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particulièrement en honneur ; c’est du là que Kédalion est passé à Lemnos’ ; dans la version primitive de la fable d’Orion, il se peut que son rôle soit celui du nain subtil, sorte de lutin, dont le type reparait dans quelques légendes asiatiques- ; mais il reste toujours un frère des Silènes et des Satyres, compagnons occasionnels du dieu forgeron Une telle association, dont maints récits témoignent, avait été naturellemcnl préparée par l’intime rapprochement établi dans la légende entre Héphaistos et Dionysos. Ce rapprochement s’était fait, comme M. de Wilamowitz Fa justement pensé, dans le cycle des traditions religieuses de Samos et de Xaxos * ; les deux dieux passaient pour s’être disputé la posses- sion du sol, contestation où Héphaistos fut vaincu^ ; c’est à Naxos encore que l’on disait qu’Héphaistos avait fait son apprentissage de forgeron. La peinture de vases a souvent et joyeusement illustré ces relations, prin- cipalement dans l’aventure du retour dans l’Olympe ^ Un autre sujet fréquent des peintures est la rencontre des deux dieux amis’ ; ailleurs les décorateurs ont représenté leur séparation*. Les Ihiases de Dionysos et d’Héphaistos sympathisèrent si bien à la longue que la confusion vint à s’établir de l’un à l’autre ; sur un relief du Louvre, le dieu forgeron est représenté entouré de Satyres qui s’occupent à ciseler des armes (fig. 955)’. Ce relief est tardif, mais l’ancienneté de l’accord conclu entre Dionysos et le dieu forgeron nous est attestée par la date du vase François, où est peint déjà, dans tout son développement, le thème du retour dans l’Olympe ’". Viennent ensuite, dans l’ordre chronologique, un cra- tère attique de l’époque de Périclès (vers 440), où Héphaistos est représenté en grand appareil, conduit par un Silène et escorté par Dionysos" ; puis des vases un peu plus récents, comme la péliké attique de Gela à Munich ’-, oùlesdeux divinités figurenlà pied, un Silène

1 Malien coiiteslc avec vraisemblance qu’il faille recounaiire Kédalion comme un ilicu du feu, d’origine lemniennc : cf. Frcdricli, Atken. Mitt, XXXI, 1906, 75 ; ibid. pour une ciégcse du mythe d’Orion, qui parail tendancieuse ; d’après une ■version d’Apollod. 1, i5, c’est à Chios qu’Orion aurait pris un guide pour son voyage vers l’Occident ; autre contamination du même récit, d’après Servius, arf Aeneid. X, 463 ; d’après ce récit, Orion prend ■ sur ses épaules un Cyclope qui le conduit. — 2 On a voulu reconnaître pour Kédalion le nain du relief du Louvre (noire fig. 953) qui représente lléphaislos cl ses compagnons (Mûller-Wieseler. XVIII, 194 ; .Wilamowitj, 243, 60 ; reproduit par Roscher, Lexic. Il, 16SII. — 3 Cf. le même relief du Louvre, où l’on voit des satyres forecani des armes, sous la direction d’Héphaistos ; un drame salyrique de Sophocle avait pour titre Kédalion ; le sujet est incertain ; cf. Wilamowiti, |j. -37, 46 (ce serait une -tooç^ d’Héphaistos plutôt que la légende d’Orion). Malien a mentionné, p. 359, une tradition très déformée (Cic. ûe nat. deor. III, 55 ; Lydus, De mens. IV, 86), où Héphaistos est présenté comme le père d’un Kédalion. — » Malien, p. 336-358 ; Wilamowiti, p. i37. — 6 Theo- «ril. Schot. ad Vil, 149 ; Scliol. ad lliad. XXIIl, 92 ; Odyss. XXIV, 74 sq ; cf. Wilamo«il«, 235, 42. — « Locschcke, dans v. SchrSder, Griech. GôUer und Beroen. I, Berlin, 18S7, 85 ; Athen. Mitt. XIX (1894), 516, 1 ; FurtwSngler, Arch. Jahrb. VI (1S9I), 122 ; Wilamowiti, 237 ; Frankel, Ith. Mus. LXVII, 1912, U7, 1. Une liste des vases qui représentent celle scène est donnée par WSnting, De l’«/c«no in Olijmpum reilucto. Lipsiae, 1877, 23 sq. ; sur le vase 527 du Brilish Muséum, Héphaislos est monté sur un mulet ithyphallique ; il est couronné de lierre et d’un rameau de vigne, emblèmes dionysiaques ; cf. aussi l’aniphorc Gerhard, Avserl. Vasenb. xxxvni ; S. Reinach, lUp. des vases, II, 31. Le caractère ithyphallique du mulet est marqué sur l’ocnochoé signalée par Locschcke, dans Schrôder, 85, où le dieu lient à la fois d’une seule main eon marteau avec le pampre dionysiaque, tandis que, de l’autre main, il dirige sa monture. — Par exemple, une hydrie de Cacré, Dùmmier, It/im. Mitt. III, li.fl sq. n» 7 sq. ; Masner, Vas. d. k. Wien. .Mus. pi. n, n» 218 |= notre (Ig. 7576) ; Bulle, bilcne, 9, 18 ; Loesclicke, dans Schrndcr, 91 ; Gerhard, Gcs. Abh. pi. 71, 2. — S Amphore à figures rouges de la fabrique de la coupe de l’hineus ; cf. Huile, Silcne, 8, 14. — 9 Loeschcke, dans Sclirodcr, S7 ; reproduit dans Roscher, Leric. Il, 1681 ; cL aussi une peinture du v" siècle (WKnting, 27) où un satyre porte le marteau et les pinces d’Héphaistos. — lo Première moitié du VI» siècle ; cf. Furlwacnglcr-Rcichhohl, Griech. Vasenmnlciii, I, pi. 12. A peu près au même temps apparlionl ramphorisi|uc corintliion, (iollignon-Couve,

Héphaistos soutenu par un Silène*

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soutenant Héphaislos ivre (fig. 7571) ; enfin l’œnochoé attique ’^ qui montre un seul àne portant à la fois Dio- nysos et Héphaistos, celui-ci représenté avec ses instru- ments de travail et la couronne de lierre attachée autour de son bonnet d’artisan. Toutes ces peintures ne sont encore en somme que de spirituels excerpla empruntés au sujet du retour dans l’Olympe’*. Elles ont l’intérêt particulier de montrer l’influence exercée par le culte dionysiaque sur la légende d’Hé- phaistos, influence qui traduit vraisemblable- ment, nous l’avons dit, un syncrétisme établi dans les Cyclades, plus particulièrement à Naxos’°.

Dans le monde des daiinones secondaires, on a essayé de prouver une identité entre Hé- phaislos et Typhon ’^, hypothèse que Malien rejette avec raison " ;

des relations plus attestées et plus intéressantes sont établies avec les Cyclopes" [cyclopes]. L’élonnement causé par le phénomène du feu souterrain inspira, dans les régions occidentales surtout, la croyance aune forge cachée, où travaillaient des génies à forme humaine, compagnons d’Héphaistos. Cette création mythique ne pouvait naître qu’assez tard ; en fait, l’épopée primitive ne nomme encore que le dieu forgeron, travaillant isolé. Dans les peintures de la scène où Thélis vient comman- der les armes d’.Vchille, Héphaistos est représenté seul

n» 62S, pi. xiïi ; cf. Loeschcke, Athen. Mitt. XIX (1S94), 310 sq., pi. vm ; Hé- phaistos est représenté arec les pieds infirmes ; Locschcke reconnaît Dionysos dans un porteur de pampre ; autres interprétations : Graef, Sennes, XXXVI (1901), 95, qui croit pouvoir désigner comme Dionysos un personnage pris par d’autres pour une femme (Thétis, Aphrodite, Cordai, rSymphe ; cf. Malien, p. 357, avec les références) ; cf. aussi C. FrSnkel, Bhein. Mus. LXVII, 1912. 97, I ; et Malien, ibid. (le porteur de rameau serait bien Dionysos, et l’autre personnage une des com- pagnes féminines du dieu) ; cf. le cratère de viens style attique du Louvre, E 876 ; el le cralére corinthien du British Muséum, B 42 (reproduit dans Waiters, ffist. of anc. pottery, I, pi. ixi). Loeschcke, dans Schrôder, 84, a porté le nombre des représentations du Retour dans l’Olympe jusqu’ici connues à 50 environ ; cf. Bulle, Siiene, 50 (trois seulement avec représentation de l’assemblée des dieux). La liste des reproductions, avec indications bibliographiques, est donnée par Maltcn, Heph. p. 337. — ’l Furtwaengler-Kcichhold. Griech. Xasenmal. 1, 7, texte, p. 36 ; Dionysos se retourne vers Héphaislos, qui est représenté comme un beau et jeune cavalier, avec bottes en peau et chiton court ; de petites traces de métal enllammé se remarquent sur les piuces. — 12 Furtwaengler- Reiclihold,i6i(/. I,p. 13S, pi. 29 ; Dionysos précède el regarde Héphaistos ; un Silène et une musicienne accompagnent le cortège (= notre fig. 7571). — iSFnrlwaen- glcr-Rcichhold-llauser, pi. 120, 1 (époque de Périclès, plus récente). — ** Sur un cralére do Bologne, de style libre, Héra est représentée, semble-l-il, enchaînée ; cf. .kntike Denkm. 1,36. — ’^ Sur une base d’Athènes, Héphaistos parail asso- cié à Dionysos, Athéna.el probablement Hermès ; cf. Welcker, Ant. Denkm. V, p. 101 sq., pi. v. Sur le vase d’Héraclès cl des Dioscures, British mus. IV, F. 68, Dionysos esl associé à un Héphaislos ivre. Sur un miroir étrusque de Cliiusi (Ge- rhard, Btrusk. Spiegel, III, 93, pi. 90), Sethlans et Bacchus (Fulluns) sont représentés ; le sujet n’est pas expliqué (Pauli dans Roscher, Lex. Myih. IV, 786). Ces nionuroenls montrent que l’association Héphaistos-Dionysos n’est pas un syncrétisme local, restreint au groupe Chios-Samos. — 16 Fick, Personen- namea2, 463 ; Gruppe, Griech, Mythol. 1305. Gruppe remarque la même infirmité chei Héphaistos cl Typhon ; cf. Plutarch. De Isid. el Osirid. 55 ; ib» ’Epi«> !v

|iuOo"»»Yoî<nv Ui’AovTa toîi TuiSvos -i. «îlo» /opSaTs yo^inoiitai. — 17 Op. t. p. 360 ; critique du p.issage do Plutarch. De Isid. et Osirid. 35, qui serait une fausse compréhensinn de la légende rappelée par ApoUodore, I, 42, et Nonnos, I, SU ; Maltcn remarque que Typhon, personnification de l’ouragan, est fort éloigné, par sa nature, d’IIèphaislos (cf. sur Typhon, Wilamowiti, Herakl.’i, H, 262). — <8 Maltcn, p. 359 ; Kapp, dans Roscher, Lexic. I, p. 2070.