

41. Mon Seigneur, souffrez, souffrez que je pleure et que je me livre de plus en plus à ma douleur, car je suis dans une grande amertume de cœur, et rien n’est égal à mon affliction.

42. L’ayant ensuite pressée instamment de me dire ce qui lui était arrivé, elle me répondit :

43. Votre servante avait vécu dans une honteuse stérilité, et je n’avais point enfanté, quoique j’eusse été avec mon mari l’espace de trente ans ;

44. Et pendant tout ce temps je n’ai cessé, ni le jour, ni la nuit, d’offrir mes prières au Très-Haut.

45. Enfin, au bout de trente ans, le Seigneur exauça votre servante, il vit mon affliction, il fut touché de mes peines, et me donna un fils qui fut toute ma joie[3], celle de mon mari et l’espérance de toute la ville, et nous en témoignâmes notre reconnaissance au Dieu tout-puissant.

46. Je l’élevai avec beaucoup de peine.

47. Et lorsqu’il fut grand et en âge de se marier, je célébrai le jour de ses noces[4].

CHAPITRE X.

Jérusalem représentée sous la figure d’une femme affligée et ensuite revêtue d’éclat,

1. Mon fils étant entré dans sa chambre à coucher, il tomba et mourut[5].

2. Nous éteignîmes aussitôt toutes les lumières ; tous mes concitoyens accoururent en foule pour me consoler, et je restai avec eux jusqu’à la nuit du jour suivant.

3. Mais lorsqu’ils se furent tous retirés, afin de me laisser en repos, je me levai au milieu de la nuit, et prenant la fuite, je vins dans les champs où vous me voyez encore.

4. Et maintenant, mon dessein est de ne pas entrer dans la ville, mais de rester ici sans prendre aucune nourriture, de pleurer sans cesse et de jeûner jusqu’à ce que je meure.

5. Alors, changeant de langage, je lui répondis avec colère et lui dis

6. O la plus insensée de toutes les femmes ! ignorez-vous donc quelle est notre affliction et quels sont les maux qui nous accablent ?

7. Sion, notre mère, est dans une affreuse tristesse, son humiliation est extrême et ses pleurs ne tarissent point.

8. Quoi ! pendant que nous sommes tous dans le deuil et dans l’affliction, à cause des maux que nous[6] souffrons, faut-il que la mort d’un enfant vous arrache tant de pleurs et de regrets ?

9. Interrogez la terre, et elle vous dira que c’est à elle qu’il appartient de pleurer la perte de tant de choses[7] qui sortent de son sein.

10. Car tous ceux qui sont nés ou qui naîtront dans la suite viennent de la terre ; cependant ils courent presque tous à leur perte, et le plus grand nombre d’entre eux est destiné à périr[8].

11. Celle donc qui perd un si grand nombre d’enfants, n’est-elle pas plus en droit de se livrer à la douleur, que vous, qui n’en avez perdu qu’un seul ? Mais, me direz-vous :

12. Le sujet qui m’afflige est bien différent ; car j'ai perdu le fruit de mes entrailles, ce fruit que j’ai porté dans la peine, que j’ai enfanté dans la douleur.

13. Mais pour la terre, la multitude qu'elle contient à présent, rentrera un jour dans son sein de la même manière quelle en a été tirée[9]. Voici ce que je vais vous répondre[10] ;
  1. Litt. : Sont péris.
  2. Litt. De cendres. Tout ceci est une parabole que l’auteur dans la suite applique à la Synagogue. Voy. le chap. x ci-après, verset 44 et suiv.
  3. Ce fils est le peuple Juif. Voy le vers . 45 du chap. suiv. L’auteur rapporte que cette intervalle de trente années est le temps pendant lequel les Juifs demeurèrent à Jérusalem, sans temple, jusqu’à celui que leur båtit Salomon . Voy. les notes sur ce lieu .
  4. La dédicace du temple de Salomon, et sous cette image la gloire du peuple Juif. Voy. vers, 46 et 47 du chap. suiv.
  5. C’est la captivité du peuple Juif en Babylone et la ruine de la ville de Jérusalem et de son temple. Voy. le vers. 48 du chap. suiv.
  6. L’auteur parle ici au nom de tout le genre humain par comparaison au peuple juif qui n'était pour ainsi dire qu'un seul homme.
  7. De tant d’hommes. Voy. le verset suivant.
  8. Autr. Abandonné à leur perte.
  9. Autr. : Comme l’expérience le justifie.
  10. Ces paroles sont d‘Esdras, qui répond à la Synagogue.